Construire la paix par la diplomatie

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Introduction :

« Igitur qui desiderat pacem, praeparet bellum / Celui qui veut la paix prépare la guerre. » Cette maxime, extraite de l’Epitoma Rei Militaris, traité militaire écrit par Végèce, un auteur romain qui vécut dans le contexte des invasions barbares entre le IVe et le Ve siècle, illustre parfaitement le principe de dissuasion. Selon Végèce, un État ne peut demeurer en paix que si son armée est suffisamment forte et bien organisée pour dissuader ses adversaires de l’attaquer.
Outre la dissuasion, les Romains recouraient également à la diplomatie pour construire la paix. Priscus, ambassadeur romain fut ainsi envoyé auprès d’Attila, chef des Huns, par l’empereur Théodose II (408-450), afin de maintenir la paix entre les Romains et les Huns qui se plaignaient du non-respect des termes du traité de Margos, conclu en 435.
De l’Antiquité à nos jours, la diplomatie a ainsi été au centre de la construction de la paix. Cependant, à l’époque moderne, la diplomatie évolue avec les traités de Westphalie (1648) qui font émerger un nouvel ordre européen reposant sur l’équilibre des puissances. Depuis l’époque contemporaine, le principe de sécurité collective est placé au cœur de la construction de la paix.
Aussi, nous verrons comment les traités de Westphalie puis le principe de sécurité collective bouleversèrent les processus de construction de la paix à partir de l’époque moderne.
Nous verrons dans un premier temps que les guerres de Trente Ans et de Quatre-Vingts Ans ont abouti à la construction de la paix en vertu du principe d’équilibre des puissances, affirmé par les traités de Westphalie. Cependant, les deux conflits mondiaux vont démontrer les limites de ce système westphalien et aboutir à des tentatives de construction de la paix par la sécurité collective autour de l’action de la SDN puis de l’ONU.

Faire la paix par les traités

En mettant fin aux guerres de Trente et de Quatre-Vingts Ans, les traités de Westphalie (1648) vont instaurer la paix en Europe en vertu du principe d’équilibre des puissances.

L’Europe en guerre pendant près d’un siècle

De 1568 à 1648, la guerre de Quatre-Vingts Ans (également appelée révolte des Gueux) embrase le nord de l’Europe. En cause, la volonté de sept provinces des Pays-Bas espagnols (dont le territoire correspond aujourd’hui aux Pays-Bas, à la Belgique, au Luxembourg et au nord de la France) d’obtenir leur indépendance de la monarchie espagnole mais également la liberté religieuse. De nombreux révoltés étaient en effet protestants, alors que la Couronne d’Espagne se revendiquait d’un catholicisme intransigeant.
L’Espagne est alors la plus puissante monarchie du monde, un « Empire où le soleil ne se couche jamais », qui possède d’immenses territoires en Asie et Europe et en Amérique. La dynastie des Habsbourg, divisée entre une branche espagnole (Habsbourg de Madrid) et autrichienne (Habsbourg de Vienne) est la plus puissante d’Europe.

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Rappel

Le protestantisme est une branche du christianisme issue de la Réforme, dont les fidèles rejettent l’autorité du pape.

Le 23 mai 1568, les révoltés, avec à leur tête Guillaume d’Orange, obtiennent un important succès dans la bataille de Heiligerlee, marquant le début de la guerre de Quatre-Vingts Ans, même si cette bataille n’eut pas de suites immédiates.

  • En 1581, les États généraux des Provinces-Unies (nouvelle appellation des sept provinces du Nord des Pays-Bas espagnols) adoptent l’Acte de la Haye, un décret qui proclame la déchéance de Philippe II d’Espagne (1556-1598) en tant que souverain du pays.

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Le décret proclame que le roi d’Espagne, n’ayant pas assuré ses devoirs de monarque vis-à-vis du peuple des Provinces-Unies, n’est dorénavant plus considéré comme tel. Les états généraux proclament alors la République.

Le conflit se poursuit pendant des décennies avec l’Espagne qui parvient à garder des territoires au sud des Provinces-Unies grâce à une répression féroce alliée à des trésors de diplomatie. Le roi de France Henri IV (1589-1610) déclare la guerre à l’Espagne et le conflit s’étend ainsi à l’Europe par le jeu des alliances.

En 1609, l’Espagne signe avec les provinces rebelles la Trêve de douze ans (1609-1621). Cependant, les négociations butent sur la question de la liberté de culte et la guerre reprend en 1621, alors que la guerre de Trente Ans (1618-1648) a commencé trois ans auparavant.

  • La totalité du continent européen est alors ravagée par la guerre.

Premier grand conflit de l’époque moderne, la guerre de Trente Ans débuta par une querelle entre les seigneurs protestants de Bohème (une région de l’actuelle République Tchèque) et la monarchie catholique des Habsbourg. Le 23 mai 1618, quelques nobles protestants rencontrent au château de Prague les représentants de l’empereur des Romains, Matthias Ier de Habsbourg, qui est également roi de Bohême. Alors que la discussion tourne à la dispute, les esprits s’échauffent et les représentants de Matthias Ier sont défenestrés. Par chance, un tas de fumier amortit leur chute et ils parviennent à prendre la fuite sous le feu de leurs agresseurs. L’incident, connu sous le nom de défenestration de Prague, met le feu aux poudres.

  • L’Europe sombre dans la guerre de Trente Ans.

Entre 1620 et 1635, la plupart des royaumes européens entrent en guerre. En 1625, Christian IV, roi protestant du Danemark conclut une alliance avec l'Angleterre et les Provinces-Unies contre les Habsbourg. En 1630, le roi Gustave-Adolphe de Suède envahit à son tour l’Allemagne et y remporte de nombreuses victoires avant de mourir au combat. En 1635, la France s’engage enfin directement dans la guerre. Bien que plutôt hostile aux protestants, le roi Louis XIII (1610-1643) conseillé par Richelieu, décide d’entrer en guerre aux côtés des protestants afin de rompre l’encerclement de la France par les possessions des Habsbourg, qui s’étendaient de la péninsule Ibérique aux Provinces-Unies en passant par le Saint Empire romain germanique au centre de l’Europe.

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À retenir

Les guerres de Quatre-Vingts et Trente Ans constituent le premier conflit continental majeur à avoir frappé le continent européen à l’époque moderne. Mêlant guerre de religions et conflits dynastiques, elles ont profondément bouleversé l’équilibre des puissances en Europe et entraîné de nombreux déplacements de populations.

Du fait des combats, mais aussi des exactions et des famines qu’il a entraîné, le conflit a fait plus de 5 millions de victimes, soit l’équivalent de la population de l’Angleterre à la même époque ! Après trente ans de conflit, les traités de Westphalie viennent conclure ces deux guerres qui ont ravagé l’Europe pendant près d’un siècle.

Faire la paix par les traités : les traités de Westphalie

De 1644 à 1648 des milliers de représentants de presque tous les pays impliqués dans les conflits participent à des négociations à Münster et à Osnabrück.
Pendant plusieurs années des diplomates plénipotentiaires défendent ainsi les intérêts de leur souverain. Les pourparlers sont longs, soumis à la lenteur des messages qui vont et viennent depuis les capitales européennes, de fait, certains messages mettent plusieurs mois à revenir. La définition des termes des traités est complexe, car les interlocuteurs sont nombreux et les rapports de force ne cessent d’évoluer, les conflits n’ayant été arrêtés qu’autour des villes où sont réunis les diplomates.

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Définition

Plénipotentiaire :

Diplomate à qui on accorde les pleins pouvoirs pour défendre les intérêts de son pays dans les négociations (les plénipotentiaires peuvent par exemple « acheter » certains termes des traités par des cadeaux ou des promesses).

Alt texte La Ratification du traité de Münster, tableau de Gerard ter Borch peint en 1648, montre les plénipotentiaires rassemblés à l’occasion de la signature d'un des traités de Westphalie.

Signés le 24 octobre 1648, les traités de Münster et d’Osnabrück s’ajoutent à la Paix de Münster, ensemble ils forment les traités de Westphalie qui concluent la guerre de Trente Ans et la guerre de Quatre-Vingts Ans.

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Définition

Traité :

Convention entre deux ou plusieurs États sous la forme d’un contrat. Il est d’abord négocié par les diplomates plénipotentiaires puis signé par les chefs d’États ou leurs représentants. Il n’entre réellement en vigueur qu’une fois qu’il est ratifié (validé) par le Parlement.

L’importance de ces traités est considérable. En effet, ils ont profondément modifié les équilibres politiques et religieux en Europe. Les traités de Westphalie consacrent donc la fin d’un ordre international fondé sur l’idée d’une paix terrestre perpétuelle garantie par la puissance morale d’une puissance universelle (Empire ou Église) et l’avènement d’un nouvel ordre dans lequel l’État-nation est le socle du droit international.

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À retenir

Concrètement, les clauses des traités de Westphalie prévoient que les États se reconnaissent mutuellement comme légitimes sur leur territoire propre.

Chaque État reconnaît donc à ses homologues une souveraineté externe (l’absence de soumission à une entité supérieure) et une souveraineté interne. Aucun État ne peut donc faire valoir sa supériorité – réelle ou supposée – sur un autre État puisque chaque État est seul souverain sur son territoire. Qui plus est, l’autorité de chaque État sur son territoire est exclusive, ce qui interdit – au moins théoriquement – à tout autre État de s’immiscer dans ses affaires intérieures.

Enfin, les traités de Westphalie instaurent l’équilibre des puissances comme garantie de la paix en Europe.

  • Aucune puissance ne peut devenir une superpuissance, les États n’ayant le droit de s’allier entre eux qu’à la condition que cette alliance ait pour but de contrecarrer la volonté hégémonique d’un autre État.

Les signataires des traités estiment en effet que la formation d’une superpuissance est une menace pour la paix, puisqu’elle ambitionnera par nature de dominer les autres puissances. Après l’Espagne Habsbourg, c’est la France de Louis XIV puis de Napoléon qui verra l’Europe s’allier contre elle.

Le Saint Empire romain germanique, s’il ne disparaît pas, est morcelé en plus de 350 États allemands dont les princes voient leurs pouvoirs renforcés, contribuant à l’affaiblissement durable de l’Empire. Une autre perdante du traité est l’Espagne : les traités consacrent en effet l’indépendance des Provinces-Unies, sur lesquelles l’Espagne renonce à toute revendication, mais elle conserve les Pays-Bas du Sud qui restent donc sous domination catholique et seront plus tard divisés entre la France et le nouveau Royaume de Belgique.

Les grands gagnants des deux traités sont la monarchie française et le royaume de Suède qui annexent de nombreux territoires.

  • La carte de l’Europe est donc complètement remodelée par les traités : tandis que le Saint Empire est morcelé, et donc affaibli, face à l’Empire ottoman en pleine expansion, les grands royaumes du Nord et de l’Ouest s’affirment comme les nouvelles grandes puissances continentales. De ce point de vue, la France des traités de Westphalie préfigure le règne sans partage de Louis XIV (1643-1715).

Du point de vue religieux enfin, les traités de Westphalie reconnaissent les trois confessions dans le Saint Empire : catholique, calviniste et luthérienne (les deux dernières étant deux variantes du protestantisme). Cependant, les princes des différentes principautés du Saint Empire conservent le droit d’imposer leur culte à leurs sujets. Ces traités consacrent donc le principe de non-ingérence des États dans le domaine religieux, sur le principe cujus regio, ejus religio (tel prince, telle foi). En revanche, il n’impose en aucun cas aux souverains signataires d’accorder la liberté religieuse à leurs sujets.

Le système international né des traités de Westphalie perdurera jusqu’à la Première Guerre mondiale. C’est notamment cette vision de la société internationale comme « concert des nations » où chacune à sa place et où l’équilibre doit toujours être maintenu qui est réaffirmée au congrès de Vienne en 1815. Ce rassemblement diplomatique eut lieu après les guerres révolutionnaires et napoléoniennes. Les théoriciens du nazisme furent parmi les plus ardents détracteurs de ce système d’équilibre international. Pour eux, il était à l’origine du délitement originel du Reich dont ils auraient contribué à l’affaiblissement en le divisant en une multitude de petits territoires indépendants.

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À retenir

Les traités de Westphalie vont instaurer un système de maintien de la paix fondé sur l’équilibre des puissances et l’État-nation. Par conséquent, les monarchies du nord et de l’ouest de l’Europe vont ressortir renforcées de ces traités, tandis que le Saint Empire romain en ressort durablement affaibli. En dépit de la Révolution française et de l’épopée napoléonienne, les principes nés des traités de Westphalie vont constituer les fondements du maintien de la paix et des relations diplomatiques entre États jusqu’à la première guerre mondiale.

Faire la paix par la sécurité collective

La Grande Guerre, par sa dimension mondiale et son caractère total, a marqué le début de la remise en question de l’efficacité du système westphalien pour garantir la paix.

De l’échec de la SDN à la création de l’ONU

Le cataclysme de la Première Guerre mondiale (1914-1918) démontra les limites du modèle westphalien du maintien de la paix par l’équilibre des puissances. Lors de la conférence de la paix de Paris de 1919, le président américain Woodrow Wilson (1913-1921) fit de la création de la Société des Nations (SDN) un de ses principaux objectifs, avec la volonté d’empêcher une nouvelle marche des puissances modernes vers la guerre totale.

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Définition

Société des Nations (SDN) :

Créée par le traité de Versailles de 1919, la Société des Nations siégeant à Genève était une organisation internationale, dont l’objectif était de maintenir la paix dans le monde. Ses 32 membres étaient placés sous l’autorité d’un Conseil permanent composé de la France, du Royaume-Uni, du Japon, de l’Italie et de la Chine (paradoxalement, les États-Unis, qui furent à l’initiative de sa création n’en furent jamais membres car le Congrès ne ratifia pas le traité de Versailles). En dépit d’objectifs ambitieux (désarmement, prévention des guerres à travers le principe de sécurité collective et résolution des conflits par la négociation), la SDN fut incapable d’endiguer la montée en puissance des totalitarismes en Europe à cause du manque de moyens pour faire appliquer ses décisions.

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À retenir

Chaque État membre de la SDN s’engageait à protéger et à défendre l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’ensemble des autres États membres contre toute agression extérieure. Concrètement, la SDN marque l’avènement du maintien de la paix sur la base du principe de la sécurité collective.

Dans le cas où un État se rend coupable d’une agression contre un autre État, il est considéré comme ayant commis un acte de guerre contre tous les autres États membres. Cependant, la SDN dispose de moyens relativement peu contraignants pour faire respecter ces grands principes.

  • Tout différend entre États doit être soumis au Conseil de la SDN. Cependant, si les membres du Conseil ne parviennent pas à désigner l’agresseur à l’unanimité, chaque État recouvre sa liberté d’action. Qui plus est, la SDN ne peut contraindre ses membres à entrer en guerre contre un État agresseur.
  • Le refus des États-Unis d’adhérer à l’organisation dès sa création, en 1920, affaiblit considérablement sa capacité à régler des conflits qui mettent en cause les intérêts des grandes puissances.
  • Dès le début des années 1930, les limites et faiblesses de la SDN sont mises en évidence par son incapacité à empêcher la politique expansionniste des états dictatoriaux.
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Exemple

Entre 1931 et 1932, la SDN est ainsi incapable d’empêcher la conquête de la Mandchourie chinoise par le Japon, pourtant membre permanent du Conseil.
De même, en 1935, elle est discréditée par son impuissance à empêcher l’agression commise par l’Italie à l’égard de l’Éthiopie, pourtant membre de l’organisation depuis 1923, ce qui permet à Mussolini d’annexer l’Éthiopie en mai 1936. L’empereur d’Éthiopie Haïlé Sélassié prononce un célèbre discours d’appel à l’aide à Genève, mais la France et l’Angleterre ne veulent pas risquer de mécontenter Mussolini, avec qui ils souhaitent s’allier face à Hitler. Cependant, Mussolini finit par être unanimement condamné pour l’invasion de l’Éthiopie et se rapproche d’Hitler en 1937.

À partir de cette date, le régime nazi, convaincu de l’impuissance de la SDN, multiplie les provocations et les annexions en Europe. Le 12 mars 1938, Hitler rattache l’Autriche à l’Allemagne : c’est l’Anschluss. Le 29 septembre 1938, les accords de Munich l’autorisent à annexer les Sudètes. L’année suivante, la guerre éclate.

En dépit de l’échec de la SDN, le principe de sécurité collective est repris par l’Organisation des Nations unies. Créée le 26 juin 1945 lors de la Conférence de San Francisco suite à l’adoption de la Charte des Nations unies, l’ONU est une organisation internationale qui, comme la SDN, a pour mission de garantir la paix dans le monde par la sécurité collective.
Pour pailler aux insuffisances de la SDN, les fondateurs de l’ONU ont décidé d’améliorer les mécanismes de la sécurité collective en attribuant aux cinq grandes puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale un rôle prépondérant dans la nouvelle organisation qui réunit la quasi-totalité des États dans le monde.

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À retenir

L’organe central de l’ONU est le Conseil de sécurité au sein duquel les cinq puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale (France, Royaume-Uni, Chine, États-Unis et URSS) détiennent un siège permanent et possèdent un droit de véto.

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Définition

Droit de véto :

Possibilité pour chacun des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU d’empêcher la prise d’une décision commune même si tous les autres membres sont favorables à cette décision.

Le Conseil de sécurité a pour mission de maintenir la paix et la sécurité internationales. En cas de menace de la paix mondiale par un État, le Conseil de sécurité peut adopter à son encontre des sanctions économiques, voire entreprendre une action armée de maintien ou de rétablissement de la paix. Cependant, le déclenchement de la guerre froide, deux ans plus tard, en 1947, va paralyser l’ONU du fait de l’opposition des grandes puissances entre elles.

On note une seule exception notable à cette période d’inaction : la guerre de Corée (1950-1953). Suite à l’agression de la Corée du Sud par la Corée du Nord communiste, le Conseil de sécurité de l’ONU autorisa en effet l’intervention d’une coalition militaire de dix-sept pays dirigée par les États-Unis pour soutenir la Corée du Sud.
Cette exception s’explique par l’absence momentanée de l’URSS au Conseil de sécurité.

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Dans le contexte de la guerre froide, la sécurité internationale va reposer sur la création d’organisations de défense collective comme le traité de l’Atlantique nord (OTAN) signé le 4 avril 1949 par les pays occidentaux, et le pacte de Varsovie, conclu le 14 mai 1955 qui crée une alliance militaire entre les États communistes d’Europe de l’Est et l’URSS.

  • De fait, ce n’est qu’au moment de la première guerre du Golfe (1990-1991), à la fin de la guerre froide, que l’ONU va jouer le rôle pour lequel elle avait été créée à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
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À retenir

À la fin de la Première Guerre mondiale, la création de la SDN marqua l’avènement du maintien de la paix sur la base du principe de la sécurité collective. Cependant, la Seconde Guerre mondiale mit en évidence les limites de ce système. La SDN s’est en effet montrée incapable d’empêcher les agressions des régimes totalitaires à l’encontre de ses États membres.
Cependant, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États vainqueurs conservèrent le principe de la sécurité collective comme pilier du maintien de la paix dans le monde avec la création de l’ONU. Toutefois, la division des grandes puissances qui étaient les garantes de son bon fonctionnement a considérablement limité son efficacité au cours de la guerre froide.

Un renforcement du rôle de l’ONU après la guerre froide : l’exemple des mandats de Kofi Annan

À l’issue de la guerre froide, le blocage systématique des projets de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU par l’un ou l’autre des deux grands s’estompe.

Le 2 août 1990, jour de l’invasion du Koweït par l’armée irakienne du dictateur Saddam Hussein, le Conseil de sécurité adopte une résolution (résolution 660) qui instaure des sanctions économiques immédiates contre l’Irak. Face au refus des Irakiens de se retirer du Koweït et pour parer à la menace d’une attaque irakienne contre l’Arabie Saoudite, le Conseil de sécurité adopte une nouvelle résolution (678) autorisant une intervention armée internationale si l’armée irakienne ne s’est pas retirée du Koweït avant le 15 janvier 1991. Pour la première fois depuis la fin de la guerre de Corée, l’URSS, qui était en pleine implosion, n’opposa pas son véto à la décision du Conseil de sécurité.

  • La rapide défaite de l’armée irakienne au cours de l’opération Tempête du désert (du 16 janvier au 28 février 1991) menée par les forces américaines renforcées par les troupes d’une large coalition internationale comprenant des effectifs de nombreux pays arabes, laissa penser au triomphe du principe de sécurité collective dans le monde post-guerre froide.

Le 1er janvier 1997, Kofi Annan, diplomate ghanéen jusqu’alors sous-secrétaire général de l’ONU fut élu secrétaire général, c’est-à-dire plus haut fonctionnaire de l’ONU, pour succéder à l’égyptien Boutros Boutros Ghali (janvier 1992-décembre 1996).

Alt texte Kofi Annan ©Kofi Annan Foundation

Charismatique, le diplomate ghanéen connaissait parfaitement les rouages de l’ONU pour en avoir été un haut fonctionnaire avant la fin de la guerre froide. Après des débuts timides en 1993 comme sous-secrétaire général où l’ONU ne parvint pas à empêcher le génocide des Tutsis au Rwanda (1994) qui fit près d’un million de victimes dans un pays qui comptait tout juste six millions d’habitants, Kofi Annan va peu à peu personnifier le renouveau de l’autorité onusienne et son volontarisme. En août 1995, c’est lui qui donne son accord à l’OTAN pour le bombardement des positions serbes en Bosnie au cours de la guerre de Bosnie (1992-1995) précipitant la fin du conflit et faisant cesser les opérations de nettoyage ethnique orchestrées par l’armée serbe de Bosnie, en contraignant la Serbie à négocier les accords de Dayton (14 décembre 1995).

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Définition

Accords de Dayton :

Signés à Paris le 14 décembre 1995 mais négociés à Dayton dans l’Ohio, les accords dits de Dayton ont mis fin aux combats interethniques en Bosnie en procédant à la partition du pays entre les croates et les bosniaques d’un côté et les serbes de Bosnie de l’autre. Ils prévoyaient également le déploiement d’une force de paix multinationale sur le terrain, l’IFOR.

Élu secrétaire général en 1997, Kofi Annan débute son mandat par un succès retentissant en faisant aboutir une médiation entre le dictateur irakien Saddam Hussein et les États-Unis qui l’accusaient de produire et de dissimuler des armes chimiques. En revanche, son volontarisme se heurte à de nombreux écueils en Afrique, plongée dans la décennie du chaos, les interventions de l’ONU se limitant à des opérations humanitaires ou de maintien de la paix avec l’envoi de casques bleus sur le terrain.

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Exemple

L’opération MINUSIL (1999-2005) en Sierra Leone ne parvint pas à faire immédiatement cesser les exactions de la guerre civile qui déchira le pays de 1991 à 2002 et provoqua 120 000 morts et le déplacement de plus de deux millions de personnes (pour une population d’environ sept millions d’habitants).

En 2001 cependant, Kofi Annan est reconduit pour un nouveau mandat à la tête des Nations unies par acclamation de l’Assemblée générale. La même année, il reçoit, conjointement avec l’ONU, le prix Nobel de la paix pour son action. Kofi Annan apparaît alors comme le symbole du renouveau de l’ONU.

Cependant, les attentats du 11 septembre 2001 vont venir ternir son bilan. En effet, en dépit de ses efforts, le septième secrétaire général des Nations unies n’est pas parvenu à empêcher l’intervention militaire en Irak de 2003. Certes, l’ONU n’a pas donné son aval à l’opération, contrariant la volonté américaine de bénéficier d’un mandat de la communauté internationale pour autoriser l’intervention contre le dictateur irakien Saddam Hussein, néanmoins l’organisation va être marginalisée sur la scène internationale puisque les États-Unis n’hésitent pas à intervenir en dehors de la légalité internationale. Le 19 mars 2003, ils envahissent l’Irak avec plusieurs alliés.

Sur le plan institutionnel, le bilan de Kofi Annan est également à nuancer. S’il a réussi à réformer l’administration onusienne, en revanche, le secrétaire général n’est pas parvenu à élargir le Conseil de sécurité afin de le rendre plus représentatif du monde du XXIe siècle. Kofi Annan souhaitait en effet accorder une place plus importante à l’Allemagne, au Japon, au Brésil, à l’Inde et à l’Afrique du Sud au sein du Conseil de sécurité. L’objectif poursuivi était de rendre le Conseil de sécurité plus représentatif de l’ensemble des États membres en intégrant au processus de décision les grands pays émergents comme l’Inde et l’Afrique du Sud, mais aussi les plus importants contributeurs financiers (Allemagne et Japon). Cependant, le projet échoua du fait de la volonté des cinq membres permanents (France, États-Unis, Royaume-Uni, Russie et Chine) de conserver leur statut privilégié hérité de 1945.

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À retenir

Les mandats de secrétaire général de Kofi Annan sont emblématiques du renforcement du rôle de l’ONU après la guerre froide. Le volontarisme du secrétaire général a en effet permis à l’ONU de gagner en légitimité et de recouvrer une partie de l’autorité perdue lors de la guerre froide. Cependant, les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis vont sonner le glas du renouveau de l’ONU. Marginalisée suite à l’invasion de l’Irak par les États-Unis en dehors de tout cadre légal international, l’ONU va également échouer à réformer ses institutions en profondeur.

Conclusion :

Les guerres de Quatre-Vingts et de Trente Ans ensanglantèrent l’Europe pendant près d’un siècle. Exsangues, les puissances européennes se résolurent à faire la paix par les traités de Westphalie (1648), qui bouleversèrent, non seulement la carte du continent, mais aussi la façon de concevoir la paix. Cette dernière résidait dorénavant sur l’équilibre des puissances, c’est-à-dire sur la reconnaissance mutuelle par les États de leur territoire respectif, de leur indépendance politique et de leur souveraineté territoriale. Ce modèle westphalien échoua néanmoins à prémunir le monde des guerres mondiales.
À l’issue de la Grande Guerre, le président américain Woodrow Wilson décida de substituer au modèle westphalien celui de la sécurité collective. L’établissement de ce modèle du maintien de la paix dans le monde par la sécurité collective se traduisit par la création de la Société des Nations. Cependant, cette dernière se montra incapable d’endiguer la montée des régimes totalitaires et de prémunir ses membres de leurs agressions. C’est néanmoins ce modèle qui fut à nouveau plébiscité à l’issue de la Seconde Guerre mondiale avec la création de l’ONU.
Marginalisée par l’opposition des grandes puissances membres du Conseil de sécurité pendant la guerre froide, l’ONU connut un renouveau à partir de 1990 et de la première guerre du Golfe. Incarné par Kofi Annan, ce renouveau fut néanmoins remis en cause par l’invasion de l’Irak par les États-Unis et par l’incapacité de l’ONU à se réformer institutionnellement. L’échec du processus de paix israélo-palestinien, la multiplication des conflits dans le monde (en particulier au Moyen-Orient) et l’incapacité de l’ONU à faire respecter le droit international, y compris par les membres permanents du Conseil de sécurité, témoignent de sa marginalisation et de l’impérieux besoin de réformer son organisation.