Croc-Blanc, un roman d'aventures et d'initiation

Introduction :

Croc-Blanc est un roman d'aventures de Jack London paru aux États-Unis en 1906. Croc-Blanc est un loup dont on suit le parcours et l’évolution à travers les paysages du Grand Nord américain. L’action est perçue à travers les yeux de Croc-Blanc. Ce point de vue original permet au lecteur de vivre une expérience unique : être dans la peau d’un loup.

À travers des extraits de Croc-Blanc, nous étudierons le cadre du roman d'aventures puis nous verrons que le roman d'aventures peut permettre au héros d’évoluer, de grandir.

Le décor de l’aventure

Le décor de Croc-Blanc est le Grand Nord américain, il s’agit de grands espaces sauvages propices à la rêverie du lecteur.

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Définition

Propice :

L’adjectif propice désigne quelque chose de favorable, qui se prête bien à la circonstance.

Pourtant Jack London montre dans l’extrait ci-dessous que l’aventure peut se situer n’importe où. Croc-Blanc découvre la ville de San-Francisco et le narrateur livre ses impressions à la vue de la ville.

« Croc-Blanc reprit terre à San-Francisco. Il fut stupéfait. […] Et jamais les hommes blancs ne lui avaient paru des dieux aussi merveilleux que depuis qu’il trottait sur le lisse pavé de la grande ville. Les cabanes, faites de bûches de bois, qu’il avait connues, faisaient place à de grands bâtiments, hauts comme des tours. Les rues étaient pleines de périls1 inconnus : camions, voitures, automobiles. De grands et forts chevaux traînaient d’énormes chariots. Sous des câbles monstrueux, tendus en l’air, des cars électriques filaient rapidement et cliquetaient2, à travers le brouillard, hurlant leur instante3 menace, comme font les lynx, dans les forêts du Nord. »

1 Un péril est un danger.
2 Cliqueter signifie faire un léger bruit produit par des coups.
3 L’adjectif instant désigne quelque chose de pressant, d’urgent.

Market Street, San Francisco Market Street, San Francisco, avec la parade du cirque des Frères Ringling, Septembre 1900

Il s’agit donc d’une description de la ville à travers les yeux de Croc-Blanc. Si on relève les verbes « faisaient », « étaient », « traînaient », « filaient », et « cliquetaient » on peut remarquer qu’ils sont conjugués à l’imparfait de l’indicatif.

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À retenir

L’imparfait est le temps que l’on emploie pour faire une description dans un récit au passé.

Le narrateur décrit les éléments qui constituent habituellement la ville comme par exemple le « pavé », « les bâtiments » et les « rues », mais aussi les moyens de transport tels que les « camions, voitures, automobiles », les « chariots » et les « cars électriques ». C’est également l’occasion pour le lecteur de découvrir une époque et un lieu, la ville de San Francisco au début du XXe siècle.

La ville perçue par un loup est un point de vue intéressant.

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À retenir

Pour le lecteur, il s’agit d’un décor connu. Or ici, il le redécouvre comme si c’était la première fois grâce au regard de Croc-Blanc. Cela permet au lecteur de prendre du recul par rapport à ce qu’il connaît déjà, c’est une expérience unique.

Croc-Blanc perçoit les dangers de la ville que le lecteur ne perçoit pas. La ville lui paraît hostile.

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Définition

Hostile :

L’adjectif hostile qualifie quelque chose ou quelqu’un qui se comporte comme un ennemi.

De plus, tout lui paraît immense, comme en témoigne l’utilisation des adjectifs « énormes » et « monstrueux ». Il compare également les habitations à des « tours » tant elles lui paraissent hautes.

Croc-Blanc ressent une impression de danger, impression qui est renforcée par les termes « péril » et « menace », mais aussi par la comparaison des « cars électriques » aux « lynx, dans les forêts du Nord ». Le loup compare la ville avec ses propres repères, ce qu’il connaît, c’est-à-dire le Grand Nord.

Il ressent de l’admiration pour les hommes qui vivent dans ce tumulte, il les trouve « merveilleux ». Il ressent également de la surprise à la vue de ce lieu inconnu, il est « stupéfait ».

L’aventure s’est délocalisée, Jack London apprend ainsi au lecteur que l’aventure peut se situer n’importe où, même dans sa rue, au pied de sa porte. Elle tient surtout à l’inconnu. C’est en effet l’inconnu qui fait sentir le danger et donne l’impression de vivre une aventure.

L’aventure comme apprentissage de la vie

Voici maintenant un autre extrait de Croc-Blanc, qui se passe avant son arrivée à San Francisco. Alors qu’il est dans la forêt, Croc-Blanc tombe par hasard sur des Indiens. Il n’avait encore jamais vu d’homme auparavant.

Croc-Blanc - français 6e

« Un des Indiens finit par se lever, marcha dans sa direction et s’arrêta au-dessus de lui. Le louveteau se colla davantage encore contre le sol. C’était l’Inconnu, concrétisé en chair et en sang, qui se penchait sur lui, pour le saisir. Sa fourrure eut un hérissement inconscient, ses lèvres se rétractèrent et il découvrit ses petits crocs. […] Il ne savait s’il devait seulement gronder, ou combattre. Finalement, il gronda jusqu’au moment où la main le toucha, puis engagea la bataille. »

Croc-Blanc-français-6e

« Ses dents brillèrent et mordirent. L’instant d’après il reçut, sur un des côtés de la tête, un coup qui le fit basculer. Alors tout instinct de lutte l’abandonna. Il se prit à gémir comme un enfant et l’instinct de la soumission l’emporta sur tous les autres. »

Les émotions qui traversent Croc-Blanc lors de sa première rencontre avec les hommes évoluent. Il ressent tout d’abord le danger à la vue des Indiens et éprouve de la peur, que l’on peut reconnaitre à travers son comportement. Il se colle « contre le sol », il a un « hérissement », ses « lèvres se rétract [ent] et il découvr [e] ses petits crocs ».

Le nom « Inconnu », dans la phrase « C’était l’Inconnu, concrétisé en chair et en sang, qui se penchait sur lui, pour le saisir » interpelle puisqu’il ne s’agit pas d’un nom propre, ce n’est pas une personne mais une idée, il ne devrait donc pas avoir de majuscule. Mais le narrateur veut faire comprendre au lecteur l’immense peur que peut ressentir Croc-Blanc.

C’est un être nouveau pour le loup et il lui fait tellement peur qu’il représente à ses yeux l’idée même de l’inconnu. C’est une figure de style que l’on appelle une personnification, elle sert ici à amplifier le sentiment de peur que ressent Croc-Blanc.

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Définition

Personnification :

Une personnification est une figure de style qui consiste à donner des caractéristiques humaines à quelque chose d’abstrait ou à un animal.

L’indien devient donc « l’Inconnu », il symbolise l’inconnu. Un homme, pour le lecteur, est juste un homme. Mais pour le loup c’est un être effrayant et totalement étranger. Le champ lexical de la lutte illustre le combat que Croc-Blanc mène contre l’homme. On peut par exemple relever les termes « combattre », « gronda », « bataille », « mordirent », « coup », et « lutte ».

De plus, les nombreux verbes conjugués au passé simple comme « gronda », « toucha », « engagea », « brillèrent » ou encore « mordirent » indiquent qu’il y a une succession d’actions et cela fait ressentir le suspense au lecteur.

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Définition

Suspense :

Le suspense est un moment dans le roman qui tient le lecteur en haleine, il est dans l’attente de ce qui va se passer.

Croc-Blanc fait preuve de courage dans la lutte mais doit s’avouer vaincu et se soumet. L’auteur compare le loup à un « enfant » quand il se soumet à l’homme. Pendant cette confrontation, le louveteau comprend que l’homme est plus fort et qu’il ne peut rien contre lui.

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À retenir

Croc-Blanc tire des leçons de ses aventures. C’est un roman d’initiation.

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Définition

Roman d’initiation :

Un roman d’initiation est un roman d’apprentissage où le héros grandit et mûrit en apprenant de quoi sont faits la vie et le monde qui l’entoure.

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Exemple

Ainsi David Copperfield de Charles Dickens ou encore Bel-Ami de Guy de Maupassant sont des romans d’apprentissage.

Conclusion :

Le roman d'aventures plonge le héros dans un décor hostile. Il doit lutter pour sa survie en faisant preuve de courage, en affrontant un milieu sauvage et des êtres terrifiants. Le lecteur admire le héros et tremble pour lui dans les moments de suspense. Le roman d'aventures peut être aussi un récit initiatique, lorsque le héros ressort grandi des aventures qu’il a traversées.