Le développement durable : nouvelles perspectives

Introduction :

Alors que la notion du réchauffement climatique était controversée il y a quelques années, plus aucun scientifique ne remet en question les effets désastreux de l’homme sur l’environnement aujourd’hui. À cela s’ajoutent les nombreuses inégalités sociales et économiques qui ne cessent de se creuser.

Dans cette perspective, il est plus qu’urgent de s’interroger autour de la notion de développement durable. Cette expression exprime l’idée selon laquelle le développement social, économique, culturel et démographique doit se fonder sur une perspective de « durabilité ». Il s’agit donc de s’occuper du monde actuel, sans pour autant sacrifier les générations futures. Le développement durable se définit comme un réel projet de société axé sur la réduction des inégalités présentes tout comme sur la préservation du patrimoine mondial à long terme.

Nous allons donc donner dans une première partie de ce cours une définition précise de la notion de durabilité. Dans un second temps nous étudierons les difficultés politiques liées à l’application d’une politique durable. Enfin, nous analyserons tout l’enjeu que représentent les villes du « Sud » dans une mise en œuvre du développement durable.

La durabilité : définition et objectifs

Définition

C’est dans les années 1980 que l’expression « développement durable » a été définie. Dans un ouvrage intitulé Notre avenir à tous, Gro Harlem Brundtland affirme que le développement durable est « le développement permettant d’assurer les besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». La notion a ensuite été popularisée au Sommet de Rio de Janeiro, en 1992. Ces sommets sont également appelés « Sommets de la Terre ».

Sommet de Rio

Ce sommet, qui a réuni des centaines de chefs d’États et des milliers d’ONG (organisations non gouvernementales) a abouti à la « déclaration de Rio », qui fixe les principales lignes à conduire pour mettre en œuvre une politique active de durabilité.

bannière à retenir

À retenir

La déclaration de Rio n’a pas force de loi : elle n’oblige pas les gouvernements à agir en faveur du développement durable, ce qui réduit en partie sa portée.

Agenda 21

Néanmoins, pour faire appliquer les propositions de la déclaration de Rio, le Sommet de Rio a créé l’agenda 21, que l’on appelle aussi l’action 21. Il s’agit d’un plan d’action recommandé dans plusieurs secteurs afin d’amorcer le XXIe siècle avec une perspective durable.

Ces différents axes de travail permettent de saisir que lorsque l’on parle de développement durable, on ne fait pas seulement référence à l’écologie et à la préservation de l’environnement, mais on fait également pression pour des changements sociaux, politiques et économiques.

  • Le développement durable exprime un changement de priorités fondamentales et une prise en compte des dégâts causés par l’homme. Il se construit à partir de trois axes fondamentaux : l’économie, la société et l’environnement.

Schéma des axes du développement durable

Axes de développement

Le domaine écologique

En 1988, un comité d’experts sur le climat a été désigné par l’ONU. On l’appelle le GIEC (groupe d’experts intergouvernemental pour l’évolution du climat). L’objectif du GIEC n’est désormais plus de prouver que le changement climatique est un phénomène réel ; mais il s’agit de proposer des « stratégies d’adaptation et d’atténuation » des changements climatiques. Autrement dit, les dégâts causés par l’homme sont en partie irréversibles, et il s’agit désormais de s’adapter au mieux à ces changements.

La conférence de Rio reprend les conclusions du GIEC pour lutter contre la déforestation, et pour la préservation de la diversité biologique (notamment en proposant des plans de préservation des espèces en voie d’extinction, ou encore, par la mise en place d’aires protégées). Le dérèglement climatique, et ses désastreuses conséquences sur les mers et les océans tout particulièrement, sont des préoccupations majeures du plan Agenda 21. Le plan propose également de travailler activement sur la réduction des pollutions industrielles et agricoles. Pour cela, le monde de l’entreprise doit s’engager à respecter certaines normes.

Le domaine économique

Le développement durable tel qu’il a été défini au Sommet de Rio s’attaque également aux inégalités, notamment entre les pays du Nord et du Sud. En fait, le sommet de Rio met en avant la notion de « responsabilité sociale ». De plus, les propositions du plan Agenda 21 ont remis en cause directement le mode de vie et de consommation de l’Occident.

Le domaine social

Un vaste plan de lutte contre la pauvreté est également annoncé lors du Sommet. L’inégale répartition des richesses est alors comprise non seulement dans une perspective de rééquilibrage Nord/Sud, mais également par la prise en compte des pauvretés à différentes échelles : au sein de l’Union européenne par exemple, ou encore à l’échelle du continent sud-américain.

Il s’agit donc de cibler les besoins sociaux de chaque pays afin de les intégrer dans une perspective de durabilité. L’accès à la santé et à l’éducation devient alors une priorité mondiale. En fin de compte, les propositions du Sommet de Rio sont tellement ambitieuses qu’elles impliquent une modification des formes de la mondialisation : il ne s’agit plus désormais d’augmenter les flux commerciaux mais de les rééquilibrer.

Les limites de l’application du projet de Rio

Acteurs

Afin de mettre en œuvre ce programme très ambitieux, plusieurs acteurs ont décidé de conjuguer leurs efforts. Les pouvoirs publics tout d’abord, soit les 178 gouvernements représentés lors du Sommet de Rio. Au niveau européen, le développement durable est mis en œuvre à partir d’une stratégie commune que l’on nomme Stratégie européenne du développement durable.

Au niveau national, ce sont les collectivités territoriales qui prennent en charge les objectifs de durabilité. Chaque pays possède en effet des besoins différents des autres et c’est aux collectivités de cibler ces besoins. En effet, la lutte contre la pauvreté en France se réalise d’une manière différente de la lutte contre la pauvreté au Niger par exemple, qui est, à l’heure actuelle, le pays le plus pauvre du monde.

En dehors des pouvoirs publics, ce sont également les entreprises qui s’engagent à orienter leurs politiques vers des modes de fonctionnement durables. Dans la perspective d’une responsabilité sociale et éthique, certaines entreprises prennent en compte les impacts environnementaux de leurs activités.

Comme derniers acteurs, il ne faut pas oublier de citer les ONG (organisations non gouvernementales), qui permettent d’attirer l’attention sur les problèmes environnementaux de manière parfois très spectaculaire.

Manifestation d’activistes de Greenpeace

Faiblesses

De nombreux progrès ont été réalisés en matière de sensibilisation des citoyens depuis le Sommet de Rio, en 1992.

  • Cependant, les dérèglements climatiques ainsi que les inégalités sociales ne cessent d’augmenter.

Malgré les recommandations du Sommet de la Terre, qui date de plus de vingt ans déjà, les rejets mondiaux de gaz à effets de serre continuent dangereusement d’augmenter. Le niveau des océans a connu, quant à lui, une hausse soutenue depuis 1992. Quant à la biodiversité, il ne se passe pas une seule journée sans l’extinction d’une nouvelle espèce.

  • Comment expliquer les difficultés à mettre en œuvre des politiques de développement durable ?

Tout d’abord parce que les principes du Sommet de Rio n’ont aucune valeur législative. L’ONU ne peut pas forcer les pays à appliquer les recommandations nécessaires.

Par ailleurs, l’ONU est également critiquée sur un autre point : elle ne prendrait pas suffisamment en compte les réalités socio-économiques des pays pauvres lorsqu’elle exige la mise en place de politiques durables, souvent très coûteuses en termes d’investissement.

  • Il existe donc une incohérence entre le discours des institutions internationales et les politiques de lutte contre la pauvreté.

Dans les pays riches comme la France, les enjeux sont liés, par exemple, à l’augmentation du nombre de pistes cyclables pour réduire la pollution liée aux voitures. Dans les pays pauvres, avant de penser à aménager des pistes cyclables, il faut tout d’abord aménager les routes, les sécuriser, les moderniser. Le développement durable ne devient alors que secondaire.

La mise en œuvre du programme de Rio implique aussi un changement de mentalité dans la manière de vivre la mondialisation : elle implique que les sociétés occidentales consomment de manière beaucoup plus équilibrée, notamment dans le cas des énergies fossiles telles que le pétrole.

Villes et développement durable

Le programme de Rio était ambitieux. Les différents sommets qui ont eu lieu par la suite, tels que Johannesburg en 2002 ou Rio en 2012 se sont finalement contentés de répéter les objectifs du sommet de 1992, sans qu’aucune mesure concrète ne soit finalement appliquée. L’un des principaux problèmes de la mise en place du développement durable est sans aucun doute celui de l’aménagement des villes.

Croissance urbaine et développement durable

Au début du XIXe siècle, 2 % de la population mondiale vivait en ville. Ce taux est désormais à plus de 50 %.

  • Il est donc indispensable de repenser le lien entre villes et développement durable.

Dans les pays développés, ce lien se tisse tout naturellement. Dans certaines villes, on y construit des quartiers dits « écologiques », ou écoquartiers, parsemés d’immeubles BBC, c’est-à-dire des bâtiments à basse consommation, et dont l’architecture s’intègre parfaitement dans le paysage.

Un exemple d’immeuble BBC

Les politiques liées au développement durable sont également pensées en termes de transport : par exemple, les plateformes multimodales permettent de connecter le métro au vélo, afin de réduire la pollution.

Toutefois, dans les pays du Sud, qu’ils soient pauvres ou en développement, ces aménagements urbains sont considérés comme des luxes. Comment gérer alors le développement durable des villes du Sud ?

Les villes du Sud et le développement durable

L’urbanisation des villes du Sud pose problème par son caractère anarchique car l’étalement urbain, consécutif à l’explosion démographique des métropoles, ne s’est pas fait de manière officielle, sous le contrôle de l’État, mais bien souvent de manière désordonnée. Les paysans issus de l’exode rural se sont petit à petit installés en ville, dans des maisons de fortune, qui deviennent petit à petit des quartiers.

Le développement de ces villes se fait souvent au détriment de l’environnement, comme cela peut être le cas à Buenos Aires, qui ne traite qu’une très faible partie de ses eaux, rejetant alors directement les déchets dans le Río de la Plata, qui finit sa course dans l’océan Atlantique.

Carte du Río de la Plata

Alors que l’enjeu des pays occidentaux tels que la France réside dans l’aménagement des transports (augmentation des pistes cyclables, combinaisons trains / vélo améliorées), les villes du Sud doivent subvenir à des besoins élémentaires.

Dans cette perspective, la règlementation des villes du Sud est souvent très laxiste quant à l’environnement ou encore au respect des droits sociaux. En Chine par exemple, le développement se réalise au prix de niveaux de pollution record. À Rio, les dépotoirs côtoient les maisons de fortune installées illégalement.

Un exemple d’habitations à Rio

Conclusion :

La fracture Nord/Sud est totalement perceptible dans l’étude que nous venons de réaliser sur le développement durable. Alors que cette notion était censée permettre de réduire les inégalités mais aussi d’intégrer le monde dans un mouvement d’atténuation des dérèglements climatiques, on s’aperçoit en fait de la faiblesse institutionnelle des différents sommets. Ces échecs sont dus non seulement à l’absence de pouvoir législatif des Sommets, mais aussi à l’absence de prise en compte des priorités dans les villes du Sud.

Il est donc urgent d’intégrer les perspectives de développement durable dans les priorités des villes du Sud avec l’aide et la collaboration des pays du Nord afin que la notion de développement ne s’oppose plus à celle « développement durable ».