La défaite de juin 1940

Introduction :

Depuis le début du XXe siècle, la France a traversé de nombreuses crises politiques qui ont eu, à chaque fois, des répercussions sur l’opinion publique du pays.

Il s’agira de traiter ici du déroulement la défaite de 1940 avant de nous intéresser à la propagande vichyste puis à la Résistance. Mais tout d’abord, quelques définitions importantes.

Définitions

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Définition

Opinion publique :

​L’opinion publique est l’ensemble des idées et des jugements partagés par la population sur tous les sujets de société.

L’opinion publique a pu se former grâce au progrès de :

  • la liberté de communication,
  • la liberté politique,
  • l’éducation via l’école républicaine.
  • la technologie, qui a favorisé la diffusion des journaux à un coût de plus en plus bas, entraînant une démocratisation de l’accès à l’information.
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Attention

Le terme « médias » est récent et l’on ne parle de médias de masse qu’à partir du XXe siècle avec l’apparition d’abord des journaux, puis des radios, des chaînes de télévisions, d’internet, et enfin des téléphones mobiles. Il faut être vigilant sur le contexte de la crise étudiée et ne pas parler de médias qui n’existaient pas à l’époque.

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Définition

Crise politique :

​Une crise politique est un moment particulier en démocratie où le pays a une « poussée de fièvre », liée à un événement qui choque l’opinion publique. Dans toute crise politique il y a un enjeu politique majeur.

Les médias, selon l’époque, jouent un rôle fondamental pour traiter l’événement, informer et faire basculer l’opinion publique dans un sens ou dans l’autre. L’objectivité absolue n’existant pas, chaque média façonne l’opinion publique à sa façon.

La défaite de 1940 : rappels historiques

La défaite de 1940 est une des principales défaites marquantes de l’histoire de France.

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Rappel

La guerre fut déclarée en septembre 1939 mais la « drôle de guerre » dura de septembre 1939 à mai 1940. L’armée française attendait l’armée allemande derrière la ligne Maginot. Dès mai-juin 1940, c’est la défaite française et 1,5 million de soldats sont faits prisonniers.

  • ​C’est la débâcle pour les autorités et l’exode pour des milliers de personnes qui fuient devant l’avancée fulgurante des troupes allemandes.

Dès lors, on se partage en deux camps :

  • ceux qui veulent l’armistice
  • et ceux qui veulent poursuivre le combat.

La IIIe République a donné les pleins pouvoirs à Pétain mais sur 900 parlementaires seuls 670 étaient présents. Les communistes étaient exclus, et bon nombre étaient soit prisonniers, soit morts ou injoignables.

  • 80 députés ont voté contre, 20 se sont abstenus, et 569 ont votés les pleins pouvoirs.

Pétain signe l’armistice avec l’Allemagne nazie, armistice dont les clauses sont très contraignantes pour la France.

  • La France est coupée en deux par une ligne de démarcation, et ce jusqu’en 1942 quand l’Allemagne envahit tout le territoire, violant cet accord.
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À retenir

Les Français s’en remettent à Pétain, le vainqueur de Verdun, vieillard aux allures de bon patriarche.

C’est alors une guerre entre Français qui se déroule, avec d’un côté les collaborateurs et de l’autre les résistants.

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Attention

​Il faut toutefois garder en tête que la grande majorité des Français est attentiste : leurs préoccupations se limitent à trouver de la nourriture, du chauffage et des moyens de déplacement.

La guerre se déroule sur plusieurs fronts. Nous nous intéresserons ici aux médias de l’époque, et à comment Vichy et la résistance intérieure et extérieure les ont utilisés pour faire basculer l’opinion publique dans leur camp.

Les médias et la propagande vichyste

Du côté du maréchal Pétain, la déclaration de la capitulation se fait par la radio et la presse écrite. Dans son discours du 17 juin 1940, il annonce l’arrêt des combats.

Alt texte Maréchal Philippe Pétain - Auteur inconnu - Domaine public

Le lendemain, le général de Gaulle emploie le même média pour répondre à Pétain et lancer son célèbre appel du 18 juin 1940 pour la Résistance.

Alt texte Général Charles de Gaulle - ©Office of War Information, Overseas Picture Division - Domaine public

  • Dès lors Vichy et la Résistance vont se livrer une bataille armée et une bataille des médias.

La propagande Vichyste et la « question juive »

Pour Vichy et les collaborateurs, il faut avant tout maîtriser la presse et la radio par la censure, en zone occupée comme en zone libre.

Vichy crée le « Secrétariat d’Etat à l’Information et de la Propagande » pour contrôler les médias.

La pénurie de papier est générale et le monde de l’édition est mis au pas. Les maisons d’édition jugées anti-allemandes ou anti-Vichy sont fermées. Il n’y a plus qu’une seule radio officielle, Radio Paris, aux mains de Vichy et avec interdiction de capter d’autres radios.

Pour la presse collaborationniste les principaux journaux sont :

  • Je Suis Partout,
  • Gringoire,
  • La Gerbe,
  • Le Matin,
  • Les Temps Nouveaux.

Les principaux intellectuels au service de Vichy et des Allemands sont :

Le 3 octobre 1940, Vichy édicte un statut des Juifs de sa propre initiative, sans être en contact encore avec les Allemands.

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À retenir

L’antisémitisme de Vichy est un des plus virulents d’Europe, et il est omniprésent dans la presse du régime.

Le Matin s’empresse par exemple d’annoncer le statut des Juifs, qui exclut de la citoyenneté française tous les Français d’origine juive.

À partir de là, les Juifs vont faire l’objet d’un très fort matraquage, en particulier de la part de l’écrivain Céline qui publie de nombreux articles sur la supposée mainmise des Juifs sur la France et l’Europe. Un journal de la collaboration Notre combat pour la nouvelle France socialiste en a publié quelques extraits dans l’article « Céline nous parle des Juifs… »

« Pleurer, c’est le triomphe des juifs ! Réussit admirablement ! Le monde à nous par les larmes ! 20 millions de martyrs bien entraînés c'est une force ! »

La propagande antisémite est un thème majeur de la presse et de la radio sous Vichy. Les actualités (diffusées dans les cinémas avant la projection des films), permettent de montrer des images antisémites.

Alt texte Affiche de l’exposition itinérante « Le juif et la France » sommet d’antisémitisme - Source  : Archives fédérales allemandes - CC-BY-SA-3.0-DE

Le culte du maréchal Pétain

Vichy travaille aussi le culte de la personnalité du maréchal Pétain afin d’unir les Français derrière lui.

  • Affiches, bandes dessinées, chansons, tracts, livres, radio ou actualités cinématographiques, le maréchal est partout, il doit incarner la France.

Les nouveaux symboles du pays, que l'on retrouve sur cette affiche, sont :

  • la devise « Travail, famille, patrie »,
  • la francisque,
  • les 7 étoiles du maréchal et le laurier du vainqueur,
  • le portrait, bien au centre, et qui domine une France rurale, artisanale et familiale,
  • la ville et les usines sont au deuxième plan.
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À retenir

​Le maréchal Pétain est réactionnaire : sa vision est la vision d’une ancienne France, d’un âge d’or auquel il faudrait revenir.

La propagande joue sur différents registres :

  • la terre et le monde paysan,
  • la famille,
  • l’Allemagne, notre « alliée »,
  • la lutte contre les résistants que l’on traite de terroristes, d’assassins.

La propagande cible aussi les enfants : tous les élèves de France en rentrant en classe le matin chantaient Maréchal nous voilà à la gloire de Pétain.

Les bandes dessinées pour enfants sont des moyens pour faire passer tous les messages, même les plus naïfs.

La lutte contre la résistance

La propagande vichyste est également utilisée dans la lutte contre la Résistance intérieure et pour l’occupant allemand.

Symbole majeur de cette mission : l’affiche rouge.

En février 1944, 23 résistants pour la plupart d’origine étrangère ont été fusillés par les Allemands. Vichy placarde dans toute la France une affiche rouge représentant les résistants communistes. Leurs noms, à consonance étrangère, sont mis en avant.

  • Vichy veut montrer que la Résistance c’est l’anti-France, juive, étrangère, communiste.

Alt texte L’affiche rouge - Auteur  : Administration de Vichy - Domaine public

Pour Vichy, il faut saper la résistance et son principal symbole, le général de Gaulle.

Affiche de propagande Affiche de propagande

Ce dernier document est très important concernant la propagande vichyste. Il montre pourquoi la France est dans une situation vue comme négative.

  • ​À gauche, en rouge : ce qui a détruit la France. La liste est longue mais intéressante. Les fondations sont mauvaises, elles représentent tout ce qui a pourri la nation : la France est ruinée, abandonnée.
  • À droite, la nouvelle France, avec de nouvelles fondations : bien droite, solide, elle est habitée, la cheminée est allumée, il y a de la verdure. Et bien sûr, on retrouve les étoiles du maréchal Pétain. C’est la Révolution nationale.

La Résistance

La Résistance a moins de moyens pour faire passer ses messages.

Radio Londres est l’outil principal de communication. Une guerre des ondes entre Radio Paris et Radio Londres fait rage. Des messages codés étaient diffusés sur Radio Londres pour la Résistance intérieure française et permettaient de donner des informations ou un feu vert pour une opération.

En plus de la radio, la Résistance éditait des journaux clandestins, parmi lesquels on trouvait :

  • Combat ;
  • Le Franc-Tireur ;
  • L’Humanité, journal du parti communiste français ;
  • Libération.

De nombreux tracts et affiches étaient en plus placardés et distribués par les réseaux de la Résistance. Le but est de contrecarrer la propagande de Vichy et celle des Allemands.

Il fallait à tout prix faire savoir qu’une Résistance était bien là, active, à Londres comme sur le territoire français. D’où la propagation et la multiplication des actions de résistance, au cours desquelles on risquait sa vie. Il fallait montrer que l’autre France existait par des affiches qui incitaient les Français à entrer en résistance.

Le but de cette affiche est de montrer que la Résistance française n’est pas seule et qu’il faut l’aider financièrement.

On trouvait des petits tracts et petits journaux clandestins diffusés localement. Il ne faut pas sous-estimer cette presse clandestine locale, qui a pendant 4 ans préparé les Français à la Libération.

La date du 11 novembre est pour la Résistance une date symbolique. Les Allemands et Vichy interdisent toutes les manifestations ce jour là.

  • La Résistance en fait un jour symbolique où il faut montrer sa force et sa détermination à mettre fin à l’occupation allemande.

Plus la guerre avance, plus les incitations à prendre le maquis sont nombreuses.

Affiche de la Résistance Affiche de la Résistance

Ici, l’Allemagne nazie sera vaincue entre le marteau anglo-saxon et la France résistante. La croix de Lorraine est d’ailleurs le symbole de la résistance gaulliste.

Conclusion :

Vichy et la résistance se sont livré une guerre de la presse, de la radio et des images. Sans ces moyens de communication, l’opinion publique ne peut être atteinte, surtout en temps de guerre où la censure et les pénuries de toutes sortes rendent beaucoup moins audibles certains messages.

De son côté, Vichy s’est appuyé sur le culte de la personnalité du maréchal Pétain. Pour unifier la France, les collaborateurs avaient besoin d’un ennemi commun, responsable de tous les maux : ce sera le juif.

La Résistance s’appuyait, elle, sur la figure emblématique du général de Gaulle, dans l’espoir de rassembler un maximum de Français libres en Angleterre ou de leur faire prendre le maquis. Moins équipée, elle devait tirer le maximum de Radio Londres et des journaux et tracts illégaux distribués dans tout le pays.