Sujet d’invention |
De retour dans sa cellule, le prisonnier se dirigea vers l’unique fenêtre pour continuer à contempler l’horizon infini, à travers les barreaux et son masque de fer. La mer s’étendait sous un ciel sombre et chargé. Il poursuivit alors, comme si l’on pouvait toujours l’entendre :
« Oui, Maudit, je le suis depuis ce jour de ma naissance où l’on ne m’attendait pas ! À la joie de l’arrivée d’un héritier du trône succéda l’effarement, pour mon père comme pour ma mère, quand, prise de nouvelles douleurs, la reine dut mettre au monde un second enfant : qui de ces frères jumeaux serait donc l’aîné, successeur de Louis XIII ?
Reprenez des éléments narratifs du texte à poursuivre et puisez aussi des idées dans tous les textes du corpus.
Plus petit, malingre, le teint violacé, je leur parus incapable de survivre plus de quelques jours et indigne de devenir roi. On décida de me confier à une nourrice, loin de mes parents et de mon frère, dans l’espoir que ma mort prochaine apporterait une solution naturelle à la question du trône.
Pourtant, je survécus et devins même un garçon robuste, élevé au grand air, choyé par une femme attentive et aimante. Mais rapidement, mon frère jumeau succéda à mon père, mort cinq ans à peine après notre naissance. C’est à ce moment-là que, craignant que je ne fasse valoir mes droits, on décida de m’arracher à ma nourrice et de m’enfermer dans un cachot.
Que ne m’avait-on pas plutôt tué dès la naissance ? La mort me parut immédiatement un sort plus enviable que la malédiction que je vivais. Une seule autre issue s’offrait à moi : puisque mon visage était celui du roi, je pouvais prendre sa place ! Oh non, ce n’est pas le pouvoir que je convoitais, même s’il me revenait autant qu’à lui ! Si je rêvais de devenir Louis XIV, c’était pour revenir à la vie !
Hélas, j’ai échoué et la malédiction a continué son œuvre. Me voici désormais doublement enfermé dans ce fort : à nouveau privé de liberté, j’ai aussi perdu mon identité puisqu’un masque de fer recouvre mon visage royal… »
Puis, se jetant contre la porte de fer qui résonna, sous le choc du masque du même métal, il poussa ce cri désespéré qui fit frémir les mousquetaires : « Comment supporter d’être un mort dans un corps en vie ? »