Corrigé Brevet Sujet brevet corrigé - centres étrangers groupe 1 - Français 2025 - Rédaction
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Épreuve de Français – Rédaction (40 points) |
Sujet d’imagination
Sujet d’imagination
Après le départ de Tartuffe et d’Elmire, Orgon sort de sa cachette et se retrouve seul sur scène. Rédigez son monologue théâtral. Il comprend progressivement ce qu’il vient de se passer sous ses yeux, fait part de ses sentiments et de ses doutes à travers ses mots et son attitude. Enfin, il prend une décision sur sa manière de réagir.
Analysez le sujet en répondant aux questions suivantes :
- quand ? Après le départ de Tartuffe et d’Elmire ;
- qui ? Orgon, seul sur scène, dans un monologue adressé au public ;
- quoi ? Il doit parler de ce qu’il a vu et exprimer ses sentiments et de ses doutes. La consigne précise également qu’Orgon doit prendre une décision finale.
Analyse du sujet :
Après le départ de Tartuffe et d’Elmire, Orgon sort de sa cachette et se retrouve seul sur scène. Rédigez son monologue théâtral. Il comprend progressivement ce qu’il vient de se passer sous ses yeux (partie I), __fait part de ses sentiments et de ses doutes à travers ses mots et son attitude (partie II). Enfin, il prend une décision sur sa manière de réagir (partie III).
Ce monologue pourra donc être structuré en trois étapes :
I. Une prise de conscience progressive
II. Des sentiments confus (colère, honte, regret…)
III. Une décision finale
« À travers ses mots et son attitude » implique que vous devez prendre en compte le caractère théâtral du texte que vous écrivez. Pensez à insérer quelques didascalies décrivant la posture, les déplacements, les gestes d’Orgon sur scène…
Proposition de correction
ORGON, seul, les yeux dans le vide, comme hébété.
À quelle diablerie viens-je d’assister ? Je tombe des nues…
Se reprend.
Assurons-nous qu’ils soient bien partis… Il semble que oui… Mon Dieu… Que viens-je d’entendre ? Ai-je bien entendu d’ailleurs, ou ai-je rêvé ? Cet infâme Tartuffe à qui j’ai ouvert les bras, que j’ai accueilli dans ma maison, et que j’ai défendu contre tous les membres de ma maisonnée… Un vil séducteur ? Un hypocrite ? Un imposteur ? Un faux dévot ? Malgré les réticences de ma femme et ses tentatives de le raisonner, quelle insistance diabolique à la détourner du droit chemin ! Dieu merci, je n’ai pas été surpris sous la table… J’aurais pu me trahir, j’aurais pu attirer les soupçons en toussant par exemple mais fort heureusement, j’ai pu assister à la scène jusqu’au bout et découvrir l’ignoble supercherie que ce vil coquin a manigancée pour me soutirer mon argent et séduire ma femme.
Ses yeux s’animent soudain. Rouge de colère.
Quelle naïveté ! Quelle crédulité ! Je m’en veux de m’être laissé berner de la sorte !
Il se frappe le visage.
Imbécile que je suis ! J’aurais dû écouter Elmire, qui m’a pourtant souvent montré qu’elle était rusée comme un renard ! Sa perspicacité légendaire aurait dû m’alerter ! Je suis trahi ! Je suis déshonoré ! Comment pourrais-je désormais restaurer ma dignité après cette infâmie !
Silence. Le regard fixe, les poings serrés et se déplaçant de long en large sur la scène.
Eh bien ! Je vais commencer par chasser ce malotru de ma maison, et sans attendre ! Cet infâme imposteur sans foi ni loi va voir de quel bois je me chauffe ! Je laisse le Ciel se charger de sa fausse dévotion et de ses mensonges éhontés ! Il règlera lui-même ses comptes avec Dieu ! Quant à moi, on ne m’y reprendra plus, ma naïveté a des limites…
Il sort.
Les didascalies ont été mises en italique mais vous devez évidemment les mettre entre parenthèses dans votre copie.
Sujet de réflexion
Sujet de réflexion
Pour dénoncer les travers de la société, est-il efficace, pour un artiste, de chercher à faire rire ?
Vous répondrez à cette question dans un développement organisé, en vous appuyant sur des exemples pris dans les œuvres littéraires et artistiques que vous connaissez.
Analyse du sujet :
Les mots clés ici sont « dénoncer » et « travers de la société », qui vous renvoient directement au chapitre du programme qui porte ce titre. Il faut donc mobiliser vos connaissances sur les œuvres que votre professeur vous a proposées en lecture autonome ou que vous avez étudiées en classe.
Au brouillon, dans les premières minutes de l’épreuve, vous pouvez par exemple faire une liste des textes (poèmes, articles, romans, pièces de théâtre) et/ou des images étudiées en classe et vous souvenir des analyses que vous avez faites avec votre professeur sur ces documents.
Méthode :
La formulation du sujet invite à s’interroger sur l’efficacité du rire et donc à une réponse nuancée. Il faut évidemment répondre « oui » à la question (partie I) mais aussi examiner les limites du « oui » de votre première partie en réfléchissant aux inconvénients éventuels du rire sur la transmission du message. Le comique est-il le seul registre qui permette de dénoncer ? Quels sont ses inconvénients éventuels ? Ce sont ces questions qui vous permettront de construire la ou les partie(s) suivante(s). Attention : la troisième partie n’est pas obligatoire. Si vous parvenez à la construire, elle permettra de dépasser les oppositions et de proposer un autre élément de réponse à la question (autre que les réponses tranchées « oui, il est efficace » et « non il ne l’est pas ») Ici, la synthèse pourrait être par exemple : « le rire est efficace à condition qu’il s’adapte au sujet traité ».
Brouillon :
Attention à l’exploitation du brouillon. Vous avez 1h30 pour produire une soixantaine de lignes. Vous ne devez donc pas dépasser 30 min de réflexion au brouillon (50 min de rédaction et 10 min de relecture sont préconisées). Seuls les titres de parties et les exemples doivent figurer sur vos feuillets. Ne rédigez pas, vous n’aurez pas le temps.
Un conseil : n’écrivez que sur le recto des feuillets, cela vous évitera d’oublier des éléments importants si vous omettez de retourner les feuilles !
Proposition de rédaction :
Introduction :
Depuis l’Antiquité, de nombreux artistes et écrivains ont eu recours à l’humour pour pointer les défauts et les injustices de leur époque [phrase d’accroche]. Pourtant, le rire, souvent associé à la légèreté, peut-il véritablement devenir un outil de réflexion et de dénonciation ? Autrement dit, le comique permet-il de critiquer efficacement la société ? [mise en question du sujet $\rightarrow$ problématique]
Nous verrons d’abord en quoi le rire peut être un moyen de critique particulièrement percutant, avant d’en envisager les limites [annonce du plan : ici, la formulation du sujet invite à nuancer le propos].
Attention, les titres des parties ne doivent pas apparaître dans votre copie. Vous devez les remplacer par des phrases d’introduction marquées par un alinéa (à chaque changement de partie).
I. Le rire est une arme efficace qui permet de transmettre des messages destinés à faire réfléchir le lecteur et d’éveiller son esprit critique.
Le rire est évidemment plaisant pour le lecteur ou le spectateur : il rend la critique plus agréable à recevoir. Le théâtre, et en particulier la comédie, a toujours été un divertissement plébiscité par le public. Dans sa pièce de théâtre Les Nuées, le dramaturge antique Aristophane utilise la comédie et la satire pour critiquer les excès et les dérives de la société athénienne de son temps. Il en est de même plus tard, à l’époque classique, lorsque Molière, dans Tartuffe, fait du spectateur un complice amusé lorsqu’il met en scène Orgon caché sous la table, découvrant l’hypocrisie de Tartuffe. Les répliques à double sens, les didascalies et l’insistance du faux dévot permettent au lecteur de s’amuser de la situation tout en blâmant le comportement du personnage. Il s’agit, à l’époque de Molière de corriger les mœurs en riant. Le rire permet aussi de dénoncer sans heurter directement, en évitant la censure ou la brutalité de certains propos. Ainsi, La Fontaine, dans ses Fables, dénonce les mœurs de son époque en mettant en scène des animaux. Par exemple, dans Les Animaux malades de la peste, les lecteurs sont invités à réfléchir à l’injustice. La mise en scène animalière rend la critique plus acceptable socialement, sous le règne absolutiste de Louis XIV.
Pensez à intégrer les analyses sur Tartuffe que vous avez faites dans la première partie de votre devoir. Vous pourrez toujours le faire puisque le sujet de réflexion est systématiquement en relation avec le texte à l’étude.
II. Les limites du rire : mal compris, trop léger et parfois inadapté au sujet
Cependant, il arrive parfois que le message se perde dans le comique : dans ce cas, le rire se suffit à lui-même et le message passe au second plan. Le public peut ne pas voir la critique derrière l’humour, et l’auteur rate sa cible. De plus, les sujets graves (la guerre, la misère, le racisme…) ne se prêtent pas toujours au rire. Par exemple, Victor Hugo dans Les Misérables a préféré provoquer l’indignation par l’émotion plutôt que le rire et la portée de son message n’en est pas moins efficace, bien au contraire. Dans le poème Melancholia, il dénonce la souffrance et la détresse engendrées par le travail des enfants avec des mots poignants qui résonnent chez le lecteur de manière particulièrement convaincante. Pourtant, c’est l’empathie, la pitié et l’indignation qui dominent. Il est même difficile d’imaginer comment instaurer une distance humoristique avec cette injustice criante. De même, les poètes de la Résistance, comme Aragon ou Desnos, ont critiqué et dénoncé l’Occupation allemande de manière virulente sans jamais utiliser le rire, qui aurait été complètement inadapté dans la situation.
III. L’idéal consiste à allier rire et réflexion et d’adapter le ton au sujet traité
Finalement, le rire est un outil de réflexion très puissant s’il est bien utilisé mais il n’est pas toujours adapté au sujet que l’on veut traiter : ironiser ou plaisanter sur certains sujets (les génocides par exemple) s’avère souvent contre-productif : on démystifie1 en riant des sujets qui ne prêtent pas vraiment à rire et cela peut mener à du révisionnisme2, voire à du négationnisme3. Pour dénoncer, il faut susciter la complicité et l’empathie du lecteur, pas instaurer une distance. Or le rire instaure une distance critique, qui permet de prendre de la hauteur par rapport à des dysfonctionnements ou des excès qui doivent être mis en lumière. Le rôle de l’artiste engagé est précisément cette mise en lumière.
Néanmoins, dans certains cas, le comique de situation, de caractère, ou de langage restent des moyens efficaces pour faire réfléchir le lecteur. L’absurdité d’une situation par exemple ou les injustices sociales peuvent être mises en relief par la distance ironique. Ainsi, Voltaire, dans Candide, dénonce les conditions de détention en désignant les cellules de prison par l’antiphrase « des appartements d’une extrême fraîcheur » ou la guerre comme une « boucherie héroïque », ce qui permet de mettre en valeur le paradoxe d’une guerre « noble » ou « sainte ».
Les arts visuels ne sont pas en reste : les dessins de presse et les caricatures sont autant de formes artistiques qui critiquent aussi, avec légèreté, en exagérant les défauts d’un homme politique ou en mettant en relief les dysfonctionnements d’une institution. Cela permet au lecteur de prendre de la distance avec l’actualité et de réfléchir plus profondément sur le monde. Par exemple, les caricatures de Daumier, au XIXe siècle, ou celles de Plantu de nos jours dénoncent les abus du pouvoir avec un humour caustique4 qui touche directement le public.
Conclusion
En somme, le rire peut être un moyen très efficace pour dénoncer les travers de la société, à condition qu’il ne rate pas sa cible et surtout qu’il soit adapté intelligemment au sujet traité. Lorsqu’il est bien utilisé, l’humour fait réfléchir tout en divertissant, ce qui en fait une arme précieuse pour les artistes engagés, soucieux de défendre certaines causes.
Ainsi, le rire apparaît comme un outil particulièrement pertinent pour critiquer les défauts de la société, à condition qu’il ne rate pas sa cible et surtout qu’il soit adapté intelligemment au sujet traité. Lorsqu’il trouve le ton juste, l’humour parvient à faire réfléchir tout en divertissant, devenant alors une ressource précieuse pour les artistes engagés, soucieux de défendre certaines causes.
La conclusion doit résumer brièvement le propos tout en répondant à la problématique (la question soulevée par le sujet et posée dans l'introduction).
1 On ne prend pas au sérieux, on ignore la gravité du sujet
2 Position idéologique qui tend à minimiser l’existence des génocides et prétend réviser l'histoire sur ce point.
3 Position idéologique qui tend à nier l’existence des génocides en prétendant qu’ils n’ont pas existé.
4 Qui attaque en se moquant.