Le Brésil : rôle mondial, dynamiques territoriales

Introduction :

Le Brésil est le plus grand des pays d’Amérique du Sud, que ce soit par sa taille ou bien par sa puissance économique. Cependant ce géant, décrit comme un pays émergent, peut-il rivaliser avec son imposant voisin du nord, les États-Unis ? Ce cours permettra de voir tout d’abord que le Brésil est une puissance régionale intégrée au cœur de la mondialisation. Une deuxième partie permettra d’étudier l’organisation territoriale du pays et les grandes inégalités de développement qu’elle entraîne.

Le Brésil : une puissance régionale au cœur de la mondialisation

Le Brésil, pays émergent en chiffres

Carte du Brésil Carte du Brésil

La superficie du Brésil est de 8,5 millions de km2, ce qui équivaut à 17 fois la France métropolitaine. Le pays couvre près de la moitié de la surface du continent Sud-Américain et est également un géant démographique.

  • En effet, sa population s’élève à 200 millions d’habitants, dont 85 % vit en zone urbaine.

Avec un PIB de 2 757 milliards de dollars (environ 6 fois moins que les États-Unis), soit 11 000 dollars par habitants, le Brésil est au 7e rang de l’économie mondiale, derrière le Royaume-Uni. Le PIB brésilien est réparti ainsi :

  • 6 % pour l’agriculture ;
  • 27 % pour l’industrie ;
  • 67 % pour le tertiaire (les services).

Si l’on compare cette répartition aux secteurs qui emploient la population active (c’est-à-dire les secteurs où les brésiliens travaillent), on a :

  • 20 % dans l’agriculture ;
  • 14 % dans l’industrie ;
  • 66 % dans le tertiaire.

On peut donc voir que si l’agriculture ne représente qu’une petite partie du PIB, elle emploie pourtant un très grand nombre d’habitants.

De même que dans bon nombre de pays riches ou émergents, les richesses du Brésil sont inégalement réparties.

  • Les 10 % les plus pauvres possèdent moins de 1 % des richesses, et les 10 % les plus riches en possèdent 46 %.

Le Brésil est donc un pays émergent qui devance des pays dits « développés », comme le Canada, l’Italie, ou encore l’Australie. Il se rapproche d’ailleurs de plus en plus de la France, en terme de développement.

Un géant agricole

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À retenir

Le Brésil est un géant agricole mondial.

Maïs, soja, café, sucre, agrocarburant et cacao sont, entre autres, les fers de lance de l’agriculture brésilienne. Dans le secteur de l’élevage bovin, le Brésil est en concurrence directe avec les pays du Nord. Des firmes transnationales jouent un rôle mondial majeur dans le commerce agricole et agroalimentaire brésilien. JBS est, par exemple, une des plus grandes transnationales de protéines animales au monde, et Brasil Foods se situe au 10e rang mondial des entreprises de transformation des aliments.

Le Brésil est longtemps resté dans les cycles économiques avec un seul produit d’exportation : la canne à sucre, et le café dans une moindre mesure. Vers les années 60-70, le Brésil a commencé à utiliser l’agriculture pour s’ouvrir aux marchés extérieurs (de la même façon que pour l’industrie).

  • Ce fut une véritable révolution agricole.

Les espaces agricoles gigantesques (3,4 millions de km2), issus en partie de la dévastation de la forêt amazonienne, ont ouvert des perspectives énormes pour cette agriculture ; et le Brésil a pris des parts de marché aux puissances agricoles traditionnelles en devenant le 4e exportateur mondial.

Une puissance industrielle et énergétique

L’innovation au Brésil est en plein essor. L’acier, l’automobile, les raffineries de pétrole, l’aéronautique et l’informatique sont autant de secteurs dans lesquels le Brésil a percé sur le marché international.

  • Vale, Embrauer ou Petrobas, des firmes transnationales brésiliennes, s’insèrent peu à peu dans le commerce international.

Le Brésil a également des capacités énergétiques. Grand producteur d’hydroélectricité, puisque le pays assure 80 % de sa production électrique grâce à cette énergie, il est aussi producteur de pétrole, de gaz naturel et de charbon. Le sous-sol regorge de minerais en tout genre dont le fer, pour lequel le Brésil se situe au 3e rang mondial.

Même si l’Asie reste son principal client et fournisseur, le pays importe et surtout exporte en grande quantité vers l’Amérique du Nord et l’Europe occidentale. Au niveau international, ses importations s’élèvent à 1 %, et ses exportations à 2 %.

Une puissance régionale fragile

Le Brésil a pu organiser la Coupe du monde de football en 2014. Avoir les capacités d’organisation d’un tel événement mondial est un signe de sécurité, d’une hausse du niveau de vie, et de capacités technologiques et financières importantes. Un autre symbole fort est le fait que le Brésil revendique un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.

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À retenir

Le Brésil est tourné vers le monde, mais ce pays reste une puissance régionale de premier plan. À lui seul, il représente plus de 50 % du PIB de l’Amérique du Sud, et est la plaque tournante du Mercosur.

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Définition

Mercosur :

Le Mercosur est le Marché commun du sud, formé par le Brésil avec ses partenaires les moins développés, l’Argentine, le Venezuela, le Paraguay et l’Uruguay.

La croissance brésilienne bénéficie donc à tous ses partenaires commerciaux. Le Brésil fait également partie du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), qui regroupe les grandes puissances émergentes et qui serait, selon le FMI, à l’origine de 60 % de la croissance mondiale en 2015.

Le Brésil pratique le multilatéralisme, en favorisant la coopération entre pays et en essayant de promouvoir une politique plus équilibrée en faveur des pays émergents et en développement. S’il est un moteur pour les pays plus fragilisés autour de lui, le Brésil doit néanmoins faire face à ses propres limites.

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Définition

Multilatéralisme :

Le multilatéralisme est un système de relations internationales qui privilégie les négociations, les coopérations ou encore les accords entre au moins trois États, dans le but d’instaurer des règles communes.

Un des problèmes les plus importants est la mise en valeur du territoire par les moyens de transport. En effet, cet immense pays ne possède pas un réseau aussi efficace qu’aux États-Unis par exemple. Il n’y a pas assez de routes, d’autoroutes, de voies de chemin de fer ou de voies navigables, et le nombre de ports internationaux est très faible.

Cependant, ouvrir des voies de transports terrestres dans une immensité hostile telle que la forêt amazonienne est un vrai défi. Pour faciliter les échanges des productions agricoles, les autorités essaient de désenclaver le pays le long des frontières de la forêt amazonienne. La tâche est ardue, car déboiser et créer des routes sous un climat équatorial est une gageure.

La cohésion sociale du Brésil est également un problème avec une population très cosmopolite où noirs et métis sont les plus défavorisés. Un autre problème est le cas des paysans sans terre qui se heurtent aux grands propriétaires terriens, lesquels contrôlent la majorité des exploitations.

  • Aujourd’hui, les différentes réformes agraires ont atténué le problème sans le régler totalement.

Malgré tous ses atouts, le Brésil n’est pas une puissance politique, militaire, culturelle, technologique, monétaire ou industrielle de premier plan. En effet, si on le compare aux États-Unis, les différences entre la 1re puissance économique du monde et la 7e sont importantes, avec de grands écarts économiques et sociaux entre les deux pays. Cependant, si le Brésil continue de progresser ainsi, les écarts vont se réduire très rapidement.

L’organisation du territoire brésilien

Les territoires sont variés au Brésil, et les inégalités sont importantes de l’un à l’autre. On peut diviser le pays en cinq régions :

  • le Sudeste,
  • le Sud,
  • le Centre-Ouest,
  • le Nord,
  • et le Nordeste.

Le Sudeste est une région bien développée, qui concentre la majorité de l’activité et de la population avec deux métropoles, Rio de Janeiro et Sao Paulo. On peut d’ailleurs voir sur la carte ci-dessous que le Sudeste se trouve sur la seule façade maritime du Brésil, la façade Atlantique. Les autres régions sont soit en développement, soit sous-développées, soit à l’état naturel.

territoire brésilien carte brésil Le territoire brésilien

Histoire et fondation

La façade maritime du Brésil a été peuplée en premier, de la même façon qu’aux États-Unis. La population a mis en valeur les littoraux, ainsi qu’une petite partie de l’intérieur des terres. Ce n’est que petit à petit que le Centre-Ouest et le Nordeste ont été mis plus en valeur.

La capitale du Brésil, Brasilia, est le symbole de la lenteur de la conquête de l’intérieur des terres car la ville est seulement la quatrième plus peuplée du pays. Sa construction, dans le Centre-Ouest, date des années 60. L’objectif était de permettre une meilleure répartition de l’activité économique, pour rééquilibrer et mettre en valeur l’immense territoire dont la population et les activités se concentraient dans le Sudeste.

En plein développement depuis les années 60, le pays fait des efforts colossaux pour aménager villes et infrastructures de transports ainsi que pour valoriser les terres agricoles tout en construisant la capitale. Le tout s’est accompagné des débuts de l’industrialisation. Le grand front pionnier qu’est la forêt amazonienne est très récent dans la mise en valeur du territoire, puisqu’il a démarré dans les années 70-80.

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Définition

Front pionnier :

Un front pionnier est le mécanisme d’extension des superficies cultivées afin d’augmenter la production agricole.

Un territoire très inégal

Les populations et les richesses sont inégalement réparties sur le territoire.

Répartition population Brésil territoire Répartition de la population au Brésil

Cette carte montre bien le déséquilibre de la répartition de la population sur le territoire brésilien. Les zones de peuplement important sont principalement situées le long de la côte Est et en particulier au Sudeste.

  • Plus on s’enfonce dans les terres, moins la densité est importante.

IDH Brésil L’IDH au Brésil

Le contraste est tout aussi flagrant au niveau de l’indice de développement humain, l’IDH (ce dernier mesure le développement socio-économique d’un pays). La région la plus riche, le Sudeste, y côtoie la plus pauvre, le Nordeste.

Le Sudeste

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À retenir

Le centre historique et économique du Brésil se trouve au Sud-Est. Le triangle Sao Paulo (la capitale économique), Rio de Janeiro et Belo Horizonte forme le cœur économique du pays.

Le Sudeste est la région la plus peuplée et la plus développée. La densité y est très élevée, car plus de 50 % de la population brésilienne s’y concentre. C’est également là que l’on trouve le PIB par habitant et l’IDH les plus élevés. C’est la partie du Brésil la plus connue au niveau planétaire.

Cette région représente le Brésil riche, développé, ultra moderne et mondialisé. Le Sudeste concentre à lui seul les $\dfrac45$ du PIB industriel. On y trouve des sièges sociaux, la bourse brésilienne et les plus grandes banques. Industrie, agroalimentaire, agriculture à haute valeur ajoutée, tertiaire, recherche et enseignement supérieur s’y concentrent.

Le Sudeste représente aussi le Brésil urbain avec des villes de réputation mondiale comme par exemple Sao Paulo, qui dépasse les 20 millions d’habitants. Le poids culturel de ces villes, notamment Rio de Janeiro, est flagrant. Rio de Janeiro est connu pour son carnaval, ses plages et sa vitalité culturelle.

Il faut rappeler néanmoins que la pauvreté est très présente dans cette région. Les plus grands bidonvilles de la planète, appelés favelas, côtoient les quartiers les plus riches. Dans ces derniers, les habitants s’organisent en copropriétés de quartiers (aussi appelés quartiers fermés), entourés de murs, de caméras de surveillance, de vigiles et de milices privées pour endiguer une violence urbaine liée au écarts entre extrême richesse et extrême pauvreté.

Le Sud

Il s’agit de la plus petite des cinq régions du Brésil. Elle dispose du deuxième plus important PIB par habitant, derrière le Sudeste. Son économie est basée sur l’agriculture, l’élevage et le tourisme. La ville de Porto Alegre, connue dans le monde entier, est une des capitales des sommets altermondialistes.

Le Centre-Ouest

Le Centre Ouest, qui comprend la capitale politique Brasilia, est accolé au Sudeste. La présence de Brasilia a permis à la région de se développer depuis une cinquantaine d’années.

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À retenir

Le Centre-Ouest joue le rôle d’arrière-pays directement lié au cœur économique.

Tous les indicateurs économiques et sociaux sont en progression dans cette région qui, malgré tout, reste peu peuplée.

Le Nordeste

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À retenir

Le Nordeste est la région la plus pauvre du pays et le lieu de grandes inégalités sociales.

Son climat aride ne l’avantage pas et l’eau potable y est un problème très présent. Marquée par l’esclavagisme et les plantations de canne à sucre, cette région peine aujourd’hui à se reconvertir et à se diversifier. On y trouve une agriculture extensive peu productive, qui peine à trouver des débouchés. L’industrie y est d’ailleurs quasi absente.

  • C’est le Brésil le plus en difficulté, où les indicateurs sociaux rejoignent parfois ceux des pays les plus pauvres de la planète.

Le Nord

Le Nord, où l’on trouve le front pionnier amazonien, est le grand chantier du Brésil. Pour gagner en espace productif, la déforestation s’y pratique à grande échelle. Le chantier est colossal. Il passe par la mobilisation humaine, des incitations financières à l’installation de pionniers, des investissements agricoles et industriels, avec par exemple la mise en culture du soja sur les terres défrichées.

D’immenses barrages hydroélectriques y sont construits. C’est le bouleversement total d’une immense forêt. Manaus (capitale de l’État de l’Amazonas, situé dans le Nord-Ouest du pays), est devenu un véritable pôle industriel en pleine forêt amazonienne. L’agriculture extensive du soja s’accompagne de l’implantation d’élevages de bovins.

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À retenir

L’Amazonie est devenue un front pionnier agricole et le coût écologique est élevé.

L’appauvrissement des terres est très rapide et l’érosion très forte car dès que les terres ne sont plus protégées par l’épaisse forêt équatoriale, les pluies (très nombreuses à cause du climat), ravagent l’environnement. Avec une monoculture comme celle du soja, les sols s’épuisent très rapidement et les rendements baissent. On constate alors que de nombreux « pionniers » repartent au bout de quelques années de labeurs vers des régions moins hostiles.

Il faut aussi évoquer la problématique des tribus indiennes vivant dans la forêt amazonienne. Le Brésil compte environ 250 000 Indiens. Paradoxalement, la mise en valeur économique de leur territoire a décimé beaucoup de communautés. De nombreuses tribus ont été décimées soit à la suite de maladies, soit ont tout simplement été assassinées ou se sont éteintes à cause du manque de ressources naturelles, disparues dans les ravages de la déforestation.

Cependant, l’État a fini par réagir au massacre et un statut indien a été adopté en 1973 afin de leur accorder plus de protection. Des droits leur ont également été accordés dans la Constitution de 1988. Sur le terrain cependant, ce sont les intérêts économiques à court terme qui priment. La sauvegarde de ces tribus et de leur mode de vie est donc toujours en grand danger.

Conclusion :

Le Brésil, géant régional et pays émergent mondial, est une terre de contrastes. Son espace territorial très fragmenté comprend certaines des régions les plus riches du continent ainsi que des territoires parmi les plus pauvres. Encore en développement, le pays avance à grand pas et s’insère d’ores et déjà dans la mondialisation. En passe de rattraper les États plus riches, comme le Royaume-Uni ou la France, il lui reste néanmoins à faire un grand travail de mise en valeur de ses territoires afin d’y réduire les inégalités.