Evénement historique
Révolte des vignerons du Languedoc – 1907
Contexte
  • Les vignerons du Languedoc (Aude, Gard, Béziers, Pyrénées Orientales) manifestent en 1893 pour dénoncer la concurrence déloyale qui leur est faite sur la production de vin.
  • La région traverse au début du XXe siècle une crise de surproduction : les producteurs ne parviennent pas à écouler leurs stocks et décident pour cela de se réunir au sein de coopératives viticoles. La cave des Vignerons libres reste célèbre grâce à la visite de Jean Jaurès en 1905.
  • Les récoltes de 1904 et 1905 font grimper la production dans le Languedoc, ce qui entraine une chute des prix : certains exploitants sont ruinés, de même que de nombreux commerçants et négociants dont le sort dépend du secteur viticole.
  • Les languedociens demandent l’abrogation de la loi de 1903 sur la « chaptalisation » (elle autorise l’ajout de sucre pour les vins importés) ainsi que l’instauration d’une taxe sur le sucre pour décourager les importations.
  • Le président du conseil, Georges Clemenceau, n’y répond pas.
Déroulement

Les vignerons dénoncent le rôle néfaste des importations du vin d’Algérie par le port de Sète et l’aggravation de l’état du marché local. Marcellin Albert, un vigneron de l’Aude, avertit en mai 1907 le gouvernement que s’il ne réagit pas, il décrétera la grève de l’impôt et appellera les municipalités (majoritairement de gauche) à démissionner. De nombreuses manifestations ont lieu entre avril et juin (Ouveillan, Coursan, Capestang, Narbonne, etc.) mais la révolte atteint son paroxysme avec la manifestation de Montpellier le 9 juin. Cette manifestation regroupe environ 600 000 personnes (la plus grande de la IIIe République), liguées contre le gouvernement de Clemenceau. Jean Jaurès, porteur de la cause vigneronne, dépose un projet de nationalisation des domaines viticoles à l’Assemblée.

Voyant que le mouvement ne faiblit pas, Clémenceau décide de rétablir l’ordre à l’aide de l’armée et de procéder à des interpellations. La ville de Narbonne est en état de siège et deux personnes trouvent la mort (dont un adolescent). Le lendemain, cinq autres personnes trouvent la mort (dont une jeune fille de 20 ans) sous le feu des forces de l’ordre. 10 000 personnes assistent aux obsèques de la jeune fille abattue le 22 juin. Le soir du 20 juin, une mutinerie éclate dans le 17e régiment d’Agde et les soldats sont accueillis à Béziers sous les ovations de la foule.

Le 23 juin, Marcelin Albert, alors recherché par la police, se présente place Beauvau et demande à rencontrer le Président du Conseil. Clemenceau le reçoit, et convoque ensuite une conférence de presse où il discrédite la parole de Marcelin Albert.

Conséquences
  • Marcellin Albert tente de demander à ses compagnons la suspension du mouvement mais a perdu tout crédit à leurs yeux. Il finit par se rendre aux autorités.
  • Le 29 juin : le Parlement vote l’interdiction de la fabrication de vin falsifié ainsi qu’une surtaxe sur le sucre, ce qui donne gain de cause aux vignerons.
  • La révolte des vignerons illustre les dérives de la IIIe République dans sa tentative de maintenir l’ordre social par la force armée (y compris sur la population civile).