Fiche de lecture
Persepolis, Marjane Satrapi
Contexte

Persepolis est un ensemble de 4 tomes de bande-dessinée de Marjane Satrapi. C'est un récit autobiographique, en noir et blanc, publié entre 2000 et 2003. D'origine iranienne, Marjane y raconte les 25 premières années de sa vie, de son enfance à Téhéran, pendant la révolution islamique, jusqu'à sa vie de jeune femme adulte et son départ en Europe.
L'œuvre a connu un très grand succès et a même été portée au cinéma, avec l'aide de Vincent Paronnaud en 2007. Le film, qui reprend les dessins en noir et blanc de Marjane, obtient plusieurs prix : celui du jury au Festival de Cannes en 2007 et les Césars du meilleur premier film et de la meilleure adaptation en 2008. Il est également nommé aux Oscars 2008 pour le meilleur film d'animation.

Personnages

Marjane : Fille unique, surnommée Marji, espiègle, elle a beaucoup de caractère.
Ebi : Le père de Marjane est ingénieur. Engagé politiquement, il est ouvert et pédagogue.
Tadji : La mère de Marjane est femme au foyer. Elle est protectrice et moderne.
La grand-mère (pas de nom) : Mère de Tadji, elle était pauvre et a divorcé du prince Kadjar, communiste. Femme moderne qui fume, elle est très complice avec sa petite-fille.
L'oncle Hanouche : Frère d'Ebi. Très engagé politiquement, il est exécuté sous la révolution.
Siamak : Journaliste, c'est un ami de la famille, engagé politiquement lui aussi. Emprisonné, torturé, puis libéré, il doit fuir le pays.
Khosro et Niloufar : Communistes et connaissances de la famille. Khosro fuit le pays. Niloufar est exécutée.
Olivier, Thierry, Momo et Ève : Amis de Marjane au lycée français.
Marcus : Premier amour déçu de Marjane.
Réza : Premier époux de Marjane dont elle divorce avant de partir vivre en France.

Thèmes

L'histoire de l'Iran : Au fur et à mesure des 4 tomes, on découvre l'histoire de l'Iran : depuis le Shah d'Iran, renversé par la révolution islamiste de 1979, l'arrivée au pouvoir de l'ayatollah Khomeini (membre du clergé musulman, homme politique et leader de la révolution), la prise d'otages à l'ambassade américaine de novembre 1979 à janvier 1981, la guerre avec l'Irak jusqu'en 1988, la mort de Khomeiny…
On découvre ainsi, au fur et à mesure des différents tomes, les conditions de vie des Iraniens - et notamment des filles et des femmes - imposées par les régimes totalitaires successifs.
L'art du dessin en noir et blanc : La bande-dessinée (ainsi que le film) est entièrement dessinée en noir et blanc. C'est le choix assumé de Marjane Satrapi. L'image fait partie intégrante de l'histoire et de l'écriture de l'œuvre. Dessin et texte se complètent et se renforcent. Elle a voulu le noir et blanc pour que le texte ne l'emporte pas sur le dessin et inversement. De même, elle ne voulait pas de vignettes trop surchargées.
Ainsi, le dessin est minimaliste : pas d'ombres, pas de nuances. Le noir et le blanc sont en aplats. Les décors sont quasiment absents également ou réduits au minimum. Ce que l'auteur souhaite, c'est accentuer les expressions des visages et faire ressortir les émotions et les ressentis des personnages. Cela prime sur le cadre. On est bien dans l'autobiographie, le vécu.

Résumé

Tome 1 : 1978-1980

L'histoire commence en 1979. Marjane a 9 ans. Elle rêve de son avenir, s'imagine prophète. Élevée par des parents progressistes, cultivés et modernes, elle suit les événements de la révolution islamiste et la chute du Shah d'Iran et voit ses parents s'opposer au nouveau régime, aux purges, aux exils politiques.
En 1980, elle est contrainte de porter le voile à l'école. Elle commence à se révolter contre Dieu notamment. Le premier tome se clôt sur l'exécution de son oncle Hanouche.

Tome 2 : 1980-1984

Cette deuxième partie s'ouvre sur la prise d'otages à l'Ambassade des États-Unis. Puis sur la guerre Iran-Irak qui va durer de 1980 à 1988 (de 10 à 18 ans pour Marjane). La vie quotidienne de Marjane est de plus en plus difficile avec la montée de l'extrémisme provoque : les restrictions et la pénurie dans les commerces, les interdits (tous les produits occidentaux), la surveillance avec les commissaires de la Révolution, les bombardements de missiles, la fermeture des universités, l'endoctrinement, les disparitions des proches… Ce tome se clôt par la mort des voisins et la décision des parents de Marjane de l'envoyer étudier en Autriche.

Tome 3 : 1984-1988

Marjane est à Vienne. Elle a 14 ans. Hébergée un temps chez une amie de sa mère, elle est contrainte de partir, sans préavis. Elle va enchaîner les lieux de vie et les expériences : un pensionnat catholique où elle se lie d'amitié avec Lucia, puis chez son amie Julie, puis chez Frau Doktor Heller, médecin. Elle se fait passer pour une française, se lie d'amitié avec des anarchistes, commence à se droguer et vit ses premières expériences sexuelles.
Mais les désillusions et déceptions s'enchainent : elle se sent très seule et finit dépressive, à l'hôpital. Renouant alors avec Dieu et se rappelant les conseils de sa grand-mère, elle demande à ses parents la permission de rentrer à Téhéran auprès d'eux.

Tome 4 : 1988-1994

Marjane a 18 ans et est rentrée à Téhéran. La guerre est terminée. Néanmoins, le régime politique est toujours totalitaire et le pays est en ruines. Marjane a pourtant décidé d'être elle-même. Elle suit des études d'arts à l'université et rencontre Reza. Ils se marient car ils n'ont pas le droit de se côtoyer en dehors du mariage. Mais ils divorcent rapidement.
Mais Marjane a l'esprit très libre et son caractère indomptable fait qu'elle ne pourra pas rester en Iran. En 1994, elle quitte l'Iran et part vivre en France. Sa grand-mère meurt un an après.

Citation

Marjane, étudiante, pendant un cours d’art :
« Comment se fait-il que moi, en tant que femme je ne puisse rien éprouver en regardant les messieurs moulés de partout mais qu’eux en tant qu’hommes puissent s’exciter sur mes cinq centimètres de cagoule en moins ? »
Un conseil de la grand-mère :
« Dans ta vie tu rencontreras beaucoup de cons. S’ils te blessent, dis-toi que c’est la bêtise qui les pousse à te faire du mal. Ça t’évitera de répondre à leur méchanceté. Car il n’y a rien de pire au monde que l’amertume et la vengeance. Reste toujours digne et intègre à toi-même. »
Marjane, quelques années plus tard :
« J’ai réellement compris ce que voulait dire ma grand-mère : si je n’étais pas intègre à moi-même, je ne pourrais jamais m’intégrer. »
Marjane, adolescente, en Autriche :
« Je pense que je préférais me mettre sérieusement en danger plutôt que d’affronter ma honte. La honte de ne pas être devenue quelqu’un, la honte de ne pas avoir rendu mes parents fiers après tous les sacrifices qu’ils avaient faits pour moi. La honte d’être devenue une nihiliste médiocre. »
Marjane, jeune adulte :
« - Madame, pourquoi vous couriez ?
- Je suis très en retard ! Je courais pour avoir mon bus.
- Oui… Mais… Quand vous courez, votre derrière fait des mouvements… Comment dire… Impudiques !
- EH BIEN VOUS N’AVEZ QU’À PAS REGARDER MON CUL ! »