Mai 1968

Introduction :

Depuis le début du XXe siècle, la France a traversé de nombreuses crises politiques qui ont eu, à chaque fois, des répercussions sur l’opinion publique du pays.

Il s’agira d’abord de traiter du déroulement de la crise de mai 1968, avant de s’intéresser au rôle des médias et aux conséquences de la crise.

Définitions

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Définition

Opinion publique :

​L’opinion publique est l’ensemble des idées et des jugements partagés par la population sur tous les sujets de société.

L’opinion publique a pu se former grâce au progrès de :

  • la liberté de communication,
  • la liberté politique,
  • l’éducation via l’école républicaine.
  • la technologie, qui a favorisé la diffusion des journaux à un coût de plus en plus bas, entraînant une démocratisation de l’accès à l’information.
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Attention

Le terme « médias » est récent et l’on ne parle de médias de masse qu’à partir du XXe siècle avec l’apparition d’abord des journaux, puis des radios, des chaînes de télévisions, d’internet, et enfin des téléphones mobiles. Il faut être vigilant sur le contexte de la crise étudiée et ne pas parler de médias qui n’existaient pas à l’époque.

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Définition

Crise politique :

​Une crise politique est un moment particulier en démocratie où le pays a une « poussée de fièvre », liée à un événement qui choque l’opinion publique. Dans toute crise politique il y a un enjeu politique majeur.

Les médias, selon l’époque, jouent un rôle fondamental pour traiter l’événement, informer et faire basculer l’opinion publique dans un sens ou dans l’autre. L’objectivité absolue n’existant pas, chaque média façonne l’opinion publique à sa façon.

La crise de mai 1968

Le contexte

En 1968, les Français ont un nouveau rapport aux médias.

  • 62 % d’entre eux possèdent désormais un téléviseur, beaucoup écoutent des radios périphériques, c’est-à-dire des radios qui émettent depuis l’étranger et ne sont donc pas contrôlées par le pouvoir en place.

La France est en pleine croissance économique et dans l’ensemble le niveau de vie s’élève, même dans les classes les plus défavorisées.

Ce sont les Trente Glorieuses, et les premiers effets du baby boom se font ressentir sur les bancs des universités où affluent des étudiants.

Sur le plan politique, de Gaulle est au pouvoir depuis 1958. Il a 78 ans et mène une politique intérieure conservatrice sur le plan des mœurs et de la censure des médias.

  • En 1964, il crée l’ORTF, l’Office de la radiodiffusion-télévision française. C’est un organisme d’État qui comprend deux chaînes de télévision et trois stations de radios gouvernementales.
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À retenir

Les médias de l’époque sont sous la tutelle de l’État et il n’y a pas de liberté sur les antennes de l’ORTF.

La crise

Tout démarre dans les universités, où les jeunes générations s’insurgent du manque de dialogue avec les professeurs, des programmes qu’ils jugent désuets et de l’impossibilité de la mixité dans les cités universitaires.

  • Les événements se précipitent avec l’occupation des universités parisiennes, notamment à Nanterre.

Le gouvernement de Georges Pompidou, alors Premier ministre, fait intervenir la police et les CRS. Les affrontements dégénèrent rapidement. La violence s’empare de la capitale et des plus grandes villes de France.

  • Ces affrontements vont pousser le monde ouvrier à rentrer dans la lutte aux côtés des étudiants.

On ne comptera qu’un seul décès mais de très nombreux blessés.

  • C’est une crise sociale.

Le mouvement étudiant essaie de rallier les syndicats et le mouvement ouvrier dans la contestation. Le PCF (parti communiste français) et la CGT (Confédération générale du travail, syndicat proche du PCF) se méfient de l’extrême gauche anarchiste et libertaire, et personne ne contrôle vraiment le mouvement.

Le monde ouvrier descend pourtant dans la rue et avec 10 millions de grévistes, la France est paralysée. Les usines comme les universités sont occupées. Des « piquets de grève » empêchent toute personne de rentrer. Parfois, des conflits éclatent entre grévistes et non-grévistes.

  • Cette crise sociale débouche sur une crise politique.

De Gaulle ne dit rien, ne fait aucune apparition ni discours tout au long de la crise qui dure un bon mois et demi. C’est Pompidou qui gère la situation.

  • On pense alors que le général est dépassé, qu’il va démissionner.

Le 30 mai 1968, de Gaulle intervient finalement à la télévision et à la radio. Il ne démissionne pas, mais il dissout l’Assemblée nationale. Il brandit le spectre du communisme pour faire peur à la population. Il est pourtant conscient que même le PCF est dépassé par cette crise.

Dans sa une, France-Soir, indique que de Gaulle reprend en main le mouvement, dissout l’Assemblée et garde son premier ministre Pompidou.

En soutien à l’intervention du général, une grande manifestation gaulliste à lieu à Paris. Les élections législatives de juin 1968 sont un raz de marée gaulliste. La droite obtient la majorité absolue à l’Assemblée nationale : la crise politique est passée.

Le rôle des médias

La presse écrite est encore très puissante et joue un rôle fondamental même si les Français utilisent de plus en plus des médias comme la radio ou la télévision, afin d’être au plus près des évènements.

92 % des Français possèdent un poste transistor en 1968.

  • RTL, Europe 1 et Radio Monte Carlo sont des radios périphériques très écoutées cette année-là.

Au début, l’ORTF diffuse des reportages sur les manifestations de manière assez neutre. Mais la censure s’abat très vite sur le travail des journalistes.

  • Le 13 mai, l’ORTF se met en grève pour un jour, mais à partir du 18 mai, c’est une grève illimitée qui touche tout l’organisme, afin de réclamer moins de censure gouvernementale.
  • Le travail ne reprend que le 13 juillet 1968. 50 journalistes sont licenciés, certains sont mutés et d’autres encore voient leur contrat non renouvelé.
  • C’est une crise majeure dans l’audiovisuel français.

Les radios périphériques diffusent en direct les manifestations et les discours ou interviews des principaux protagonistes, ce qui déplaît fortement au pouvoir gaulliste. Elles ont joué un rôle fondamental dans la diffusion d’informations jusque-là censurées par le pouvoir gaulliste.

Les radios, la télévision, les affiches, mais aussi les tracts et les murs ont permis la diffusion des messages de mai 1968.

  • Les slogans muraux et les masses de tracts diffusés ont été la seule voie possible pour des millions de personnes de s’exprimer sur les changements de société voulus.

La demande de pluralisme et d’indépendance des médias en 1968 se voit très bien à travers ces affiches. L’ORTF cristallise le combat contre un pouvoir central vu comme dépassé et abusant de la censure.

Ces images représentent des slogans célèbres de Mai 68.

Alt texte « Il est interdit d’interdire » - ©Espencat - CC-BY-SA-3.0-migrated

Alt texte « Prenez vos désirs pour des réalités » - Auteur inconnu - Domaine public

Même si la révolte prend fin et que de Gaulle en sort politiquement renforcé, Mai 68 a entrainé de multiples évolutions sociales et sociétales.

Les conséquences de la crise

Sur le plan social, les accords de Grenelle permettent une augmentation du SMIG de 35 %. Les autres salaires connaissent une augmentation de 10 %.

  • ​De nombreux accords sur une plus grande démocratie dans les entreprises sont signés.

Sur le plan politique, nous l’avons vu, de Gaulle ressort apparemment vainqueur mais démissionne un an après suite à l’échec d’un référendum qu’il avait impulsé. Le gaullisme reste tout de même au pouvoir puisque Georges Pompidou devient président de la République.

  • ​La gauche ne profite pas de mai 1968 sur le plan électoral. Elle n’est pas présente au second tour des élections présidentielles de 1969. Elle n’arrive au pouvoir qu’en mai 1981 après une union large de la gauche.

Sur le plan sociétal, c’est différent. Le mouvement féministe ressort renforcé de cette crise. Le mouvement écologiste se renforce aussi et trouve une place dans la vie politique.

Sur le plan des mœurs, la liberté sexuelle devient plus importante et les femmes voient leur image se transformer dans la société, car elles ont souvent été en première ligne lors des manifestations.

  • L’éducation scolaire, mais aussi parentale, sont totalement transformées. Les rapports entre parents enfants et enfants enseignants changent.
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À retenir

Mai 1968 est bien une crise sociétale : rien ne sera plus comme avant.

Conclusion :

Mai 1968, ce sont trois crises qui se succèdent : étudiante, sociale et politique. Les médias sont un enjeu de la crise par la position de l’ORTF, mais aussi par la participation des radios périphériques qui diffusent des contenus autrement inaccessibles. Au-delà des médias traditionnels, d’autres formes d’expression ont vu le jour pour exprimer le mécontentement. Les médias sont bien le 4e pouvoir dans les démocraties.