L’adaptabilité de l’organisme face aux perturbations de l’environnement
Introduction :
Le stress varie d’une personne à une autre. Nous parlons de stress à la fois pour définir un ressenti (« Je suis stressé avant mon examen ») mais aussi face à une situation de panique subite (« J’ouvre la porte de la salle de bain et je me retrouve face à un serpent »).
Quel que soit le contexte, face à des agents stresseurs, nous parlons de stress aigu. Dans ces cas-là, l’organisme, pour préserver sa survie, doit réagir rapidement. Si nous reprenons l’exemple du serpent dans la salle de bain, nous pouvons facilement imaginer différentes réponses biologiques chez un individu : augmentation de son rythme cardiaque, augmentation de son rythme respiratoire, contraction des muscles pour fuir, focalisation de son attention.
Différents systèmes physiologiques de l’organisme sont donc impliqués pour adapter le comportement face à cet agent stresseur. La réponse doit être rapide, et c’est le système nerveux qui est à l’origine de ces réponses.
Dans un premier temps, nous verrons quelle est l’implication du système limbique dans le stress aigu. Puis, nous nous focaliserons sur l’axe hypothalamo-hypophysaire. Enfin, nous étudierons la régulation de ce système.
L’implication du système limbique en cas de stress aigu
L’implication du système limbique en cas de stress aigu
Stress aigu :
Le stress aigu regroupe l’ensemble des réponses de l’organisme permettant d’avoir un comportement approprié face à une perturbation de l’environnement. Il implique le système nerveux pour une réponse rapide.
L’anatomie du système limbique
L’anatomie du système limbique
À travers différentes expériences avec des agents stresseurs, les scientifiques ont pu mettre en évidence la stimulation de deux régions précises du cerveau : l’amygdale et l’hippocampe.
- Situées au centre du cerveau, ces deux structures sont les premières à s’activer en cas de stress aigu.
Elles font partie du système limbique.
Système limbique :
Le système limbique regroupe l’ensemble des zones cérébrales situées au centre du cerveau. Également appelé « cerveau des émotions », il régule les émotions, le comportement ou encore la mémoire.
- Face à un agent stresseur, nous observons tout d’abord la stimulation de l’amygdale et de l’hippocampe.
- Ces deux zones sont impliquées dans la régulation des émotions au sein du système limbique.
L’activation de la glande médullosurrénale
L’activation de la glande médullosurrénale
L’amygdale et l’hippocampe sont des structures cérébrales. Une fois activées, elles vont pouvoir stimuler d’autres organes grâce à une communication nerveuse. Dans le cas d’un stress aigu, des neurones vont permettre l’activation d’un autre organe : la glande surrénale.
Le cerveau est relié aux organes du corps grâce à des cellules spécialisées, les neurones. Les neurones conduisent l’information nerveuse.
Comme son nom l’indique, la glande surrénale (sur-rénale) est située au-dessus du rein. Il existe donc deux glandes surrénales dans l’organisme, une au-dessus de chaque rein.
En observant au microscope la glande surrénale, nous isolons deux parties :
- la partie centrale de l’organe, dite « médullaire » ;
- Nous parlons alors de médullosurrénale.
- la partie périphérique de l’organe, dite « corticale ».
- Nous parlons alors de corticosurrénale.
La surrénale est une glande endocrine : elle permet la libération d’hormones. Lorsqu’elle est activée, la médullosurrénale va libérer une hormone dans le sang : l’adrénaline (parfois également appelée « hormone du stress »).
Une hormone (comme l’adrénaline) est un mode de communication dans l’organisme. Elle est libérée par un organe, passe dans le sang et agit sur le fonctionnement d’un ou plusieurs autres organes cibles.
- L’activation de neurones au niveau de l’amygdale et de l’hippocampe provoque la stimulation de la partie centrale de la glande surrénale, appelée la médullosurrénale.
- En réaction, la médullosurrénale libère une hormone dans le sang : l’adrénaline.
Les effets de l’adrénaline
Les effets de l’adrénaline
Une fois libérée dans le sang, l’adrénaline va agir sur différents organes, ce afin que l’organisme puisse réagir rapidement face à l’agent stresseur.
- Elle va donc avoir plusieurs organes cibles.
Organes cibles :
Les organes cibles désignent spécifiquement ceux sur lesquels va agir une hormone.
Tout d’abord, l’adrénaline va agir sur le cœur en augmentant la fréquence cardiaque ainsi que sur les muscles respiratoires en augmentant la fréquence respiratoire.
De plus, si nous observons le graphique ci-dessous, nous constatons que l’adrénaline provoque également l’augmentation du taux de glucose dans le sang (glycémie) grâce à son action sur le foie et les muscles.
En situation de stress aigu, la libération d’adrénaline va avoir trois conséquences majeures dans l’organisme :
- l’augmentation de la fréquence cardiaque $\rightarrow$ accélération de la circulation sanguine ;
- l’augmentation de la fréquence respiratoire $\rightarrow$ apport de plus d’$\text{O}_2$ aux muscles et au cerveau ;
- l’augmentation de la glycémie $\rightarrow$ apport d’énergie.
- Les intérêts de ces paramètres sont d’optimiser la réaction de l’organisme face à l’agent stresseur ou se préparant à la fuite ou à l’affrontement.
En cas de stress aigu, le système limbique est la première zone active au niveau cérébral. Cependant, dans les minutes qui suivent, nous observons une autre conséquence : l’activation du système hypothalamo-hypophysaire.
L’implication de l’axe hypothalamo-hypophysaire
L’implication de l’axe hypothalamo-hypophysaire
L’anatomie du système hypothalamo-hypophysaire
L’anatomie du système hypothalamo-hypophysaire
Situé au centre du cerveau, l’hypothalamus participe à la régulation de nombreuses fonctions dans l’organisme telles que la faim, le sommeil, le comportement sexuel ou encore les émotions.
Face à un agent stresseur, l’hypothalamus a une fonction endocrine : il produit une hormone appelée CRH. Cette dernière a pour organe cible une autre structure cérébrale, située juste en-dessous de l’hypothalamus : l’hypophyse.
- L’agent stresseur va permettre l’activation d’une structure cérébrale : l’hypothalamus.
- Par le biais d’une hormone (la CRH), l’hypothalamus active à son tour l’hypophyse.
L’activation de la corticosurrénale
L’activation de la corticosurrénale
L’hypophyse est, lui aussi, une glande pourvue d’une fonction endocrine : son activation va permettre la libération d’une hormone dans le sang, l’ACTH.
Les glandes surrénales sont les organes cibles de l’ACTH. Cependant, contrairement à ce que nous avons vu précédemment, l’ACTH va cette fois-ci agir sur la partie périphérique des glandes surrénales (et non sur la partie centrale), c’est-à-dire sur les corticosurrénales.
En 1932, Harvey Cushing, un neurochirurgien américain, décrivit ce qui fut appelé plus tard « le syndrome de Cushing ». Chez les patient·e·s atteint·e·s de ce syndrome, une augmentation très importante du taux de cortisol dans le sang est observée. Les effets de cet excès d’hormone sont une prise de poids et une modification de l’apparence physique générale.
En opérant ces patient·e·s, Cushing a pu observer un adénome (une tumeur bénigne) au niveau de l’hypophyse. Ayant un plus gros volume, l’hypophyse libérait alors de l’ACTH en excès.
- Cushing a alors pu en déduire que l’ACTH est responsable de la libération de cortisol par les corticosurrénales.
Cortisol :
Le cortisol est une hormone libérée dans le sang par la partie externe des glandes surrénales (les corticosurrénales).
- L’hypophyse, stimulé par la CRH, libère à son tour une hormone dans le sang : l’ACTH.
- L’ACTH agit sur les corticosurrénales qui, en réaction, libèrent une autre hormone dans le sang : le cortisol.
Les effets du cortisol
Les effets du cortisol
L’impact du cortisol sur le système immunitaire a pu être mis en évidence notamment grâce aux travaux historiques du docteur Selye.
Dans les années 1930, Hans Selye, un médecin québécois, injecte des extraits de glandes ovariennes à des rats. Suite à cette injection, il observe un élargissement des glandes surrénales et une diminution de la taille du thymus chez les rats de l’expérience. Il pense alors que ces effets physiologiques sont les conséquences directes de l’injection réalisée.
Cependant, en injectant des substances différentes, il fait état des mêmes résultats. Et il en va de même lorsqu’il fait subir à d’autres rats des alternances de froid et de chaleur intense.
- Il déduit plus tard de ces expériences que c’est en réalité le stress provoqué par ces bouleversements physique qui provoque ces symptômes.
Par ailleurs, si nous observons le tableau suivant, nous pouvons constater que le cortisol provoque une augmentation de la glycémie.
Pendant quatre heures, nous mesurons la glycémie de deux individus :
- l’un ayant subi une injection de cortisol ;
- et l’autre servant de sujet témoin (les valeurs sont données en $\text{g}/\text{L}$).
La glycémie fluctue peu dans la journée : une glycémie normale se mesure entre $0,7$ et $1,4\,\text{g}/\text{L}$ de sang. C’est le pancréas qui en gère la régulation.
glycémie initiale | glycémie après 1 heure | glycémie après 2 heures | glycémie après 3 heures | glycémie après 4 heures | |
sujet ayant subi l’injection | $1,46$ | $1,44$ | $1,41$ | $1,37$ | $1,35$ |
sujet témoin à jeun | $0,92$ | $0,86$ | $0,90$ | $0,88$ | $0,85$ |
La glycémie initiale du premier individu (celui ayant reçu l’injection) est plus élevée que celle du second et cherche à se stabiliser en descendant progressivement au cours des heures qui suivent l’expérience.
- Il semble donc que l’injection de l’hormone de cortisol ait favorisé une élévation du taux glycémique.
En outre, afin d’optimiser le comportement pour faire face à l’agent stresseur, le cortisol va inhiber d’autres systèmes physiologiques de l’organisme, tels que le système digestif et le système reproducteur.
Le cortisol, en préparant le corps de la sorte, cherche à lui procurer l’énergie nécessaire (à la fuite ou à l’affrontement par exemple) contre l’agent stresseur.
Les réactions physiologiques que nous venons de décrire sont essentielles pour que l’organisme réagisse rapidement et de manière adaptée à l’agent stresseur
Cependant, ce réponses physiologiques au stress ne doivent pas durer dans le temps car elles sont néfastes pour l’organisme.
Un système de régulation est donc indispensable.
La mise en place d’un système de régulation
La mise en place d’un système de régulation
Le rétrocontrôle négatif via une boucle de régulation
Le rétrocontrôle négatif via une boucle de régulation
Au niveau de l’hypothalamus, il existe des récepteurs de cortisol. Ainsi, en cas de stress aigu, le cortisol peut se fixer à ces récepteurs, entraînant directement la diminution de la sécrétion de CRH. Cela entraîne, par voie de conséquence, la diminution de la production d’ACTH par l’hypophyse, puis celle de cortisol par les glandes corticosurrénales.
C’est la molécule de cortisol elle-même qui permet sa propre régulation.
Le cortisol autorégule sa propre sécrétion en agissant sur l’axe hypothalamo-hypophysaire : nous parlons de rétrocontrôle négatif.
Rétrocontrôle :
Le rétrocontrôle est un phénomène d’autorégulation au cours duquel une hormone agit directement sur la glande qui la produit afin de maintenir un équilibre dans l’organisme.
Le retour à l’équilibre
Le retour à l’équilibre
La situation de stress aigu est un exemple illustrant l’adaptabilité de l’organisme.
Face à un agent stresseur, l’organisme active certains systèmes physiologiques (systèmes cardio-vasculaire et respiratoire par exemple) et en inhibe d’autres (systèmes immunitaire et digestif).
Cependant, l’organisme doit également être capable de permettre un retour à l’équilibre pour l’ensemble de ces systèmes. C’est l’objectif du rétrocontrôle négatif exercé par le cortisol.
- Nous parlons alors de résilience.
Résilience :
On appelle « résilience » la capacité de l’organisme à retrouver un équilibre normal après une perturbation.
- Par le biais de récepteurs spécifiques, le cortisol va exercer un rétrocontrôle négatif sur l’hypothalamus.
- Cela aura pour conséquence directe de diminuer la quantité de CRH et ainsi de diminuer la sécrétion de cortisol par la glande corticosurrénale.
- En exerçant un rétrocontrôle négatif, le cortisol permet la résilience, c’est-à-dire le retour à l’équilibre du système complexe qu’est l’organisme humain. Cela prouve son adaptabilité.
Conclusion :
La confrontation à un agent stresseur illustre la complexité de l’organisme humain.
Avec l’activation du système limbique, puis de l’axe hypothalamo-hypophysaire, le système nerveux est à l’origine des réponses observées. Via les productions hormonales qu’il provoque, d’autres systèmes physiologiques sont activés ou, au contraire, inhibés.
En produisant à la fois de l’adrénaline et du cortisol, la glande surrénale joue un rôle majeur dans le stress aigu. L’adaptabilité de l’organisme se mesure à la fois dans sa capacité à réagir immédiatement et dans la résilience permise par le rétrocontrôle négatif ensuite.