L’histoire et les mémoires du génocide des Juifs et des Tsiganes

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La construction et l’exclusion d’un ennemi de race

La modernisation du racisme en Europe

  • Certaines théories pseudoscientifiques du XIXe siècle affirment (à tort) que les différences entre humains sont analogues aux différences entre les races d’animaux, et qu’il existe donc des différences biologiques entre les « races humaines » (Aryens, Latins, Slaves, Sémites…).
  • Ces théories justifieraient que les « races supérieures » dominent les « races inférieures », par exemple en les colonisant.
  • Le racisme est ainsi modernisé et justifié par les théories biologiques (hiérarchie des races) et sociales (darwinisme social). Il est largement répandu dans les opinions et conduit à désigner les minorités comme responsables des problèmes structurels de la société.
  • Le généticien suisse Ernst Rüdin (1874-1952) par exemple, fut l’un des instigateurs de la loi du 14 juillet 1933 sur la stérilisation contrainte en Allemagne nazie qui rendait la stérilisation obligatoire pour les individus atteints de maladies considérées comme héréditaires par les Nazis comme les troubles neuro-psychiatriques.

Structuration du préjugé et de la haine dans l’Allemagne de l’entre-deux-guerres

  • Dès la défaite de l’Allemagne en 1918, l’armée allemande affirme (à tort) qu’elle n’a pas été vaincue mais « poignardée dans le dos » par des politiciens Juifs et socialistes.
  • C’est à cette époque qu’Hitler rédige son livre-programme Mein Kampf, où il reprend les théories racistes pour affirmer que les Allemands sont la race supérieure et doivent dominer le monde.
  • En janvier 1933, Hitler devient chancelier en s’alliant avec les partis conservateurs et met rapidement en place une dictature du parti nazi.
  • Dès ses débuts, l’État nazi désigne des catégories entières de la population comme nuisibles (communistes, Juifs, Tsiganes, homosexuels…) ou inutiles (handicapés, chômeurs…).
  • Les programmes scolaires sont révisés pour inculquer la haine et le mépris de ces catégories aux enfants.
  • La propagande d’État martèle que les Juifs contrôlent la finance internationale et sont responsables des maux de l’Allemagne et incite la population à la violence.
  • Le 9 novembre 1938, le pouvoir nazi organise la nuit de Cristal.
  • L’objectif avoué des nazis est ainsi de pousser les Juifs à quitter le pays dès que possible afin de « régler le problème juif ».

L’exclusion et la discrimination par l’État

  • Les théories racistes des nazis sont rapidement appliquées par des lois qui discriminent les opposants politiques et les « ennemis de race » ou « ennemis de l’État ».
  • À ce titre, ils sont surveillés et parfois rassemblés dans des camps de concentration ouverts dès 1933. La plupart des Tsiganes d’Allemagne y sont envoyés au milieu des années 1930.
  • Le modèle nazi du racisme d’État commence à s’exporter dans d’autres pays, comme l’Italie fasciste à partir de 1936, ou la France de Vichy à partir de 1940. La théorie nazie des races va également justifier la préparation de l’Allemagne pour une guerre de revanche sur la Première Guerre mondiale et la conquête des territoires slaves.

Un génocide perpétré à la faveur de la guerre

Un projet étendu par les conquêtes de l’Axe

  • En 1939, la Seconde Guerre mondiale éclate en Europe avec l’invasion par l’Allemagne de la Pologne puis de la Norvège, du Danemark, des Pays-Bas, de la Belgique et de la France en 1940.
  • Les pays alliés ou occupés par l’Axe adoptent alors les mêmes lois racistes que l’Allemagne et commencent à rassembler les Juifs étrangers et les Tsiganes notamment.
  • Pour faciliter la progression de l’armée nazie en URSS et préparer la future colonisation de l’Est par les Allemands, des détachements spéciaux (Einsatzgruppen) suivent l’avancée de la Wehrmacht et liquident toutes les populations « indésirables » dans les territoires conquis.
  • Les Einsatzgruppen assassinent ainsi plus d’un million et demi de personnes entre 1941 et 1944, essentiellement avec des armes à feu : c’est la « Shoah par balles ».

La mise en œuvre de la Solution Finale

  • En décembre 1941, les autorités allemandes de Pologne ouvrent à Chelmno le premier camp d’extermination (VL, « Vernichtungslager ») muni d’une chambre à gaz.
  • Le 20 janvier 1942, l’extermination devient une affaire administrative, la Conférence de Wannsee charge la SS d’organiser la déportation et l’extermination des Juifs d’Europe pour « résoudre définitivement le problème juif ».
  • Six camps d’extermination sont ouverts, dont le plus grand est celui d’Auschwitz-Birkenau.
  • Dans tous les territoires sous le contrôle du Reich, les Juifs sont arrêtés et déportés vers l’Est.
  • À la fin de la guerre Heinrich Himmler ordonne la liquidation des Tsiganes enfermés dans les camps de concentration depuis 1933.
  • En France, le gouvernement de Vichy applique avec zèle les consignes allemandes en ciblant en priorité les Juifs étrangers et déchus de la nationalité française.
  • Les déportés qui survivent au voyage sont sélectionnés à l’arrivée : les hommes valides sont mis au travail forcé ; les femmes, les enfants et les hommes inaptes au travail sont envoyés directement aux chambres à gaz puis leurs cadavres sont brûlés dans les fours crématoires.
  • Près de trois millions de personnes périssent dans les camps d’extermination.

Les individus face au génocide

  • Le pouvoir nazi maintient autant que possible le secret sur le génocide en cours. Une grande partie de l’appareil d’État et de l’armée est tout de même impliquée de près ou de loin et peut donc se faire une idée du sort final des Juifs.
  • En 1942, le résistant polonais Jan Karski amène aux Alliés les preuves de l’extermination des Juifs d’Europe par les nazis, mais pour la plupart des décideurs qu’il rencontre l’idée d’un génocide industriel est inconcevable.
  • Concernant les résistants dans les territoires occupés, la plupart des mouvements se soucient avant tout de survivre face à l’occupant, leurs actions ont permis à de nombreuses personnes d’échapper à la mort en étant aidées par des groupes ou des individus de façon variée.
  • Sans illusions sur le sort qui les attend, de nombreux Juifs rejoignent les mouvements de résistance.
  • Dans les ghettos où les nazis rassemblent les Juifs d’Europe de l’Est, des révoltes se produisent, dont la plus grande est celle du ghetto de Varsovie.

Juger, enseigner, commémorer

Le jugement des crimes

  • Dans le but d’établir un ordre international fondé sur le droit et la justice, les Alliés mettent en place des tribunaux pour juger les responsables allemands.
  • Ils sont accusés de crimes contre la paix (violation des traités), de crimes de guerre (violation des conventions sur les civils et prisonniers de guerre) et de crimes contre l’humanité qui sont imprescriptibles.
  • Du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946 se tient le procès de Nuremberg, où 24 des plus hauts dignitaires nazis sont jugés par un Tribunal militaire international. D’autres procès suivent contre les responsables de rang inférieur dans le cadre de la dénazification de l’Allemagne.
  • Dans les décennies qui suivent la fin de la Seconde Guerre mondiale, d’autres participants aux génocides nazis sont retrouvés et jugés (comme Adolf Eichmann).
  • D’une part c’est un moment fort de l’affirmation d’une dignité retrouvée des juifs. D’autre part, c’est un moment incontournable de la mémoire nationale israélienne (pour beaucoup d’Israéliens, c’est la première fois qu’ils ont regardé la télévision de leur vie). On peut aussi noter que c’est la levée d’un tabou, puisque le souvenir de la Shoah était occulté en Israël : les survivants n’en parlaient jamais, et l’ethos sioniste préférait glorifier la résistance juive (notamment au ghetto de Varsovie) plutôt que les victimes.

Commémoration et négation des génocides

  • Dans l’après-guerre, les survivants des camps n’osent pas parler de ce qu’ils ont vécu, et ceux qui le font sont difficilement crus tant leurs récits sont inconcevables.
  • La parole ne commence à se libérer qu’à partir de la fin des années 1960, alors même que certains anciens nazis occupent toujours des postes de pouvoir en Allemagne ou ailleurs. Il faut encore des années - les discours commencent à évoluer dans les années 70 - avant que les opinions publiques ne prennent conscience de l’énormité du génocide industriel et du nombre de bourreaux encore en liberté.
  • Le négationnisme des génocides nazis est d’abord créé par d’anciens soldats de la Wehrmacht. Les thèses d’extrême-droite sont ensuite reprises par les opposants à l’État d’Israël, pour qui les Juifs auraient inventé un mensonge servant de prétexte pour voler la terre des Palestiniens.
  • Elles se diffusent ainsi dans les pays arabes en guerre avec Israël et parmi les mouvements antisionistes de gauche.
  • Ce faisant, elles reprennent le vieux mythe antisémite des Juifs dominateurs du monde tout en participant indirectement aux génocides nazis : le projet d’anéantissement des Juifs et des Tsiganes ne visait pas seulement à les assassiner, il s’agissait d’effacer toute trace de leurs existences.
  • L’importance de préserver la mémoire des disparus et la parole des survivants apparaît ainsi à partir des années 1970.
  • Claude Lanzmann sort le long documentaire Shoah en 1985 qui donne la parole à des survivants des camps et des résistants mais aussi à des conducteurs de train et à d’anciens gardes nazis.
  • Dans les années 1980, l’opinion publique française prend également conscience de l’implication profonde de l’État français dans les génocides, d’abord rejetée sur le seul gouvernement de Vichy, la responsabilité de l’État est reconnue dans la collaboration avec les nazis.

Pourquoi il faut enseigner l’histoire des génocides Juifs et Tsiganes

  • Comme le montrent les exemples de la Yougoslavie et du Rwanda ou plus récemment de l’Irak, les génocides peuvent toujours se produire de nos jours. Leur enseignement et leur commémoration a donc un double objectif.
  • Le premier enjeu est de prendre conscience de l’importance des valeurs de liberté, d’égalité et de justice. Ces idéaux ont été inscrits dans la Constitution et sont protégés par le droit, et doivent être défendus au quotidien.
  • Le deuxième enjeu est de comprendre que le génocide s’enracine à la fois dans une situation de guerre et dans l’héritage des préjugés et de la détestation de ceux qui sont différents. Plusieurs conventions internationales visent à prévenir les génocides en amont, en interdisant les discrimination et l’incitation à la haine contre un groupe de personnes.