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Le vocabulaire de la poésie
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Introduction :
Dans cette leçon, nous allons reprendre le vocabulaire essentiel à l’analyse d’un poème, puis nous parlerons de la rythmique poétique. Enfin, nous essaierons de voir quelles sont les astuces à connaître pour bien interpréter les choix d’écriture d’un poète.
Remarque : lorsque c’est nécessaire, l’alphabet phonétique français a été utilisé entre crochets pour rendre compte des sonorités.
Vocabulaire et analyse
Les différents mètres de vers
Écrire en vers demande de respecter certaines règles précises, du moins dans l’idéal classique. Ainsi, la longueur des vers est normée. C’est ce que l’on appelle le mètre du vers.
Il existe donc plusieurs mètres possibles (donnés ici d’une syllabe à 12 syllabes) :
Les mètres des vers principaux sont :
Ils sont à connaître par cœur, et il faut savoir les identifier.
Compter les vers
Il faudra parfois compter les vers également. Ils sont souvent regroupés en paragraphes, qu’on appelle des strophes. Il y a plusieurs sortes de strophes, en fonction du nombre de vers qu’elles contiennent :
Sonnet :
Un sonnet est un poème, considéré comme l’une des plus belles formes possibles, constitué de deux quatrains suivis de deux tercets. Il est rédigé en alexandrins.
Bien compter les syllabes des vers
Compter les syllabes peut être difficile en raison de certaines règles de la poésie. La tâche se complexifie encore en cas de liaison, ou lorsque les auteurs emploient certains effets.
On entend parfois dire qu’un alexandrin a « douze pieds », c’est faux. Il n’y a pas de pied dans la métrique française, uniquement des syllabes. Le fameux « pied » vient des métriques latine et grecque et est encore utilisé aujourd’hui dans la poésie de certaines langues (germaniques notamment).
Mais quelques spécificités de la langue française compliquent les choses, le « e » muet notamment.
E muet :
Lorsque le « e » est la dernière lettre d’un mot faisant plus d’une syllabe, il ne se prononce pas. La dernière sonorité que l’on entend est donc celle de la lettre qui le précède : prendre [pRãdR], tomate [tomat], Marie [maRi].
Ce « e » que l’on n’entend pas s’appelle « e » muet ou « e » caduc, et sa notation phonétique est [ə].
Lorsque le [ə] est dans le vers, deux cas de figure se présentent :
« Vaste comme la nuit et comme la clarté, »
Vas / te / com / me / la / nuit / et / com / me / la / clar / té, (12 syllabes)
« La Nature est un temple où de vivants piliers »
La / Na / tu / re est / un / tem / ple où / de / vi / vants / pi / liers (12 syllabes).
Cette seconde règle sur le « e » muet ne s’applique pas si le mot est mis au pluriel. Si à l’oral, on n’entend pas toujours la différence, à l’écrit, le « -s » empêche de fondre le « e » dans les voyelles du mot suivant.
Parfois le « e » muet est inclut dans un mot : vous louerez, je parierais. Dans ce cas, il ne se prononce pas, et ne compte dans la métrique du vers.
Lorsque le dernier mot d’un vers se termine par un « e » muet, on ne compte pas de syllabe supplémentaire, même si le mot est au pluriel. Cette règle fait que les alexandrins de l’exemple suivant ont tous la bonne métrique :
« La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles ; L’homme y passe à travers des forêts de symboles Qui l’observent avec des regards familiers. »
Rimes féminines, rimes masculines
Les rimes en [ə] sont considérées comme étant des rimes féminines. Toutes les autres rimes sont dites masculines. Un poème classique alterne rimes féminines et rimes masculines.
La poésie est destinée à être déclamée à haute voix. Lorsqu’on récite de la poésie, il faut donc penser à faire les liaisons. Cela veut dire prononcer la dernière consonne d’un mot qui, dans un autre contexte, pourrait rester muette.
« À l’enterrement d’une feuille morte
Deux escargots s’en vont
Ils ont la coquille noire […]
Hélas quand ils arrivent
C’est déjà le printemps »
On note dans cet exemple que les sonorités de la liaison ne sont pas nécessairement celles de la consonne écrite.
Alors que la liaison consiste à prononcer toutes les lettres, à l’inverse, l’élision consiste à ne pas en prononcer certaines. C’est tout simplement ce que l’on fait avec le « e » muet lorsqu’il précède des voyelles.
On dit que les voyelles sont en hiatus lorsqu’un mot se termine par une voyelle et que le mot suivant commence également par une voyelle. En poésie classique, le seul hiatus autorisé est celui avec le « e » muet. Les autres sont évités à cause de la difficulté de prononciation. La conjonction de coordination « et » suivie d’une voyelle fait aussi un hiatus.
Hiatus :
On parle d’hiatus lorsqu’une succession de sons est difficile à prononcer.
En poésie, il est important de savoir différencier le « h » muet et le « h » aspiré, car l’un permet la liaison et l’autre non. Selon qu’il s’agisse d’un « h » aspiré ou pas, le nombre de syllabes change, et la prononciation des vers aussi.
« L’argent en honnête homme érige un scélérat. »
Pour trouver si un « h » au début d’un mot est aspiré ou non, il faut mettre l’article défini « le » devant. Si l'on peut transformer « le » en « l’ » devant ce mot, c’est que le « h » est muet.
En comptant attentivement les syllabes de l’exemple suivant, tiré des Fables, on s’aperçoit qu’il manque une syllabe au second vers pour achever l’octosyllabe, et ainsi avoir la même métrique que le premier vers :
Diérèse :
La diérèse consiste à découper en deux syllabes distinctes une diphtongue. Elle s’oppose à la synérèse.
« Quelqu’un aurait-il jamais cru Qu’un Lion d’un Rat eût affaire ? »
Pour que ce second vers ait aussi huit syllabes, il faut faire la diérèse et prononcer Li-on. C’est possible car la syllabe [io] est une voyelle complexe où l’on entend en fait deux sonorités, elle est aussi appelée diphtongue. Impossible en revanche de faire une diérèse avec une voyelle simple comme [a], [e], [i], [o], ou [y].
Une synérèse se présente lorsqu’un « i » est en contact direct avec une autre voyelle : lion, niaise, fier, juif, nuit, miel… Tous ces mots ont des diphtongues.
Synérèse :
La synérèse consiste à prononcer en une seule syllabe une diphtongue. Elle s’oppose à la diérèse.
La synérèse est difficile à repérer aujourd’hui car tous les mots de la liste précédente sont naturellement prononcés en une syllabe en français du XXIe siècle. Hormis à un poète, il ne viendrait à l’idée de personne de dire Li-on en détachant nettement deux syllabes.
La ponctuation est importante dans un poème, et une simple virgule pourra empêcher une liaison, modifiant alors la prononciation ainsi que le décompte du nombre de syllabes.
La rythmique
Les rimes
Une rime, c’est quand deux vers se terminent par le même son. Pour que ce soit possible, les auteurs choisissent les mots qu’ils mettent en fin de vers.
Rime :
Une rime est formée d’au moins deux sons identiques basés sur des voyelles. S’il y a des consonnes après ces voyelles, elles doivent elles aussi être identiques.
Les auteurs peuvent faire rimer « espace » et « grâce », ou encore « étoile » et « banale ».
Il existe plusieurs qualités de rimes. Pour juger de la qualité d’une rime, on s’intéresse moins à sa graphie qu’à sa sonorité :
Les rimes peuvent se structurer de différentes manières.
« Pour égaler l’animal en grosseur, Disant : "Regardez bien, ma sœur ; »
« "Est-ce assez ? dites-moi ; n’y suis-je point encore ? – Nenni. – M’y voici donc ? – Point du tout. – M’y voilà ? – Vous n’en approchez point." La chétive pécore S’enfla si bien qu’elle creva. »
« Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages : Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs, Tout petit prince a des ambassadeurs, Tout marquis veut avoir des pages. »
Les autres jeux de sonorités
Le but de la poésie est de jouer avec les sonorités. Les rimes de fin de vers ne sont donc pas l’unique façon de faire et les sonorités internes au vers ont également leur importance.
Lorsque la rime est placée à la moitié du vers, on dit que c’est une rime interne.
« Et sans cesse du doux fuseau crédule La chevelure ondule au gré de la caresse ».
L’assonance est la répétition d’une sonorité basée sur une voyelle dans un ou plusieurs vers.
« Moi qui sais des lais pour les reines ».
L’allitération est la répétition d’une sonorité basée sur une consonne dans un ou plusieurs vers. Dans l’exemple ci-dessous, on relève une allitération en « f ».
« Les cafés gonflés de fumée. »
En poésie mais aussi dans d’autres formes de littérature, le choix des sonorités que l’on répète n’est pas anodin. En général, l’auteur cherche à faire entendre un bruit, c’est ce que l’on nomme l’harmonie imitative, comme dans ce célèbre vers de Racine tiré d’Andromaque :
« Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? »
L’allitération en [s] vise à faire entendre les sifflements des serpents évoqués.
Les jeux de rythme
On ne parle généralement d’hémistiche que pour l’alexandrin, mais, au sens strict, tous les vers ayant un nombre de syllabes pair ont deux hémistiches.
Hémistiche :
Un hémistiche est une moitié de vers. Un alexandrin est composé de deux hémistiches de six syllabes chacun.
En poésie, il y a des moments dans le vers où on fait une pause. Ces moments s’appellent les césures. En poésie classique, ces césures sont souvent signalées par la ponctuation ou le sens du vers.
Césure :
La césure est une coupure dans le vers. Les mètres de vers les plus courants ont des emplacements de césure fixes.
La césure la plus connue est celle de l’alexandrin classique car elle se place entre les deux hémistiches. Cette césure est fréquente mais elle n’est pas obligatoire.
Pour symbolyser une césure, on utilise les doubles barres : //
« Exilé sur le sol // au milieu des huées, Ses ailes de géant // l’empêchent de marcher. »
Lorsque le vers ne permet pas de saisir le sens de la phrase et que cette phrase a besoin d’un autre vers pour s’achever, alors on parle d’enjambement.
« Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid. »
Dans cet exemple titré du « Dormeur du val » de Rimbaud, on voit nettement que le premier vers s’achève sans que l’on puisse comprendre la phrase.
Ce n’est pas parce qu’un vers ne se termine pas par un point que l’on a affaire à un enjambement. Pour que ce soit le cas, il faut en fait un suspens dans la phrase, suspens qui s’achève au vers suivant.
« Petit-Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse. »
« Vois, cette branche est rude, elle est noire, et la nue Verse la pluie à flots sur son écorce nue ; »
Interprétation du texte
Toutes ces subtilités servent à bien analyser les poèmes, notamment lors de l’épreuve du brevet. Il y a donc des critères particuliers auxquels il faut faire attention lorsqu’on étudie un texte poétique :
Conclusion :
Ce cours présente les notions essentielles pour bien analyser un poème. Il faut donc pouvoir établir le mètre d’un poème, et constater s’il s’agit d’un hexasyllabe, d’un octosyllabe, d’un décasyllabe ou encore d’un alexandrin. Mais il faut également connaître les différentes façons d’agencer ces vers au sein d’une strophe : tercets, quatrains, dizains, etc. Les rimes peuvent être pauvres, suffisantes ou riches, selon le nombre de sons qu’elles partagent. Elles peuvent être agencées en rimes suivies, croisées ou encore embrassées. Et toutes ces notions devront être mises à profit pour analyser le texte : la forme permet de mieux expliquer le sens.