Un développement inégal et déséquilibré

Introduction :

Chaque jour des milliers de migrants tentent, dans des conditions épouvantables, de traverser la Méditerranée pour rejoindre l’Europe.

Ces populations fuient les guerres, les famines et la misère vers une Europe qui leur apparaît comme un eldorado. Cette situation résume à elle seule les déséquilibres mondiaux : l’hémisphère Nord riche domine un hémisphère Sud de plus en plus pauvre, et chaque année cet écart ne cesse de se creuser.

L’objectif de ce cours est de présenter un panorama général des inégalités dans le but de pouvoir raisonner autour de la notion de « développement ». La première partie sera donc constituée d’une présentation générale des inégalités dans le monde, en insistant tout particulièrement sur les définitions. Les problèmes que soulèvent les différentes échelles dans la définition des inégalités seront présentés dans la seconde partie. Une troisième et dernière partie analysera les enjeux liés à la notion à maîtriser, le développement durable.

Les inégalités de développement

Comment mesure-t-on le développement ?

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Définition

Développement :

Cette notion désigne de manière générale l’amélioration de la qualité de vie des habitants.

Pour mesurer le développement d’un pays ou d’une région, les spécialistes utilisent des indicateurs qui prennent en compte une série de facteurs. Il en existe plusieurs qui permettent de cibler différents besoins.

L’IDH

L’IDH, ou indice de développement humain, est un indicateur compris entre 0 et 1. Il divise les pays en trois grands groupes :

  • les pays au développement élevé ;
  • les pays au développement moyen, que l’on appelle pays émergents ;
  • les pays au développement faible.

Carte de l’IDH dans le monde : plus on se rapproche du vert foncé, plus l’IDH est élevé

Plus on est proche du 1, plus le développement du pays est élevé. Actuellement, c’est la Norvège qui occupe le haut de l’échelle avec un IDH de 0,944. L’IDH ne prend pas juste en compte les richesses économiques d’un pays pour évaluer son niveau de développement. Au contraire, il rajoute à ce facteur la dimension du bien-être des habitants car il prend en compte le niveau de vie des habitants par l’intermédiaire du PIB par habitant.

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Définition

PIB par habitant :

Le PIB par habitant est le niveau de vie théorique de chaque habitant.

Mais le PIB n’est pas suffisant pour mesurer le niveau de développement d’un pays ; on y rajoute alors les informations relatives à l’accès à la santé et à l’éducation. La santé est évaluée non seulement par l’espérance de vie, mais aussi par l’accès aux besoins essentiels : l’eau potable et une alimentation saine. L’éducation, quant à elle, est mesurée par les taux d’alphabétisation des adultes, et la durée globale de la scolarisation.

L’indice de développement humain est un excellent indicateur général ; par contre, il ne permet pas de cibler avec précision l’état d’une région. On combine alors l’IDH avec d’autres outils statistiques tels que l’IPH et l’IPM.

IPH et IPM

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Définition

IPH :

L’IPH est l’indice de pauvreté humaine. Il s’agit d’un outil statistique qui calcule la part de la population qui vit en dessous du seuil de pauvreté.

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Définition

IPM :

L’IPM ou indice de pauvreté multidimensionnelle est basé sur dix indicateurs de privation dans les domaines de la santé, de l’éducation et du niveau de vie.

On parle de seuil de pauvreté quand on vit avec moins d’un dollars vingt-cinq par jour. Cet indice permet donc de cibler au plus près les populations, notamment en distinguant les individus qui vivent dans une pauvreté multidimensionnelle, et ceux qui ne vivent que dans un seul ou deux de ces types.

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Définition

Pauvreté multidimensionnelle :

Une pauvreté multidimensionnelle est une pauvreté des trois types, soit santé, éducation et niveau de vie.

Pays du Nord et pays du Sud

Tous ces outils statistiques ont permis depuis longtemps de déterminer de manière générale une immense fracture entre le Nord et le Sud.

Carte illustrant la fracture Nord/Sud

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À retenir

Les pays de l’hémisphère nord concentrent 80 % de la richesse du globe alors qu’ils ne représentent que 20 % de la population mondiale.

Ces pays se sont développés et enrichis par phase d’industrialisation depuis les révolutions industrielles du XIXe siècle. Ils sont d’ailleurs appelés pays riches ou pays industrialisés. Dans ces pays du Nord, on inclut l’Australie et la Nouvelle Zélande, pourtant situées au Sud.

  • Le « Nord » est donc utilisé ici comme un concept et non pas comme une référence géographique.

Les pays du Sud sont les pays pauvres, généralement situés dans l’hémisphère sud et en Asie. À l’intérieur de cette catégorie on distingue deux sous-catégories de pays : les pays émergents ou pays en voie de développement, et les pays les moins avancés, que l’on appelle souvent PMA. Les pays émergents ont un PIB par habitant inférieur aux pays développés ; mais ils connaissent une croissance économique rapide et leur niveau de vie se développe. Parmi ces pays, les BRICS occupent le haut de l’échelle.

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Définition

BRICS :

On appelle BRICS l’ensemble de pays constitué du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud.

Comment expliquer ces inégalités de développement ? Il faut recourir à l’Histoire pour les comprendre : la colonisation a permis aux pays européens de s’enrichir considérablement et de dominer les flux économiques et commerciaux. Les pays pauvres, quant à eux, sont des victimes de cette colonisation et de l’exploitation, par les pays du Nord, de leurs matières premières.

Des inégalités à toutes les échelles

Des Nord et des Sud

Si on regarde de manière un peu plus précise la répartition des pays dits du Nord et ceux dits du Sud, on peut remarquer que cette distinction est trop générale pour faire ressortir les nuances à l’intérieur des régions.

Par exemple, la France est un pays riche, un pays « du Nord » : mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de pauvres en France. Et même au niveau national, les différences entre régions – rurales et urbaines notamment – permettent encore une fois de nuancer ce propos.

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À retenir

La géographie est donc une discipline qui utilise différentes échelles pour illustrer son propos : on dit qu’elle utilise une approche multiscalaire.

L’échelle continentale

Beaucoup de migrants frappent donc aux portes de l’Europe dans l’objectif de trouver une vie meilleure. Pourtant, l’Europe est loin d’être homogène : les pays de l’Est, issus de la dissolution du bloc soviétique, ont un degré de développement inférieur à l’Europe occidentale.

  • À l’échelle continentale, on assimile l’Amérique Latine au « Sud ». Pourtant, les niveaux de vie sont extrêmement variables d’un pays à l’autre : le Brésil est difficilement comparable à la Bolivie, avec laquelle il partage pourtant une frontière.
  • L’exemple asiatique est également emblématique de ces inégalités à l’échelle continentale. La façade est de l’Asie est considérée comme une zone très développée. Il n’en est rien pour l’Asie occidentale, avec l’intérieur de la Chine par exemple, ou des pays tels que le Cambodge ou le Vietnam.
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Attention

Il est important de faire attention à ces différentes nuances, pour ne pas faire de généralités. On entend par exemple souvent le cas de « l’Afrique, le continent le plus pauvre du monde ». Il est vrai qu’au niveau statistique, il s’agit bien du continent le plus pauvre, mais tous les pays n’ont pas le même degré de développement. L’Afrique du Sud, par exemple, n’est en rien comparable au Niger.

L’échelle nationale

Dans la même logique, la différenciation entre un bloc du Nord et un bloc du Sud ne permet pas d’apprécier les différences de développement au sein même d’un pays. Reprenons l’exemple du Brésil : érigé en modèle de pays en développement, pesant de plus en plus dans la politique internationale, le pays possède néanmoins un taux de pauvreté extrêmement élevé.

La photo ci-dessous, montrant les favelas de Sao Paulo, illustre bien ce propos.

Favelas de Sao Paulo, au Brésil

L’exemple de Mumbai, en Inde, est encore plus représentatif de ces disparités : un énorme tuyau destiné à approvisionner en eau potable les quartiers luxueux de la ville traverse l’un des plus grands bidonvilles du monde, qui n’a, quant à lui, pas accès à l’eau potable.

Le bidonville de Mumbai, en Inde

De nouveaux besoins

L’évolution de la population

Dans ce contexte d’accroissement des inégalités, une donnée vient compliquer encore plus le problème : l’accroissement de la population mondiale. En effet, on estime en effet qu’en 2050, la Terre comptera 9 milliards d’habitants.

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À retenir

Cette augmentation devrait essentiellement concerner les pays de l’hémisphère sud, en particulier les pays en développement. L’hémisphère nord au contraire devrait rentrer dans une phase de « décroissance démographique ».

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Définition

Décroissance démographique :

On appelle décroissance démographique un renouvellement des générations négatif.

À partir du moment où la population risque de doubler dans des régions qui sont, à l’heure actuelle, déjà très vulnérables, la question de la gestion des inégalités prend tout son sens. C’est le cas en particulier de la question de l’alimentation, qui devient primordiale :

  • comment nourrir neuf milliards de personnes quand on peine à nourrir sept milliards et demi ?
  • Où trouver de nouvelles surfaces agricoles afin de nourrir toute cette population  ?

Pour augmenter les surfaces agricoles, la seule solution qui a été trouvée jusqu’à présent est celle de la déforestation, dont les conséquences sur l’environnement ne sont plus à décrire.

Illustration de la déforestation

La consommation des pays riches : l’empreinte écologique

Comment maintenir les retraités à un niveau de vie élevé ? Les retraites sont un sujet explosif lorsque l’on analyse les projections pour les quarante prochaines années.

  • Mis à part le thème du vieillissement de la population, les pays riches soulèvent un autre problème : le mode de consommation excessif.

Certains penseurs estiment que la surpopulation mondiale n’est pas un problème mais que ce sont les modes de consommation excessifs, caractéristiques des pays occidentaux, qui engendrent une saturation de la planète.

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Exemple

Par exemple, les pays riches n’ont pas un problème de sous-alimentation mais bien au contraire de suralimentation.

  • L’empreinte écologique des pays riches est tellement élevée qu’il faudrait une terre et demie pour pouvoir maintenir ce mode de vie.

La surconsommation en eau, et l’exploitation massive des ressources naturelles provoquent des dégâts écologiques que les chercheurs estiment irréversibles.

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Définition

Empreinte écologique :

L’empreinte écologique est la mesure de l’impact des activités humaines sur le sol naturel.

Une urbanisation massive

On estime qu’en 2050, les trois quarts de la population vivront en ville. Cette urbanisation massive, concentrée sur les littoraux, soulève, elle aussi, de nombreuses questions. Ces questions sont différentes entre les pays riches et les pays pauvres.

  • Dans le cas des pays riches, comment aménager les villes pour qu’elles puissent offrir à la fois un niveau de vie élevé mais aussi qu’elles respectent l’environnement ?
  • Comment faire, dans le cas des pays pauvres, pour adapter les infrastructures ? Il est en effet impensable que l’urbanisation des pays pauvres et en développement ne se réalise pas à partir de droits fondamentaux, tels que l’accès à l’eau potable.
  • L’aménagement des villes dans les décennies à venir doit donc se faire de manière responsable et raisonnable : il s’agit de les développer de manière durable.

Conclusion :

Les inégalités de développement s’expriment dans plusieurs domaines. Que ce soit au niveau de la répartition de la population, au niveau de l’accès aux soins fondamentaux (école et santé) ou au niveau économique, la tendance mondiale est à la concentration des richesses entre très peu de pays privilégiés, qui contrastent avec l’immense pauvreté des autres pays.

Cette fracture Nord/Sud doit pourtant être précisée, car la répartition des inégalités n’est pas homogène. Dans cette perspective, l’approche multiscalaire de la géographie nous a permis de comprendre quelles étaient les logiques des inégalités au niveau continental et national.

Finalement, les prévisions de croissance de la population mondiale posent des questions fondamentales pour notre avenir : les pays riches doivent faire face à un vieillissement de leur population, tandis que les pays pauvres doivent, au contraire, anticiper l’augmentation de la population par un aménagement des structures sociales. Le développement durable est décidément l’enjeu du XXIe siècle.