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La domestication des plantes
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Introduction :
Les cultures du maïs, du blé, du riz et du soja, sont essentielles pour la production alimentaire mondiale. Ces cultures sont vitales à la fois pour la consommation animale, dont font notamment partie les exploitations bovines ; mais aussi bien entendu pour la consommation humaine, dont la population est toujours croissante. La culture des plantes a commencé il y a environ ans et a marqué un tournant dans l’histoire de l’humanité : le début de l’agriculture signe le début de la sédentarisation. Plus tard, la domestication des plantes a d’abord été nécessaire pour éviter les famines ; aujourd’hui elle est aussi nécessaire pour optimiser les rendements suite à l’appauvrissement des sols.
Nous allons voir dans ce cours comment la domestication des végétaux modifie le phénotype des plantes, puis comment les méthodes de sélection modifient leur génotype, enfin nous étudierons les enjeux et limites de cette domestication des plantes par l’humain et l’évolution biologique de ce dernier en fonction de son régime alimentaire.
L’origine des plantes domestiquées
Nous allons voir dans cette partie comment s’est déroulée la domestication et quelles en sont les conséquences sur les plantes sauvages, d’un point de vue phénotypique.
Tout au long de ce cours, nous nous intéresserons spécifiquement, à titre d’exemple, à la domestication du maïs.
L’histoire de la domestication
Domestication des plantes :
La domestication est la mise au service de l’humain. La domestication des plantes est donc la transformation des plantes pour l’utilisation et la consommation humaine.
La domestication des plantes a commencé il y a environ ans dans plusieurs régions du monde en simultané.
Les plantes domestiquées varient d’une région à l’autre en fonction des espèces naturellement présentes. Ainsi, on peut voir que les cultures céréalières se sont développées en Asie et au Moyen Orient, tandis que les légumineuses ont été domestiquées dans le Croissant fertile. Quant à l’Europe, s’y sont davantage développées les cultures du chou et de l’avoine ; tomates, maïs et pommes de terre, pour leur part, proviennent d’Amérique.
Bien entendu, aujourd’hui la répartition des espèces cultivées ne correspond plus aux aires de présence des espèces sauvages.
L’uniformité de cette répartition aujourd’hui a pu avoir lieu grâce au développement du commerce le long de la route de la soie, ou à l’exportation de nombreux produits alimentaires suite à la découverte de l’Amérique par les Européens.
La domestication du maïs s’est déroulée au Mexique il y a environ ans. On sait que le maïs a été domestiqué à partir d’une espèce sauvage appelée « téosinte ».
Cette espèce végétale primitive existe toujours, nous permettant ainsi de comparer la plante domestiquée à son homologue sauvage.
Les syndromes de domestication
Syndrome de domestication :
On appelle syndromes de domestication les traits phénotypiques caractéristiques d’une plante domestiquée.
Nous allons comparer la téosinte et le maïs afin de comprendre quels sont les syndromes de domestication.
Représentation d’un plant de maïs et d’un plant de téosinte (ancêtre du maïs)
Cette iconographie nous permet de comparer le phénotype des deux plants à différents niveaux.
On peut voir que les plants de maïs ont une forte dominance apicale, cela signifie que :
Si l’on s’intéresse plus en détail aux grains du maïs, on observera également des différences :
Nous avons pu déterminer plusieurs syndromes de domestication qui aboutissent à des modifications phénotypiques.
Tous ces marqueurs phénotypiques se retrouvent également chez d’autres espèces domestiquées. Ils permettent ainsi d’augmenter rendements et qualité nutritive des plantes, tout en facilitant leur culture, servant un seul et même objectif : nourrir l’humanité.
Les conséquences génétiques de la domestication
Nous allons maintenant étudier comment l’humain a façonné ces plantes pour obtenir les caractères souhaités.
La sélection des caractères
Dès le début de la domestication des plantes, l’humain a procédé à de la sélection.
Sélection :
La sélection est le choix non aléatoire des reproducteur·rice·s d’une population.
La sélection s’applique sur les caractères que l’on souhaite maintenir à la génération suivante. Pour que cette sélection s’opère, il faut que les caractères soient codés par des gènes et donc que ces caractères soient héréditaires.
Il y a donc une sélection du patrimoine génétique qui s’opère lors de la domestication.
Cette sélection s’effectue sur les caractères liés aux syndromes de domestication et peut se faire de différentes manières.
Les méthodes de sélection
Nous allons étudier les quatre grandes méthodes de sélection des plantes domestiquées et nous verrons quelles sont leurs conséquences sur la diversité génétique des populations.
Sélection massale :
La sélection massale consiste à sélectionner les plantes qui ont les caractères les plus intéressants, et à planter les graines de celles-ci.
À chaque génération, on réitère le processus.
Cette méthode permet une fécondation entre individus portant des caractères d’intérêt ; de cette fécondation sont donc issus des individus pouvant porter ces mêmes caractères. En conséquence, ceux-ci augmentent en fréquence dans la population.
Cette méthode de sélection favorise la fécondation entre individus issus de la même plante et donc augmente le pourcentage de consanguinité (hors cas d’autofécondation).
Cette augmentation a pour effet immédiat de diminuer la diversité génétique au sein de la population végétale.
Cette méthode rejoint la précédente mais ne repose absolument pas sur les croisements entre plusieurs individus possédant des caractères d’intérêt.
L’objectif de cette méthode est de produire des individus homozygotes pour les gènes codant les caractères à sélectionner.
On dit d’un individu qu’il est homozygote pour un gène quand il possède, pour ce gène, deux allèles identiques.
Cette méthode repose sur la capacité des plantes à s’autoféconder (voir cours intitulé « Reproduction de la plante entre vie fixée et mobilité »).
Chez le maïs, on pose des filets sur les fleurs mâles afin que leur pollen ne s’envole pas ; en contrepartie, on protège les fleurs femelles pour empêcher leur fécondation par des pollens étrangers. On pollinise ensuite manuellement les fleurs afin d’obtenir des individus homozygotes pour les caractères souhaités. À chaque génération, on sélectionne les individus possédant le meilleur phénotype. Au bout de plusieurs générations, le taux d’homozygotie dans la population se rapproche de et l’ensemble des individus possède le caractère recherché.
Notons toutefois que cette méthode a un impact énorme sur la diversité des génomes : celle-ci baisse de façon drastique.
Cette méthode, très répandue, est très utile pour la méthode de sélection suivante : l’hybridation, que nous allons à présent étudier.
Hybridation :
L’hybridation consiste en le croisement de lignées pures ayant des caractères différents.
Cette méthode permet donc d’obtenir des individus possédant les caractères sélectionnés pour les deux lignées croisées.
Elle est actuellement très utilisée pour produire de nouvelles variétés de plantes cultivées.
Les hybrides produits ne sont pas utilisés pour la reproduction et sont souvent infertiles. Cela permet la vente des individus hybrides possédant des meilleurs rendements et donc la fidélisation des agriculteur·rice·s, forcés de racheter leur semence l’année suivante.
On nomme « semencier·ère·s » les professionnels spécialisés dans la production d’hybrides et de lignées pures. On distingue ainsi les « semences commerciales » des « semences naturelles ».
La sélection de mutants est une méthode qui permet de créer de la diversité au sein d’une espèce cultivée. Quittons un instant l’exemple du maïs pour en observer un plus parlant : le chou (Brassica oleracea).
Les choux cultivés présentent une importante diversité suivant la mutation spontanée qui les touche. ©Coyau/Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0
Toutes les variétés de choux que l’on cultive sont issues de la même espèce végétale : la moutarde. Cependant, chacune de ces variétés correspond à une mutation différente sur les gènes permettant la mise en place de la fleur (chou-fleur, brocoli ou chou romanesco), des feuilles (chou ou chou frisé), des bourgeons axillaires (chou de Bruxelles) ou de la tige (chou rave).
Les choux présentent ainsi une plus grand diversité phénotypique (formes, tailles, couleurs, goûts différents) : il s’agit d’une sélection de mutants naturels.
Dans le cas du maïs on lui procure un caractère initialement absent pouvant, par exemple, lui fournir une résistance à un parasite : il s’agit d’une mutation induite.
La sélection de mutants peut se faire selon deux modalités :
La mutation induite par l’humain repose sur la méthode de transgénèse qui permet d’introduire des gènes d’intérêt étrangers dans la plante.
Le maïs-Bt, notamment, est produit par transgenèse.
On a introduit dans ce maïs un gène issu d’une bactérie Bacilus thuringiensis : la particularité de ce gène est sa production d’une molécule insecticide. Le maïs modifié est donc capable à son tour de produire cette molécule.
En lien avec ce bilan, nous allons à présent nous intéresser aux conséquences de l’appauvrissement génétique et aux limites de l’utilisation des biotechnologies.
Limites et enjeux de la domestication des plantes
La domestication des plantes présente des limites, en particulier induites par des conséquences néfastes. Nous allons étudier ces conséquences, puis nous verrons quels sont les enjeux actuels liés à l’utilisation des technologies et à l’évolution des plantes domestiques.
Les limites de la domestication
Si nous poursuivons avec l’exemple du maïs domestiqué, notons qu’une des sélections opérées est l’empêchement de la chute des grains : il est en effet plus pratique de récolter ceux-ci en cueillant simplement l’épi.
En outre, nous avons souligné précédemment l’appauvrissement de la diversité génétique chez les plantes cultivées. Nous avons employé, à ce sujet, le terme de « consanguinité ».
Il est connu que chez les humains, ou les chiens de race par exemple, la consanguinité augmente la probabilité d’apparition de maladies génétiques graves et délétères.
Les méthodes de sélection évoquées précédemment peuvent entraîner une accumulation de mutations délétères et une baisse des défenses immunitaires.
L’agriculture intensive augmente également la probabilité de maladie végétale dans les cultures.
Lorsqu’un ravageur ou pathogène arrive au sein d’une population végétale, si l’ensemble des individus est homogène et sensible à cette menace, celle-ci va pouvoir se propager rapidement.
C’est ce qui s’est passé lors de la Grande Famine de 1845 en Irlande.
Les cultures de pommes de terre, ravagée par le mildiou, sont à l’origine d’une crise de famine majeure. Les conséquences : de morts et une émigration massive de la population irlandaise vers les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Australie.
Il est donc nécessaire pour l’humain de protéger davantage ses plantes domestiquées.
Il peut le faire en utilisant des produits phytosanitaires tels les engrais ou les pesticides. Cependant, l’utilisation de ces produits est très controversée et a un fort impact sur la biodiversité et les populations naturelles. Ils constituent en effet un risque environnemental dans la mesure où ils polluent sols et nappes phréatiques, tout en présentant un danger pour de nombreuses espèces animales.
Actuellement, de plus en plus d’études et de recherches se développent pour croiser les populations actuelles avec les populations ancestrales, souvent plus résistantes au froid, à la sécheresse ou aux pathogènes.
Il est donc nécessaire de trouver des alternatives aux populations homogènes et fragiles.
Cet aspect de la domestication nous amène à mettre en lumière les nouveaux enjeux de nos sociétés actuelles quant aux plantes domestiquées.
Les enjeux de l’agriculture moderne
Il y a deux grands volets aux enjeux actuels de l’agriculture :
Nous avons vu précédemment que la biotechnologie peut être utilisée pour faire apparaître de nouveaux caractères dans les populations, notamment avec l’exemple du maïs-Bt.
Bien que l’utilisation des biotechnologies soit intéressante du point de vue du potentiel de récolte, il faut rester vigilant.
Reprenons l’exemple du maïs-Bt. Certes, la production de cette molécule insecticide par le maïs permet de lutter contre un ravageur précis, mais elle a également un impact sur les autres insectes.
Ces molécules se retrouvent dans les sols et les cours d’eau avoisinants. Elles peuvent donc avoir des conséquences néfastes sur les insectes des cours d’eau en modifiant leur cycle de vie, mais également sur les pollinisateurs. Or, si la mortalité des pollinisateurs naturels augmente, non seulement la reproduction des plantes sauvages est impactée, mais celle des plantes cultivées également.
On pourra évoquer également le cas du gène de résistance implanté dans le soja par des industries en biotechnologies agricoles, telles que Monsanto. Ce gène peut « voyager » chez d’autres individus d’espèces sauvages, comme des plantes indésirables par exemple, qui deviennent alors à leur tour résistants au pesticide.
Ainsi, l’utilisation des technologies pour limiter les conséquences d’un ravageur peut être très néfaste pour la biodiversité.
Au-delà des problématiques liées à la domestication des plantes, c’est le modèle d’agriculture intensive, dominant en France, qui interroge.
Ce modèle a en effet permis d’augmenter massivement les rendements pour nourrir une population toujours croissante et de faire de la France une puissance agricole, mais il a aujourd’hui atteint ses limites eut égards aux problèmes environnementaux qu’il génère.
Lors de la déprise agricole, de la mécanisation et de l’intensification de l’agriculture en France, le modèle agricole est passé d’une multitude de petites surfaces agricoles diversifiées à de grandes surfaces de monoculture afin de produire de plus en plus vite.
Nous avons vu, dans les limites de la domestication des plantes, que les grandes monocultures sont davantage exposées aux maladies et aux ravageurs, en lien avec la faible diversité génétique. En cas de grande maladie, les pertes économiques peuvent être désastreuses pour les agriculteur·rice·s mais également pour la population mondiale. Pour ces raisons, il est important de se poser la question des méthodes agricoles.
L’agriculture d’avenir ?
L’agriculture biologique (« bio ») se présente comme une alternative plus respectueuse de l’environnement mais avec des rendements moins élevés.
Soucieuse du bien-être animal (accès à l’extérieur, alimentation biologique, réduction des souffrances lors de l’abattage), elle permet en outre une meilleure traçabilité des produits. Les professionnel·le·s peuvent suivre le parcours des denrées et maîtriser la chaîne de transformations subies depuis le lieu de culture jusqu’au point de vente.
En cela, l’agriculture biologique favorise le développement économique local.
L’agriculture biologique prône le maintien de la biodiversité, de l’écosystème naturel et du patrimoine génétique des espèces cultivées endémiques. Il s’agit en d’autres termes de conserver les espèces telles qu’elles se trouvent à l’état naturel sans sélection ni modification génétique. À ce titre, le maintien et l’utilisation de prédateurs des ravageurs naturellement présents est une des mesures encouragée par l’agriculture biologique.
Lutte biologique :
La lutte biologique est l'utilisation d'organismes vivants pour prévenir ou réduire les dégâts causés par des ravageurs.
Ces auxiliaires naturels, utiles pour lutter contre les nuisibles, les parasites et les ravageurs des cultures, peuvent naturellement nicher sur les terrains cultivés ou être importés volontairement par les agriculteur·rice·s.
Le puceron, qui ravage de nombreuses cultures, a pour prédatrice naturelle la coccinelle.
L’alimentation a eu, à plusieurs époques, des conséquences importantes sur l’évolution des phénotypes humains. Elle a ainsi contribué à la sélection de caractères génétiques spécifiques, dépendants de l’histoire, des espèces végétales endémiques et des choix de domestication de celles-ci.
À ce sujet, il est particulièrement intéressant d’étudier le gène humain AMY1, responsable de la production d’amylase.
L’amylase est une enzyme responsable de la digestion de l’amidon.
Il a été observé que plus il y a de copies du gène AMY1, plus la quantité d’amylase dans la salive d’un individu est élevée, plus il est donc à même de digérer l’amidon.
Nombre de copie du gène de l’amylase en fonction des populations
On peut comparer deux populations à titre indicatif :
La domestication végétale a aussi eu une influence sur l’humanité puisque l’évolution culturelle du régime alimentaire a entraîné une évolution biologique de populations humaines.
Conclusion :
Les plantes sauvages du monde entier ont été domestiquées par les humains afin de maîtriser les récoltes et, surtout, d’augmenter les rendements. Cette domestication a eu de grandes conséquences sur le phénotype des plantes mais également sur la structure génétique des populations.
Les végétaux domestiqués ont une très faible diversité génétique, ce qui entraîne des problèmes de défense en cas de pathogènes ou de variations climatiques d’importance. Afin de limiter ces impacts, l’humain développe des stratégies grâce à la mutagénèse ou l’utilisation d’intrants. Cette utilisation massive et les connaissances actuelles en écologie amènent à remettre en question les pratiques agricoles modernes du fait des nombreux dégâts environnementaux engendrés.