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La Ballade des pendus, François Villon
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Fiche de lecture

Contexte

François de Montcorbier est probablement né en 1431 ou 1432 à Paris. Orphelin de père, le jeune François Villon est élevé par Guillaume Villon, un chapelain parisien, dont il prend le nom de famille. D’abord étudiant dans le Quartier Latin à la faculté des Arts, il est un étudiant indiscipliné. À l’âge de 24 ans, il blesse mortellement son adversaire, un prêtre, lors d’une rixe. S’ensuit alors un parcours de larcins, d’arrestations, d’errances, d’emprisonnements et de remises en liberté. En province, il fréquente les cours de Charles d’Orléans puis du duc de Bourbon. Il est de nouveau arrêté à Paris lors d’une dispute en 1462 et condamné à être pendu. Villon fait appel de la décision. C’est probablement lorsqu’il est incarcéré au Grand Chatelet, plongé dans l’attente anxieuse du rendu de l’appel, que Villon rédige la célèbre Ballade des pendus. Sa peine est finalement commuée en un exil hors de Paris de dix ans. On ignore la date de sa mort, perdant sa trace au début de l’année 1463. Toutefois, les nombreuses compositions poétiques de François Villon (Le Lais, Le Testament…) le rendent célèbre dès la fin du XVe siècle : il est édité dès 1489 chez Pierre Levet, puis chez d’autres éditeurs, dont Clément Marot, tout au long du XVIe siècle.

François Villon

1462

La Ballade des pendus

Genre

Poésie

Thèmes

La ballade : La ballade est la forme poétique médiévale la plus célèbre. Elle présente une forme fixe composée de trois couplets et d’un « envoi » (petit couplet finale qui sert à faire un hommage). Chaque strophe s’achève en un refrain (« Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre ! ») qui fait écho à la forme chantée originelle.

Les thèmes du poème : compassion et rédemption : Le poème se lit comme l’épitaphe et la prière d’un pendu et plus largement, de tous les condamnés à mort. En effet, Villon parle en son nom et en celui de ses compagnons d’infortune (« nous ») ; or, ils sont, dans le poème, déjà morts :

« Frères humains, qui après nous vivez, […]
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est pieça devorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et pouldre. »

Les destinataires du poème sont doubles : la communauté des hommes (« frères humains », « vous »), mais aussi « Dieu », dont le poète implore le pardon. Se faisant porte-parole des condamnés à morts, le poète implore la charité chrétienne, la pitié et la compassion de ses semblables. À Dieu, il en appelle à la rédemption, craignant les feux de l’enfer. La dimension morale et religieuse – couple indissociable dans la pensée du XVe siècle français –, redouble en effet la dimension esthétique de la composition. Dans un rapprochement entre le lecteur et le poète, mais aussi entre le monde des vivants et les morts, François Villon rappelle au lecteur que tout homme quel qu’il soit sera condamné au même destin funèbre et, conformément au christianisme qui conduit la vie religieuse de l’époque, au jugement dernier. Le poème peut ainsi se lire comme un véritable Memento mori (qui se traduit ainsi : « souviens-toi que tu es mortel »). Celui-ci est notamment appuyé par la description morbide des corps en putréfaction du troisième dizain, rappelant les danses macabres mêlant les vivants et les morts, célèbre motif artistique de l’art macabre de la fin du Moyen Âge. La ballade s’élève ainsi comme un rappel de la condition de mortel de tout homme, le poète devenant, au fil des vers, le porte-parole de l’entière humanité.

Résumé

La Ballade des pendus est un poème composé en 1462 par François de Montcorbier, dit François Villon. François Villon est reconnu comme étant le premier poète lyrique à composer à partir de sa propre expérience vécue. On peut en ce sens le considérer comme étant le premier poète moderne.
Il s’agit d’une ballade en vers décasyllabiques composée de trois dizains et d’un quintil. Elle est écrite dans la langue française du Moyen Âge. Plus connue aujourd’hui sous le titre La ballade des pendus, la ballade ne porte à l’origine pas de titre. Dans son édition de 1533, Clément Marot la nomme, éclairant le lecteur, « Épitaphe en forme de ballade, que feit Villon pour luy & pour ses compaignons s’attendant à estre pendu avec eulx ».

Citation

Texte intégral en français moderne :

Frères humains qui après nous vivez,
N’ayez pas vos cœurs durcis à notre égard,
Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tôt de vous merci.
Vous nous voyez attachés ici, cinq, six :
Quant à notre chair, que nous avons trop nourrie,
Elle est depuis longtemps dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et poussière.
De notre malheur, que personne ne se moque,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre!

Si nous vous appelons frères, vous n’en devez
Avoir dédain, bien que nous ayons été tués
Par justice. Toutefois vous savez
Que tous les hommes n’ont pas l’esprit bien rassis.
Excusez-nous, puisque nous sommes trépassés,
Auprès du fils de la Vierge Marie,
De façon que sa grâce ne soit pas tarie pour nous,
Et qu’il nous préserve de la foudre infernale.
Nous sommes morts, que personne ne nous tourmente,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre!

La pluie nous a lessivés et lavés
Et le soleil nous a séchés et noircis ;
Pies, corbeaux nous ont crevé les yeux,
Et arraché la barbe et les sourcils.
Jamais un seul instant nous ne sommes assis ;
De ci de là, selon que le vent tourne,
Il ne cesse de nous ballotter à son gré,
Plus becquetés d’oiseaux que dés à coudre.
Ne soyez donc de notre confrérie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre !

Prince Jésus qui a puissance sur tous,
Fais que l’enfer n’ait sur nous aucun pouvoir :
N’ayons rien à faire ou à solder avec lui.
Hommes, ici pas de plaisanterie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre.