La Bête humaine est le XVIIe volume de la grande série des Rougon-Macquar écrite par Émile Zola. Le roman, publié en 1890, appartient au mouvement naturaliste et s’inscrit dans une recherche à la fois historique, sociale et romanesque.
Rédigé après Le Rêve, le roman rompt avec les thèmes idéalistes de ce dernier et s’attarde sur la psychologie du criminel ainsi que sur l’hérédité. Au récit judiciaire, Émile Zola greffe une intrigue autour des chemins de fer.
Jacques Lantier : Il est le fils de Gervaise Macquart (L’Assommoir). Il est ami avec Pecqueux, son compagnon de travail. Cet employé modèle connaît sa faiblesse meurtrière (il tue ses maîtresses) et cherche à la parer en vouant une passion démesurée à sa locomotive, « la Lison ». Il devient malgré tout l’amant de Séverine et son meurtrier. Roubaud : Il est sous-chef de gare au Havre. C’est le meurtrier de Grandmorin. Après son crime, terrassé par la culpabilité, il tombe dans la déchéance. Séverine Roubaud, née Aubry : Elle est la femme de Roubaud et la victime de Grandmorin dans sa jeunesse. Elle est complice du meurtre de Grandmorin avec son mari. Le président Grandmorin : C’est le président de la compagnie de chemin de fer. Séduisant, il abuse de la naïveté de Séverine et de Louisette. Il meurt assassiné. Le juge Denizet : Il est chargé de l’affaire du meurtre de Grandmorin. Il ne parvient pas à élucider cette affaire, voulant à tout prix éviter de provoquer un scandale dans la bonne société. Il condamnera finlement un innocent. Camy-Lamotte : C’est le secrétaire général du ministère de la Justice. Il veut étouffer l’enquête sur le meurtre de Grandmorin pour éviter un scandale. Pecqueux : Ivrogne, fainéant, coureur, il est dévoué à son ami Lantier et à « La Lison ». Flore : C’est la cousine de Jacques Lantier, dont elle est secrètement amoureuse. Lorsqu’elle se donne à lui, elle échappe de justesse à la pulsion meurtrière de son amant. Trahie par Jacques qui devient l’amant de Séverine, elle veut les tuer en créant une catastrophe ferroviaire. Suite à son échec, elle prépare son suicide. Phasie et Misard : Phasie est la mère de Flore et Misard son beau-père. Phasie est également la tante de Jacques Lantier. Ils sont employés par la compagnie. Misard tue sa femme en l’empoisonnant jour après jour pour lui faire avouer où elle cache son argent, ce qu’elle ne dévoilera jamais. Cabuche : Homme des bois, il est le témoin des vices de Grandmorin avec Louisette, des catastrophes ferroviaires et des meurtres. Il représente les valeurs bafouées par la société. La Lison : La locomotive est représentée comme une machine humaine. C’est une « femme-machine » aimée de Jacques Lantier et Pecqueux. Cette locomotive n’est pas comme les autres : puissante, élégante, fiable, elle est hors-norme.
La violence et la bestialité : Les meurtres et la violence sont omniprésents, engendrés par la jalousie amoureuse, l’appât du gain ou les pulsions : Cabuche (qualifié de « bête violente ») a déjà tué, Misard empoisonne sa femme, Grandmorin a violé et ainsi provoqué la mort de Louisette, Flore provoque un déraillement, les Roubaud assassinent Grandmorin, Séverine veut faire tuer son mari, Jacques étrangle Séverine, Flore se suicide, Jacques et Pecqueux se battent à mort…
Les passions dominent, et font monter la « bête enragée » que les hommes possèdent en eux. La raison n’a plus de place et cède à l’animalité, à la violence primitive et sauvage. Le train : Le roman fait l’éloge du développement du rail qui « ouvre la voie à une humanité nouvelle ». Le train est décrit comme une force toujours en mouvement, indifférent aux drames humains qu’il côtoie. La mécanique et la surchauffe de la machine s’apparentent à à la pulsion meurtrière des hommes : le train est cette « bête humaine », monstrueuse, qui gronde et qui fraye son chemin avec puissance, il est associé à la violence. L’hérédité : Jacques Lantier est malade par hérédité : il connaît des pulsions meurtrières lorsqu’il fréquente une femme, et hérite de l’alcoolisme de sa mère Gervaise. La folie est présentée comme étant un trait familial qui empêche l’homme d’être libre, prisonnier de ses vices : c’est la « fêlure ». Le Second Empire et les chemins de fer : Le cadre historique du roman est celui des grands changements du paysage français, dont le développement du chemin de fer fait partie. Les gares provinciales et parisiennes se développent, le fer et la fonte sont des matériaux qui favorisent les constructions. Les nouvelles locomotives permettent de réduire le temps de voyage entre les villes. L’image de la gare Saint-Lazare (qui est le point de départ des trains de la Compagnie de l’Ouest vers la Normandie et le Havre) et de son expansion est très présente dans le récit. Elle occupe un quartier entier de Paris, les travailleurs ont des bâtiments qui leur sont dédiés, et les emplois liés à cette machinerie gigantesque sont importants.
La Bête humaine se décline à la fois comme un roman policier et comme un roman historique sur le milieu des chemins de fer. Le récit se structure autour de deux grands moments : l’assassinat de Grandmorin et le meurtre de Séverine par Jacques. L’ensemble comporte douze chapitres.
Chapitre 1
Chapitre 1
Février 1869. Paris.
En conséquence d’un incident avec un voyageur, Roubaud, sous-chef à la gare du Havre, est convoqué à Paris par la direction des chemins de fer de l’Ouest. Il sait qu’il risque d’être renvoyé et demande l’aide de sa femme Séverine, filleule de Grandmorin, le président de la compagnie, pour faire annuler la plainte. Roubaud apprend par la suite que sa femme a été abusée par Grandmorin et, jaloux, il la contraint à l’aider dans son plan pour tuer le président. Par un courrier de Séverine, ils donnent rendez-vous à Grandmorin dans le train Paris-Havre pour le tuer.
Chapitre 2
Chapitre 2
Carrefour de la Croix-de-Maufras, près de Barentin.
Jacques Lantier est mécanicien à la compagnie de l’Ouest. Il rend visite à sa tante Phasie, qui lui confie alors les doutes qu’elle a envers son mari Misard : selon elle, celui-ci voudrait l’empoisonner pour voler son argent, qu’elle garde caché. Dans la soirée, il se retrouve seul avec sa cousine Flore. Alors qu’ils se rapprochent, Lantier est pris d’une pulsion meurtrière. Connaissant ces pulsions, il s’enfuit dans la campagne. Il erre le long de la voie ferrée et est témoin d’un homicide qui a lieu dans le train qu’il a l’habitude de conduire. Plus tard, Misard lui montre un corps abandonné sur la voie, et Flore reconnaît Grandmorin.
Chapitre 3
Chapitre 3
Roubaud est rentré au Havre. Il apprend qu’une voiture doit rester à quai : celle dans laquelle il a tué Grandmorin. La mort de ce dernier est annoncée aux employés. Séverine feint une profonde tristesse. Jacques Lantier annonce qu’il a été témoin du meurtre, mais qu’il n’a vu que des silhouettes.
Chapitre 4
Chapitre 4
Palais de justice de Rouen.
Jacques a compris que les Roubaud étaient coupables, mais séduit par le regard de Séverine, il ne dit rien. Pour la famille Grandmorin, il est évident que les meurtriers sont les Roubaud, d’autant plus que Séverine bénéficie d’une grande partie de l’héritage de son tuteur. On apprend que Grandmorin avait également violé Louisette, la deuxième fille de Phasie, et qu’elle en est morte. Le juge d’instruction Denizet, lui, soupçonne Cabuche, un homme vivant seul dans la forêt, ami de Louisette, et qui a des antécédents de meurtre. Roubaud veut s’assurer du silence de Jacques Lantier et lui demande d’accompagner sa femme à Paris.
Chapitre 5
Chapitre 5
À Paris, Jacques, épris de Séverine, lui promet le silence, mais lorsqu’il lui avoue son amour, elle s’enfuit. Séverine rencontre Camy-Lamotte, le secrétaire général du ministère de la Justice. Il détient la preuve de la culpabilité des Roubaud grâce au message écrit à Grandmorin par Séverine, mais décide de les protéger pour éviter un scandale. Il convainc donc Denizet d’étouffer l’affaire. Jacques retrouve son ami Pecqueux, et ils conduisent tous deux la Lison qui ramène Séverine au Havre.
Chapitre 6
Chapitre 6
Un mois plus tard. L’argent volé par les Roubaud sur le corps de Grandmorin est caché sous le parquet : Roubaud ne veut pas y toucher, estimant que cet argent est sale. Jacques Lantier est régulièrement invité chez le couple et se rapproche de Séverine. Il se croit, auprès d’elle, guéri de sa folie et de ses pulsions meurtrières. Roubaud se réfugie dans son travail et dans le jeu, et sa femme finit par comprendre qu’il utilise l’argent volé pour cela.
Chapitre 7
Chapitre 7
La Croix-de-Maufras.
Le train dans lequel se trouvent Séverine, Jacques Lantier et Pecqueux est bloqué en raison d’intempéries. Les voyageurs sont accueillis chez les Misard. Jacques constate que sa tante ne va pas bien, et se souvient de ses doutes au sur son mari. Flore surprend un baiser entre Jacques et Séverine et ne le supporte pas.
Chapitre 8
Chapitre 8
Alors qu’ils sont ensemble à Paris, Séverine avoue son crime à Jacques. Pendant les explications de Séverine, les pulsions de Jacques remontent. Il part errer dans les rues de Paris pour calmer sa folie meurtrière, avant de revenir auprès de son amante.
Chapitre 9
Chapitre 9
Jacques veut éviter de revoir Séverine mais celle-ci lui demande d’assassiner Roubaud, qu’elle ne supporte plus. Elle compte également récupérer pour elle seule l’héritage de Grandmorin. Mais Jacques n’arrive pas à tuer Roubaud.
Chapitre 10
Chapitre 10
Phasie meurt empoisonnée, mais son mari ne réussit pas à trouver son argent. Déçue par Jacques, Flore prépare le déraillement de la locomotive qu’il conduit et dans lequel se trouve également Séverine. L’accident se produit. La locomotive, si forte auparavant, devient un « colosse broyé ». Jacques est blessé, mais Séverine est saine et sauve. Flore comprend que Jacques ne pourra jamais l’aimer, et décide de se suicider.
Chapitre 11
Chapitre 11
Séverine et Cabuche soignent Jacques Lantier. En même temps, ils fortifient leur projet de meurtre envers Roubaud. Au dernier moment, Jacques cède à ses pulsions et égorge Séverine. Cabuche découvre le corps de la femme au moment où entrent Roubaud et Misard.
Chapitre 12
Chapitre 12
Trois mois plus tard. Cabuche est arrêté pour le meurtre de Séverine. Il est condamné, avec Roubaud, aux travaux forcés à perpétuité. Jacques, lui, est courtisé par la maîtresse de son collègue, Pecqueux. Ce dernier ne le supporte pas et provoque Jacques alors qu’ils conduisent un train transportant des soldats. Lors de la dispute, ils tombent tous les deux sous les roues du train.
« […] c’étaient, dans son être, de subites pertes d’équilibre, comme des cassures, des trous par lesquels son moi lui échappait, au milieu d’une sorte de grande fumée qui déformait tout. Il ne s’appartenait plus, il obéissait à ses muscles, à la bête enragée. »
Chapitre 2« C’était comme un grand corps, un être géant couché en travers de la terre, la tête à Paris, les vertèbres tout au long de la ligne, les membres s’élargissant avec les embranchements, les pieds et les mains au Havre et dans les autres villes d’arrivée. »
Chapitre 2« Ils passaient, inexorables, avec leur toute-puissance mécanique, indifférents, ignorants de ces drames et de ces crimes. Qu’importaient les inconnus de la foule tombés en route, écrasés sous les roues ! On avait emporté les morts, lavé le sang, et l’on repartait pour là-bas, à l’avenir. »
Chapitre 10« Immobile, Jacques maintenant la regardait, allongée à ses pieds, devant le lit. Le train se perdait au loin, il la regardait dans le lourd silence de la chambre rouge. Au milieu de ces tentures rouges, de ces rideaux rouges, par terre, elle saignait beaucoup, d’un flot rouge qui ruisselait entre les seins, s’épandait sur le ventre, jusqu’à une cuisse, d’où il retombait en grosses gouttes sur le parquet. La chemise, à moitié fendue, en était trempée. Jamais il n’aurait cru qu’elle avait tant de sang. Et ce qui le retenait, hanté, c’était le masque d’abominable terreur que prenait, dans la mort, cette face de femme jolie, douce, si docile. »
Chapitre 11