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Les Justes, Albert Camus
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Fiche de lecture

Contexte

Représentée pour la première fois en 1949 sur la scène du théâtre Hébertot, Les Justes est une pièce de Camus en cinq actes. Il semblerait qu’elle ait été écrite en réponse à l’œuvre de Jean-Paul Sartre : Les Mains Sales, mettant en situation un groupe de révolutionnaires socialistes. Camus, auteur engagé, concède le fait qu’il se soit inspiré de faits réels ainsi que de personnages historiques pour écrire sa pièce. Cette dernière sera mise en scène par Paul Œttly, l’auteur n’ayant pas souhaité y prendre part.

Albert Camus

1949

Les Justes

Genre

Théâtre

Personnages

Dora Doulebov : Personnage qui a réellement existé et dont Boris Savinkov parle dans ses mémoires. C’est une femme attentive, et attentionnée envers autrui. C’est elle qui fabrique les bombes. Elle ne partage pas les idées de Stepan et n’hésite pas à le faire savoir. Elle est amoureuse de Kaliayev.

La grande-duchesse : Amoureuse et dévouée à son mari qui, lui, incarne l’homme de pouvoir. Elle est victime de l’acte révolutionnaire.

Ivan Kaliayev : Personnage historique ayant réellement participé à l’attentat révolutionnaire contre le grand-duc en 1905 à Moscou. Héros de la pièce, il est torturé entre son idéal révolutionnaire, sa pensée, et le fait de passer à l’acte, de tuer.

Stepan Fedorov : Personnage qui s’oppose d’une certaine manière à Kaliayev, car totalement dénué de sentiments et d’empathie. Il sort du bagne et est profondément marqué par cette expérience.

Boris Annenkov : Chef du parti socialiste révolutionnaire, il est inspiré du personnage historique Boris Savinkov : écrivain et révolutionnaire russe. Tel un leader, il agit pour que le groupe fonctionne ensemble, malgré les divergences d’idéaux.

Skouratov : Directeur du département de police, c’est un personnage froid et machiavélique. Il agit par intérêt personnel. Son but est de démanteler le réseau avant qu’il ne soit trop tard, en tentant de manipuler Kaliayev.

Foka : Ignare et alcoolique, il incarne, au sein de ce système, le bas peuple qui manque de connaissances. Il souhaite réduire sa peine de prison, et est prêt à devenir bourreau pour cela.

Le gardien : Il incarne l’ordre et la sécurité, mais autorise les prisonniers à parler depuis leurs cellules, du moment qu’ils restent discrets.

Thèmes

L’Histoire : Camus s’inspire de personnages réels par soucis de réalisme. L’attentat, qui est au centre de la pièce, est un attentat historique qui a eu lieu en Russie.

La tragédie : On retrouve dans cette pièce de nombreux éléments de la tragédie : un destin inéluctable et tragique, l’utilisation d’un langage soutenu, le découpage de la pièce en cinq actes… La mort et la peur font partie intégrante de cette tragédie.

L’amour : L’amour présent dans la pièce est celui des idées et de ses compatriotes. L’histoire d’amour entre les deux révolutionnaires, Dora et Kaliayev, est quant à elle laissée en suspens.

Le despotisme : Le despotisme est incarné par le pouvoir au travers du personnage du grand-duc.

Résumé

Cette pièce se rapproche d’une certaine manière de la tragédie classique. Le niveau de langue est soutenu, la pièce se déroule en cinq actes, le temps est relativement réduit et s’articule autour d’une seule action : l’assassinat du grand-duc. La fatalité au travers de l’inéluctable est au centre de la pièce, c’est pourquoi cette dernière s’apparente à la tragédie.

Prologue

Dora et Annenkov sont sur scène, dans la maison des résistants. La sonnette de la porte retentit : un coup, ils attendent, puis deux coups successifs. Ceci est un code pour s’assurer que celui qui attend est bien l’un des leurs.

Acte I

Le premier acte débute par des retrouvailles : Stepan est de retour parmi le groupe de révolutionnaires, après un séjour au bagne de trois ans. Le groupe projette d’assassiner le grand-duc Serge, véritable despote qui dirige la ville de Moscou. Stepan semble décidé à agir. Dora est contente de le revoir, Annenkov quant à lui, l’accueille mais le recadre assez vite, notamment lorsque ce dernier parle de faire sauter tout Moscou.

Voinov entre en scène. Leur plan se dessine peu à peu, ainsi que la stratégie d’action pour assassiner le grand-duc. Le groupe est rejoint par Kaliayev. On apprend que le grand-duc doit se rendre au théâtre en calèche : Kaliayev doit jeter la première bombe et Voinov la seconde. Stepan veut lancer la bombe à la place de Kaliayev. Très vite, une opposition d’idéaux et de pensées au sein du groupe se dessine, notamment entre Kaliayev, en qui on reconnaît la pensée d’Albert Camus, et Stepan, plus tranché dans ses idées, plus radical, qui incarne la pensée de Jean-Paul Sartre. Dora met en garde Kaliayev sur la difficulté de sa mission : c’est un homme qu’il va devoir tuer, et non une idée.

Acte II

Le lendemain soir, au même endroit. Dora et Annenkov observent depuis la fenêtre l’attentat organisé par leur groupe. Après un laps de temps, Kaliayev revient n’ayant pu jeter de bombes car dans la calèche, se trouvaient des enfants : le neveu et la nièce du grand-duc, Dimitri et Maria Pavlovna. Kaliayev ne veut pas tuer d’enfants. Stepan se montre alors sous son vrai visage : furieux de l’échec de la mission, il souligne que par souci de conscience et d’humanité, ils sont désormais responsables de la future mort d’enfants pauvres :

« Des enfants ! Vous n’avez que ce mot à la bouche. Ne comprenez-vous donc rien ? Parce que Yanek n’a pas tué ces deux-là, des milliers d’enfants russes mourront de faim pendant des années encore. Avez-vous vu des enfants mourir de faim ? Moi, oui. Et la mort par la bombe est un enchantement à côté de cette mort-là. »

D’un commun accord, malgré la colère de Stepan, ils décident de reconduire la mission deux jours plus tard, le grand-duc retournant très certainement au théâtre ce jour-là. Une seconde chance est ainsi accordée à Kaliayev, qui est à nouveau chargé de lancer la bombe sur le grand-duc.

Acte III

Le surlendemain, au même endroit et à la même heure. Voinov est tendu, et avoue à Annenkov, en privé, qu’il ne pourra pas lancer la bombe car il a peur. Il décide finalement de quitter le groupe. Annenkov annonce aux autres qu’il prendra sa place. Dora et Kaliayev parlent de leur amour, qu’ils ne s’autorisent pas à vivre pleinement tant que leur mission ne sera pas remplie. Dora et Stepan observent l’attentat depuis la fenêtre. Un rapport plus intime s’instaure entre les deux personnages, ainsi qu’une relative complicité malgré des différences de pensée importantes. Ils entendent une explosion : Kaliayev a réussi. La calèche explose, ils ont tué le grand-duc. Dora explose en larmes, et Stepan se réjouit.

Acte IV

« Une cellule dans la tour Pougatchev à la prison Boutirki. Le matin. »

Kaliayev est emprisonné et discute avec Foka, un autre prisonnier, en présence d’un gardien. Lorsque Foka apprend que Kaiayev doit être pendu, le gardien se met à rire et Foka a un mouvement de recul : il explique à Kaliayev que, pour se voir accorder des années de remise de peine, il est chargé de pendre les autres prisonniers. Skouratov, le directeur du département de police, entre et explique à Kaliayev qu’il a les moyens d’obtenir sa grâce s’il lui livre le nom de ses camarades. Kaliayev refuse, Skouratov sort. La grande-duchesse apparaît à son tour et décrit à Kaliayev le côté humain de son action, les conséquences de la mort de son mari. Elle souhaite que Kaliayev confesse qu’il a tué un homme. S’ensuit alors un débat d’idéaux, un débat autour de la question de tuer au nom de la justice. Pour Kaliayev, le meurtre du grand-duc Serge était uniquement une action de justice, et non un assassinat. La grande-duchesse veut demander sa grâce, il la supplie de n’en rien faire. La grande-duchesse quitte la cellule, et Skouratov entre. Il veut offrir la vie à Kaliayev à condition qu’il trahisse ses compagnons, et lui annonce que dans le cas contraire, il publiera un article annonçant le repentir de Kaliayev, de sorte que ses camarades pensent qu’il les a trahis. Kaliayev, en véritable héros révolutionnaire, refuse de trahir son groupe et crie à Skouratov que ses amis ne le croiront pas.

Acte V

Une semaine plus tard, dans un appartement, la nuit de l’éxecution de Kaliayev. Annenkov et Dora sont rejoints par Stepan et Voinov. Quelques-uns d’entre eux soutiennent que Kaliayev pourrait les avoir trahis pour se voir épargné, et doutent de ce fait de la fiabilité de leur membre. Dora, elle, ne croit pas que Kaliayev se soit réellement repenti. Stepan et Voinov sortent afin de savoir si Kaliayev a été gracié. Ils reviennent peu après, avec la nouvelle de la mort de Kaliayev. Dora exprime alors son souhait de lancer la prochaine bombe, pour connaître le même destin que Kaliayev. Annenkov proteste qu’il ne veut pas de femmes au premier rang, et que c’est au tour de Stépan de lancer la bombe, mais ce dernier accepte de laisser sa place, soulignant le fait qu’elle lui ressemble à présent.

Citation

« STEPAN

Je comprends : tu me méprises. Es-tu sûre d'avoir raison, pourtant ? (Un silence, et avec une violence croissante.) Vous êtes tous là à marchander ce que vous faites, au nom de l'ignoble amour. Mais, moi, je n'aime rien et je hais, oui, je hais mes semblables ! Qu'ai-je à faire avec leur amour ? Je l'ai connu au bagne, voici trois ans. Et depuis trois ans, je le porte sur moi. Tu voudrais que je m'attendrisse et que je traîne la bombe comme une croix ? Non ! Non ! je suis allé trop loin, je sais trop de choses… »

Acte III

« KALIAYEV

[…] Comprends-tu pourquoi j’ai demandé à lancer la bombe ? Mourir pour l’idée, c’est la seule façon d’être à la hauteur de l’idée. C’est la justification. »

Acte I

« KALIAYEV

J’ai lancé la bombe sur votre tyrannie, non sur un homme. »

Acte IV

« KALIAYEV

[…] Seulement on boit parce qu’on est humilié. Un temps viendra où il ne sera plus utile de boire, où personne n’aura plus de honte, ni barine, ni pauvre diable. Nous serons tous frères et la justice rendra nos cœurs transparents. […] »

Acte IV