Avec les Mémoires de Guerre, de Gaulle s’inscrit dans la tradition des mémoires historiques, entre littérature et débats d’idées, littérature et Histoire.
Il rédige trois tomes. Chacun correspond à une étape précise de la Seconde Guerre mondiale : L’Appel, 1940-1942 (l’appel de De Gaulle en 1940, le 18 juin) publié en 1954, L’Unité, 1942-1944 (union avec les alliés) publié en 1956 et Le Salut, 1944-1946 (être sauvé et libéré) publié en 1959 dans un contexte politique différent de ses précédentes parutions puisque de Gaulle est de retour au pouvoir, élu président de la Ve République.
Le Salut est rédigé à la première personne et témoigne de la mémoire historique de De Gaulle qui n’hésite pas à annexer de nombreux documents pour appuyer ses propos de façon objective. Le point de vue subjectif n’est cependant pas exclu, car de Gaulle illustre des souvenirs attachés à des valeurs qui lui sont chères et livre une philosophie propre, autant qu’il lui arrive de partager ses joies et ses déceptions.
Charles de Gaulle : « Je », c’est le général Charles de Gaulle qui livre un autoportrait entre objectivité historique et subjectivité. L’auteur donne des analyses poussées de l’Histoire et partage quelques sentiments plus personnels. Staline : De Gaulle peint un portrait à la fois psychologique et politique de ce dictateur qu’il montre sous de multiples facettes. Staline, c’est l’homme qui maîtrise l’art de la ruse et de la manipulation. Staline personnifie la grande URSS et symbolise la volonté patriotique de puissance ainsi que le despotisme. Mussolini : Mussolini est présenté comme un dictateur, d’apparence sans succès militaire, dont le seul talent réside dans l’art oratoire. Opportuniste, il a su profiter d’une Italie en débâcle pour arriver au pouvoir. Pour de Gaulle, Mussolini est loin d’être un héros et il salue le fait important qu’il soit mort. Hitler : De Gaulle, en décrivant Hitler, fait le portrait tragique d’un homme rusé. Il le compare à Prométhée. Cette référence au mythe grec souligne le caractère surhumain que de Gaulle attache à Hitler et à sa totale démesure.
Histoire de France : Cet ouvrage contient les mémoires d’un homme politique sur la France qui traverse une guerre, connaît la victoire et doit se reconstruire. L’ouvrage décrit avec précision la politique intérieure et la politique extérieure du pays, livre les dates clés qui ont marqué l’avancée du pays, et souligne les valeurs d’une France patriotique qui ne succombe pas à la débâcle de la guerre. C’est la volonté d’une nouvelle France (actuellement malade) qui doit trouver une place dans le monde. Seconde Guerre mondiale : C’est le thème principal des Mémoires qui suit année par année cette histoire sanglante du monde. Ici, il est question de la libération et de la victoire. De Gaulle y livre une mémoire militaire et fait le portrait des principaux dictateurs. Reconstructions et alliance : Les pays doivent se reconstruire et faire en sorte de régler les problèmes qu’a causé la guerre. Pour de Gaulle, reconstruire la France c’est lui créer un avenir. Des valeurs y sont rattachées : l’importance de l’ordre (contre la peur de l’anarchie), l’idée d’instaurer de nouvelles réformes, de fonder une nouvelle République dont les bases sont « pouvoir, fermeté, sécurité ».
Mémoires de Guerre est accueilli par la critique comme un véritable événement littéraire. On le compare même aux plus grands mémorialistes comme Saint-Simon, Tacite ou Chateaubriand. Dans Le Salut, de Gaulle livre en tant qu’historien un témoignage précieux sur son action politique et militaire, et il sublime en tant qu’écrivain mémorialiste son destin ainsi que ses sentiments profonds de joies et ses déceptions. Entre histoire personnelle et collective, Le Salut relate l’épopée de la France libre. Le récit du Salut est principalement chronologique (il s’ouvre en septembre 1944 et se termine en janvier 1946) mais l’ordre de la narration ne suit pas toujours systématiquement celui des faits que la mémoire recompose. Il comporte de nombreuses dates et témoigne d’un passé historique fourni en événements.
L’œuvre se structure en sept chapitres qui représentent des thèmes.
Chapitre 1 : La Libération
Chapitre 1 : La Libération
De Gaulle expose sa pensée sur la politique intérieure française. La France est encore en état de guerre et le général observe que la libération reste progressive. Il faut désormais de l’ordre et de la discipline. Pour cela, De Gaulle se rend sur place, dans les régions françaises, pour se rendre compte des dégâts. En même temps, il affirme l’autorité de l’État et veut appliquer des mesures urgentes fondées sur une « adhésion nationale » avec l’appui du peuple. Les troupes résistent en Alsace, aux Alpes, sur la côte Atlantique, et les plans aboutissent à la Libération : la France retrouve son pouvoir, sa justice, son économie (qu’il a fallu sauver de la banqueroute).
Chapitre 2 : Le rang
Chapitre 2 : Le rang
De Gaulle expose ici son opinion sur la politique extérieure, puis à nouveau sur la politique intérieure. Il pose essentiellement la question du rang de la France au niveau mondial. Pour lui, il est nécessaire que ce pays retrouve sa puissance et sa place. Pour cela, il s’entretient avec Churchill (au sujet d’une coopération pour des règlements mondiaux), il négocie avec Staline (pour se prémunir contre l’agression allemande), et surtout il réussit à obtenir du gouvernement américain le droit pour la France de participer à la Commission européenne de Londres, au même titre que l’Amérique, la Russie et la Grande-Bretagne pour réorganiser l’Europe d’après-guerre.
Chapitre 3 : L’ordre
Chapitre 3 : L’ordre
De Gaulle dresse un état des lieux général et fait une nouvelle analyse de la politique intérieure française (qu’il veut remettre en ordre après la victoire). L’économie du pays est catastrophique et des réformes s’imposent : augmentation des salaires, promotion ouvrière. Mais aussi des réformes sociales : allocations sociales, assurances maladie. Le travail doit reprendre pour de Gaulle. Il favorise également la nationalisation de Renault, de l’électricité et du gaz, de l’énergie… C’est aussi la reformation des partis politiques et des oppositions au pouvoir. Les procès se multiplient. La liberté de la presse est favorisée par l’État.
Chapitre 4 : La victoire
Chapitre 4 : La victoire
De Gaulle parle de la victoire et raconte comment, en novembre 1944, le front d’occident lance l’offensive. La 2e DB est commandée par le général Leclerc, elle libère Strasbourg tandis que les Allemands se défendent dans les Ardennes. De Gaulle refuse d’abandonner : l’Alsace est libérée, le lien amical entre américains et français se renforce. De Gaulle décide de franchir le Rhin avec les alliés et dénonce le comportement d’Hitler. Les troupes réussissent à accéder à l’endroit où le Führer s’est retranché. Celui-ci se suicide le 30 avril 1945. L’Allemagne capitule le 8 mai. De Gaulle veut aussi gagner des territoires en Allemagne pour s’affirmer et la France sera de ceux qui participent à la signature des actes de capitulation allemande.
Chapitre 5 : La discordance
Chapitre 5 : La discordance
Les Alliés se démantèlent peu à peu et laissent la place aux ambitions des États : la Grande-Bretagne veut dominer l’Orient. Mais lors des conflits en Syrie et au Liban, De Gaulle s’oppose aux anglais qui exigent la retraite des troupes françaises. Les alliances d’après-guerre s’étiolent peu à peu. Au sein du parti, les désaccords se développent également à ce sujet et on observe une séparation du chef de l’État avec les partis des affaires extérieures. De Gaulle confie ses doutes sur la mission de l’ONU et son désaccord sur la conférence de Potsdam (les accords de Yalta). C’est aussi la période qui signe le désarmement et la dénazification de l’Allemagne. Le président Truman refuse le démantèlement de l’Allemagne en une fédération d’États. Le Maroc et la Tunisie veulent devenir des États libres et modernes. La situation en Indochine est délicate et les troupes françaises arrivent en Indochine. Les États-Unis lancent les bombes atomiques sur le Japon. La capitulation est signée avec le conseil de la France.
Chapitre 6 : La désunion
Chapitre 6 : La désunion
De Gaulle évoque la politique intérieure et les mésententes des partis. Le bilan économique de l’occupation montre que les ressources et les productions sont ruinées. La reconstruction demande des dépenses énormes. La France est affaiblie. De Gaulle est convaincu qu’un État doit être fort, autoritaire et continu et que les soutiens doivent se rassembler et non se diviser dans différents partis. C’est aussi le retour des déportés et des prisonniers. Les responsables de la collaboration sont jugés (dont le maréchal Pétain). De Gaulle veut engager des élections pour élire une assemblée qui soit constituante ou non, le résultat voyant soit l’avènement de la IVe République, soit le retour à la IIIe République. Dans un discours devant l’Assemblée, de Gaulle présente les nouvelles institutions et les structures envisagées.
Chapitre 7 : Le départ
Chapitre 7 : Le départ
De Gaulle discute de la politique extérieure et exprime davantage ses sentiments. Le climat est tendu. De Gaulle remet ses pouvoirs à l’assemblée constituante. Il est réélu président du gouvernement par les députés. La France connaît des difficultés et des grèves (celle des fonctionnaires notamment, que les socialistes soutiennent). De Gaulle réitère son vœu de responsabilité, de stabilité et d’autorité du pouvoir exécutif. La « loi des partis » est présentée, et de Gaulle s’y oppose. Il démissionne le 20 janvier 1946 et se retire à Colombey-les-Deux-Églises. Il se contente désormais du contact simple avec la nature.
« Ce n’est pas tout de reprendre son rang. Encore faut-il être capable de le tenir ».
Chapitre 1 : La Libération « J’ai à répondre du destin du pays devant lui et devant lui seul ».
Chapitre 3 : L’ordre « Comme tout le monde, je constate que, de nos jours, le machinisme domine l’univers. De là s’élève le grand débat du siècle : la classe ouvrière sera-t-elle victime ou bénéficiaire du progrès mécanique en cours ? De là sont sortis, hier, les vastes mouvements : socialisme, communisme, fascisme, qui s’emparèrent de plusieurs grands peuples et divisèrent tous les autres. De là vient, qu’en ce moment, les étendards des idéologies adverses : libérale, marxiste, hitlérienne, flottent dans le ciel des batailles et que tant d’hommes et tant de femmes, emportés par le cataclysme, sont hantés par la pensée de ce qu’il adviendra d’eux-mêmes et de leurs enfants. De là résulte cette évidence que le flot de passions, d’espoirs, de douleurs, répandus sur les belligérants, l’immense brassage humain auquel ils se trouvent soumis, l’effort requis par la reconstruction, placent la question sociale au premier rang de toutes celles qu’ont à résoudre les pouvoirs publics ».
Chapitre 3 : L’ordre « On me prendrait comme j’étais, ou on ne me prendrait pas […] pour guérir la France blessée ».
Chapitre 7 : Le départ