Fiche de lecture
Micromégas, Voltaire
Contexte

Micromégas est une œuvre littéraire typique du siècle des Lumières. Ce nom désigne le XVIIIe siècle, avec ses courants philosophiques et scientifiques libertaires. Les travaux de Newton sur la gravité, de Fontenelle sur la pluralité des mondes ou encore de Locke sur l’empirisme vont avoir une grande influence sur le propos du livre.

Il s’agit d’un des premiers contes philosophiques, genre parfaitement représentatif de cette époque. Voltaire écrira également Candide, Zadig et L’Ingénu. La rédaction de Micromégas se déroule dans un contexte particulier pour Voltaire. Il est en effet à la cour de Prusse depuis quelques années. Si cette période fut au départ un enchantement, des tensions finiront par apparaître, en partie dues aux provocations de Voltaire à l’encontre des autres courtisans et du roi Frederic de Prusse en personne. Il aura néanmoins le temps d’y écrire Le Siècle de Louis XIV et Micromégas.

Personnages

Micromégas : Le héros du conte est un géant originaire d’une des planètes de l’étoile Sirius. Il mesure huit lieues (39 kilomètres), est doté de plus de mille sens et âgé de 670 ans, ce qui est jeune pour son peuple. C’est un jeune très instruit et cultivé. Il est hautain face à la petite taille et la stupidité des humains.
Le muphti : Extrémiste religieux du monde de Micromégas, il conteste les travaux sur l’entomologie de ce dernier, ce qui entraîne son exil. Il est inculte, intolérant et arriéré, ce qui ne l’empêche pas d’avoir une grande influence.
Le nain de Saturne : Secrétaire de l’Académie de Saturne, il s’agit d’un nain pour Micromégas, puisqu’il ne mesure que deux kilomètres de haut. Grand esprit de son monde natal (quoi qu’inférieur au héros), il devient vite un ami de Micromégas et discutera avec lui de l’Univers.
L’amante : Compagne du nain, plus petite que lui, elle est très sensible et pleurera son départ avant de se remettre très vite en couple.
Les hommes : Lorsque Micromégas et le nain arrivent sur Terre, ils font la rencontre d’une expédition au nord de la mer Baltique. Elle est composée d’un physicien, d’un philosophe aristotélicien, d’un disciple de Descartes, d’un disciple de Malebranche, d’un admirateur de Leibniz, d’un « petit partisan » de Locke (que Micromégas apprécie beaucoup) et d’un docteur en théologie de la Sorbonne.

Thèmes

Relativisme : Une bonne part du livre se concentre sur l’idée selon laquelle l’univers repose sur une grande relativité, qu’il s’agisse d’échelle ou de points de vue. Tout est remis en perspective et questionné à un moment ou un autre. Le nom même du héros, et par là même le titre de l’œuvre, y fait référence en associant petitesse (micro) et grandeur (méga).
Science : Le conte philosophique prend pour sujet la science et ses applications. C’est grâce aux lois de la gravitation énoncée par Newton que Micromégas et le nain voyagent de monde en monde. Il est souvent question de concret et d’expérimentation, une démarche hautement scientifique et dans l’air du temps au moment des Lumières.
Religion : En opposition à la science, porteuse de curiosité, la religion repose sur l’obscurantisme et l’intolérances dans ce conte. Les guerres induites par les différents cultes sont pointées du doigt pour leur absurdité. On peut y voir là un écho de la haine manifeste de Voltaire envers le clergé, impulsée par sa terrible éducation dans un lycée de jésuites.
Place de l’Homme : L’Homme est présenté comme un élément secondaire dans la narration. Le conte en appelle à une certaine forme d’humilité : la misère humaine n’est pas bien grande, et est souvent de notre propre responsabilité. Il convient donc de trouver sa place dans l’univers et de s’y tenir.

Résumé

Chapitre 1

Micromégas est une figure contestée en son monde. Le muphti n’apprécie pas ses travaux entomologiques, et le bannit donc de la cour. Le géant décide alors de partir explorer l’univers pour achever sa formation et enrichir ses connaissances. Il se rend sur Saturne, où il rencontre le nain, qui lui fait comprendre que la taille n’est rien comparée à l’intellect.

Chapitre 2

Le nain et Micromégas débattent des différences entre leurs planètes. Il apparaît alors clairement que le nain est inférieur à Micromégas, et pas seulement en taille. Il deviennent néanmoins compagnons de voyage.

Chapitre 3

Les deux amis se rendent sur Jupiter, où ils vont rester un an. Ils veulent publier un livre racontant leur vie sur la planète mais seront pris à partie par les inquisiteurs (des extrémistes locaux). Ils s’en vont alors et se rendent sur Terre, après avoir contourné Mars, jugée inintéressante.

Chapitre 4

En découvrant la Terre, il la pense d’abord inhabitée. Les formes de vie qu’elle abrite sont trop petites pour être observées par les deux géants. Micromégas utilise alors les diamants de son collier comme microscope et découvre plusieurs créatures avant de tomber sur un navire de scientifiques de retour du pôle Nord.

Chapitre 5

Micromégas s’empare du navire et commence à l’étudier comme on le ferait d’un animal. La panique de l’équipage le chatouille, et il découvre les hommes.

Chapitre 6

Une communication s’installe alors entre les géants et les minuscules humains. Ces derniers s’avèrent, contre toute attente, intelligents. Ils connaissent l’astronomie et la physique, et ils arrivent à mesurer la taille des deux voyageurs.

Chapitre 7

Malgré leurs avancées scientifiques évidentes, les humains terrifient les géants en évoquant les guerres et les massacres auxquels leurs semblables s’adonnent. Micromégas les interroge alors tour à tour sur la nature humaine, celle de leur âme. Chacun évoque son système de pensée et voit ses théories démontées par le sirien. Seul le disciple de Locke trouve grâce à ses yeux. Le théologien fait alors une intervention, aussi malvenue que vaseuse, sur le rôle de Dieu dans l’univers et le fait que ce dernier soit uniquement destiné aux hommes, ce qui fait beaucoup rire les géants. Ils décident alors de laisser un cadeau aux érudits avant de les quitter, qui leur permettra de voir les choses d’un œil neuf. Les géants s’en vont et les humains ouvrent le livre : les pages sont vierges.

Citation

« Nous autres, sur notre petit tas de boue, nous ne concevons rien au-delà de nos usages. »

Chapitre 1
« J’ai un peu voyagé ; j’ai vu des mortels fort au-dessous de nous, j’en ai vu de fort supérieurs ; mais je n’en ai vu aucuns qui n’aient plus de désirs que de vrais besoins, et plus de besoins que de satisfaction. »

Chapitre 2
« Notre existence est un point, notre durée un instant, notre globe un atome. À peine a-t-on commencé à s’instruire un peu que la mort arrive avant qu’on ait de l’expérience. »

Chapitre 2
« Nous disséquons des mouches, dit le philosophe, nous mesurons des lignes, nous assemblons des nombres ; nous sommes d’accord sur deux ou trois points que nous entendons, et nous disputons sur deux ou trois mille que nous n’entendons pas. »

Chapitre 6