Du bon usage de la parole

Ce que « parler » veut dire

  • Il existe plusieurs registres de langage, chacun adapté à des situations définies (familier, soutenu, grossier, poétique).
  • Tout langage peut séduire, même le plus grossier. On peut donc se poser la question du sens et de la valeur de la parole. Peut-on tout dire ? Peut-on parler grossièrement ?
  • Rabelais, dans Gargantua donne un exemple de dialogue apparemment grossier entre un père, Grandgousier, et son fils Gargantua.
  • Peut-on faire un tel usage de la parole et parler des choses les plus triviales ?
  • Un écrivain peut-il mettre en scène des personnages discourant longuement sur de telles trivialités ?
  • Le problème de la grossièreté est lié à deux niveaux de la parole : celui des personnages et celui de l’écrivain.
  • Parle-t-on réellement ainsi et peut-on écrire comme si l’on parlait ainsi ?
  • En réalité, on ne parle pas ainsi dans la vraie vie : L’intérêt de la littérature est justement de jouer avec cette illusion de réalité. La grossièreté de la parole de l’écrivain est rendue acceptable par son exagération même. C’est l’exagération qui permet la sublimation littéraire de la grossièreté et de la vulgarité.
  • La parole est éthique parce qu’elle est esthétique. Elle est esthétique parce qu’il s’agit d’une parole écrite.

La manipulation

  • Toute parole n’est pas esthétique du seul fait d’être transcrite par écrit.
  • Edmond Rostand, dans Cyrano de Bergerac, présente la parole de Cyrano dont on ne sait pas, au départ, si elle relève de la manipulation.
  • Cyrano écrit des lettres à Roxanne à la place de Christian : il s’agit d’un mensonge, mais c’est pourtant aussi une parole sincère, puisque Cyrano exprime en réalité son propre amour.
  • Cyrano mourant à la fin de la scène, le tragique de la situation nous fait éprouver de la pitié pour les deux personnages et nous fait oublier qu’un mensonge est à l’origine de cette scène. Ce mensonge est beau, mais c’est tout de même un mensonge.

La critique du mythe de l’inspiration et du génie

  • Le chef-d’œuvre artistique est-il le fruit du génie ou le fruit du travail ?
  • Le dramaturge est-il inspiré par un dieu  ?
  • On trouve chez Platon une distinction importante entre travail rationnel et inspiration divine, Platon – et Socrate – donnant leur préférence à l’œuvre de la raison.
  • Les dieux insufflent l’inspiration dans l’esprit des poètes. Ceux-ci écrivent leur poésie sous l’emprise d’une force surnaturelle, puis les récitent en gardant la ferveur reçue d’en haut, donnant l’impression qu’ils en sont les auteurs.
  • Ils n’ont donc aucun mérite.
  • Si le poète est inspiré, son œuvre n’est pas libre mais il est un élu du dieu.
  • Si le poète est un artiste, alors il n’est pas l’élu d’un dieu mais il est libre.
  • Cependant, le poète fascine toujours.