Les représentations de la mort dans le théâtre

Perspective historique : de la bienséance à la cruauté

  • Le théâtre classique (XVIIe-XVIIIe siècles) a codifié l’écriture dramaturgique et instauré la règle de bienséance qui interdit de montrer des actes violents sur scène.
  • Ce principe a été résumé par Boileau (XVIIe siècle).
  • Cette règle perd de sa pertinence à la fin du XVIIIe siècle puis au cours du XIXe siècle.
  • Au début du XXe siècle, Antonin Artaud propose une nouvelle esthétique : il faut donner au spectacle théâtral une dimension sacrée et provoquer une sorte de transe chez le spectateur.
  • Le théâtre doit se plonger dans les réalités les plus troubles et les plus affreuses.

Le traumatisme historique et métaphysique

  • La deuxième moitié du XXe siècle est marquée par l’émergence du théâtre de l’absurde (Samuel Beckett, Arthur Adamov, Eugène Ionesco, Jean Genet) qui prend racine dans le traumatisme des deux guerres mondiales et les horreurs qu’elles ont engendrées.
  • En attendant Godot présente deux vagabonds qui attendent un mystérieux Godot dont on ne saura rien.
  • Par l’absurde et la pauvreté des moyens, Beckett suggère l’angoisse existentielle et la présence de la mort.
  • Dans Jeux de massacre, Ionesco présente une mort collective : la mort n’est plus une question individuelle, elle agit comme l’élément révélateur d’une situation sociale et politique. Elle a donc une portée historique.

La mort, représentation de l’oppression de la société moderne

  • La représentation de la mort peut également être une manière d’exprimer la dissociation entre l’individu et la société.
  • La pièce de Koltès, Roberto Zucco, repose sur cette dissociation, le meurtre étant la manière la plus radicale d’exprimer le refus de la société.
  • Les Bonnes, de Jean Genet, repose sur une folie similaire. L’effacement de la frontière qui sépare le théâtre de la réalité donne d’autant plus de poids à la représentation dramaturgique de la mort.
  • Le théâtre contemporain rend également compte d’un autre rapport entre la société et la mort : rien n’empêche la société de régenter les hommes, même la mort.
  • C’est le sujet de la pièce d’Asja Srnec Todorovic, Mariages Morts : la mort est un phénomène social, si bien que l’expérience la plus irréductiblement individuelle, la plus intime, est en même temps entièrement contrôlée et gérée par les normes sociales et administratives.