La rage de l'expression, Francis Ponge

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Saisir l’insaisissable

  • L’œuvre de Ponge questionne la faculté de la littérature à désigner notre environnement. Elle nous rappelle sans cesse que les mots sont des outils peu fiables, car ils sont soumis à l’interprétation. En en les utilisant le plus rigoureusement possible, il semble possible de se tenir au plus près des hommes et du monde, à défaut de les comprendre absolument.
  • Selon Ponge, il faut savoir changer de style et s’écarter des cénacles littéraires. Toute sa vie, il rompt avec les attaches intellectuelles qu’il s’évertue d’abord à créer. Il n’hésite pas à comparer son travail à celui d’un peintre.
  • Dans ses métamorphoses, participations à la vie littéraire autant que retraits dans la solitude de l’écriture, il trouve un équilibre qui lui donne l’énergie d’explorer frénétiquement les potentialités du langage. Il laisse derrière lui un nombre considérable de textes.
  • Ce mouvement constant de la pensée qui le conduit à rejeter toutes les formules qui pourraient l’enfermer dans une esthétique ou dans un camp idéologique le conduit à se désintéresser de la notion de poème. À ses yeux, il ne faut pas vouloir écrire de la poésie, il vaut mieux se laisser surprendre par le monde.
  • La rage de l’expression montre que le poète ne cherche pas à pétrifier son expression (« L’homme et les choses », Sartre, 1944), mais à trouver le mot juste.
  • Pour Ponge, la contrainte est une invitation à se dépasser, et la focalisation sur un objet du quotidien est une manière d’aiguiser notre regard sur ce qui nous entoure.

Une prose qui réveille son lecteur

  • Ponge est un écrivain qui se débat avec les mots autant qu’avec sa propre perception. Pour autant, dans La rage de l’expression, le poète inclut pleinement son lecteur dans sa démarche créative.
  • Son journal poétique est comme un journal de bord. Il dévoile une méthode, c’est-à-dire un chemin emprunté pour parvenir à dérouler une démonstration.
  • La poésie de La rage de l’expression est une poésie de l’interpellation. Chaque carnet est à lire comme un nouveau moyen de montrer les coulisses de la création au lecteur pour l’inciter à s’engager dans le monde.
  • Le recueil est comparable à une poupée russe. Tout est question d’enchâssements, de successions par couches, d’expérimentations.
  • Dans l’atelier du poète, qui s’adonne aux associations les plus inattendues, le phénomène de fabrication est toujours en cours. Il fait grand cas de l’utilisation du dictionnaire (le Littré). C’est son guide dans la forêt infinie du langage.
  • La rage de l’expression n’est cependant pas un traité scientifique, un herbier ou un dictionnaire. Certes, Ponge utilise la démarche d’observation scientifique, mais pour la mettre au service du déploiement d’impressions esthétiques.
  • Pour Ponge, se tourner sur des choses naturelles toutes simples (la faune et la flore) est une façon d’afficher une forme d’humanisme.
  • S’acharner à parler du monde tel qu’il est, dans ses moindres détails, revient à révéler une des forces de l’homme : sa faculté à observer et à comprendre. En explorant sa propre faculté de vision, Ponge espère nous révéler la nôtre.
  • Le « je » de La rage de l’expression a confiance en nos possibilités. Sa position est clairement antireligieuse et s’élève même contre tout ce qui pourrait s’assimiler à une sorte de fanatisme clérical, philosophique ou politique. La seule philosophie qu’il revendique est celle des Lumières du dix-huitième siècle.
  • Il faut avoir à l’esprit que Ponge écrit ces textes en pleine Seconde Guerre mondiale, tandis qu’il est agent de liaison pour la Résistance entre 1939 et 1944, sauf pour les « Notes prises pour un oiseau » (1938). Écrire sur des plantes et des animaux n’est donc pas un délassement, mais un moyen de survie.
  • Ponge ne sépare pas l’action politique de l’écriture poétique. Son hypothèse et que nous pouvons devenir meilleurs en acceptant de nous fondre dans les formes d’un objet, car ainsi nous découvrons la fragilité des choses et d’autrui. Dès lors, nous chercherions à protéger le monde et non plus à le jeter dans la brutalité.
  • Le chemin poétique emprunté par Ponge est donc un chemin de réconciliation entre les hommes.