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Quels sont les processus sociaux qui conduisent à la déviance ?
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Introduction :
L’individu est confronté en permanence à des normes formelles, comme les lois, et informelles, comme la manière de saluer par exemple. Le respect de ces normes permet aux individus de mettre leur comportement en conformité avec les attentes de la société, ce qui crée et maintient le lien social entre les individus. Le contrôle du respect de ces normes est réalisé de manière permanente que ce soit par la société, au travers des institutions qu’elle met en place, ou directement par les membres de la communauté. Cependant, certains individus ne se conforment pas au respect de ces normes, ce qui conduit à des comportements déviants que la société cherche à prévenir ou à corriger.
Ce cours va nous permettre de définir ce qu’est en sociologie la déviance, puis nous verrons que les actes déviants peuvent provenir d’une difficulté d’intégration dans le groupe, d’un étiquetage stigmatisant ou bien être le produit d’interactions sociales.
Qu’est-ce que la déviance ?
Déviance :
La déviance représente la transgression d’une norme sociale, qui est sanctionnée par la société. La déviance se définit donc à travers deux critères : la transgression de la norme et la sanction de l’individu.
La plupart des actes de déviance sont de faible importance pour le groupe (comme par exemple parler en classe), mais d’autres peuvent porter une atteinte grave au groupe (comme par exemple le terrorisme).
La déviance est un phénomène relatif car elle évolue au cours du temps et en fonction des sociétés. En effet, elle est liée à la transgression d’une norme, or celle-ci peut évoluer au fil du temps et les sociétés peuvent imposer à leurs membres des normes différentes.
Dans la notion de déviance, on part du principe que certains comportements sont considérés comme « normaux » pour le groupe et que d’autres dévient de la normalité. La normalité peut revêtir deux sens en sociologie. Le comportement normal est à la fois celui qui respecte la morale commune et celui qui se rencontre avec une certaine fréquence dans une société.
La déviance peut résulter de la transgression de coutumes ou de la transgression de lois. Dans ce dernier cas, il s’agit d’un comportement délinquant qui peut être :
La déviance comme résultat de difficultés d’intégration : l’anomie
Anomie :
Le sociologue français Émile Durkheim, dans son ouvrage Le Suicide en 1897, définit l’anomie comme étant la situation dans laquelle « il y a déficience de règles sociales communément acceptées, de sorte que les individus ne savent plus comment orienter leur conduite ».
En d’autres termes, la société donne des normes et des valeurs qui permettent à l’individu d’orienter ses comportements. On parle d’anomie lorsqu’il y a perte, affaiblissement ou confusion de ces règles sociales : dès lors, l’individu va perdre ses repères et peut être conduit à commettre un acte déviant.
Durkheim utilise la notion d’anomie pour expliquer le taux de suicides dans une société. Il part du principe qu’un individu ne peut être heureux et ne peut vivre que « si ses besoins sont suffisamment en accord avec ses moyens ». Or, les besoins étant illimités, la société va devoir jouer le rôle de modérateur entre les besoins et les moyens. La société peut jouer ce rôle car elle a « un pouvoir moral supérieur à l’individu ». En conséquence, en imposant des normes, la société rend les besoins des individus conformes à leurs moyens, ce qui permet aux individus de vivre et d’être heureux.
Durkheim constate que la religion peut jouer un rôle dans le taux de suicides, non en raison des valeurs religieuses qu’elle transmet, mais parce qu’elle crée une solidarité dans le groupe social, qui joue le rôle de régulateur des désirs individuels. De même, pour Durkheim, la famille peut jouer le rôle de régulateur, et il constate ainsi que le taux de suicide est plus faible pour les femmes qui ont des enfants que celles qui n’ont pas d’enfant.
Dans cette optique, lorsque le contrôle social s’affaiblit (anomie) et donc que la société ne joue plus son rôle régulateur, le taux de suicides augmente. En effet, les besoins des individus n’étant plus régulés, il se crée un décalage entre ceux-ci et les moyens dont disposent les individus pour les satisfaire. Ce décalage génère de la souffrance chez l’individu, souffrance qui peut l’amener au suicide.
Durkheim met également en évidence le rôle de la croissance économique dans le taux de suicides. Selon lui, lors de crises économiques ou de croissance économique très importante, le taux de suicide augmente. Ces évènements perturbent l’équilibre de la société et augmentent l’instabilité des individus, qui ne peuvent plus réguler leurs désirs. Leur insatisfaction augmente alors. En effet, lors d’une crise, les moyens dont disposent les individus baissent brusquement, et lors d’une forte croissance, leurs aspirations augmentent plus vite que leurs moyens. Cette situation crée un décalage entre les besoins et les moyens. Dans ces circonstances, le contrôle social doit jouer le rôle de régulateur entre les aspirations et les moyens.
Une étude publiée en 2013, dans le British Medical Journal, montre que la crise de 2008 a provoqué en 2009 une augmentation des suicides de 4,2 % pour les hommes et 0,3 % pour les femmes.
Cette justification au travers de la notion d’anomie des comportements déviants ne permet cependant pas d’expliquer tous les actes déviants. Prenons un exemple : la perte de repères (anomie) est actuellement une justification souvent avancée pour expliquer les comportements déviants des jeunes. On considère que le recul de l’encadrement familial, la « démission parentale », entraîne une augmentation de la déviance. Cependant, cette justification ne permet pas à elle seule d’expliquer les comportements déviants. En effet, d’autres facteurs interviennent comme par exemple les conditions économiques des jeunes. De plus, une étude parue en 2000 montre qu’il n’y a pas de lien direct entre les bouleversements de la famille (divorce, familles monoparentales ou recomposées) et les comportements délinquants ou violents. Selon cette étude, il y a une exception à cela : la consommation de drogues dites douces, qui tend à augmenter lorsque le jeune subit un bouleversement familial important ou que le contrôle parental se réduit.
La déviance comme résultat d’interactions sociales : l’étiquetage stigmatisant
Une action n’est considérée comme déviante que si elle est reconnue comme telle par la société et sanctionnée. En d’autres termes, la déviance dépend du regard que porte la société sur l’action de l’individu. De ce fait, le comportement déviant est relatif, il dépend de la société dans laquelle il se déroule.
Ainsi, fumer de la marijuana est un acte déviant en France, car considéré comme tel par la société et puni. Cependant, ce même acte n’est pas considéré comme déviant si la personne fume dans un coffee shop aux Pays-Bas, puisque cela est légal.
À partir de ces considérations, le sociologue américain Howard Becker développe l’idée selon laquelle la déviance est une construction sociale. Selon l’auteur, ce n’est pas la transgression de la norme qui crée la déviance, mais le fait pour le groupe de qualifier certains individus comme déviants. En commettant un acte considéré comme déviant, l’individu va être stigmatisé par le groupe, il va être étiqueté comme déviant.
Étiquetage :
L’étiquetage désigne l’opération par laquelle on attribue une identité déviante à un individu et on désigne comme déviant l’acte commis par celui-ci.
Becker réalise une typologie du rapport à la norme, en distinguant quatre types d’individus en fonction de leurs comportements et de l’étiquette qui leur est assignée :
Becker montre que le fait d’étiqueter un individu peut avoir pour conséquence la répétition de l’acte déviant, et il distingue deux types de déviances :
Les deux types de déviance selon Howard Becker
En utilisant ces distinctions, Becker décrit la carrière déviante de l’individu :
Conclusion :
La déviance est la transgression d’une norme, elle est sanctionnée par un contrôle social. Pour Durkheim, le comportement déviant provient d’un affaiblissement du contrôle social, qui ne permet plus à l’individu de mettre en adéquation ses besoins avec ses moyens. Pour Becker, la personne déviante est celle qui est étiquetée comme telle par la société.