Cours Solidarité et fraternité
Introduction
« Liberté, égalité, fraternité » sont les mots qui forment la devise de la République française. Ces trois valeurs font référence à des idéaux que nous devons chercher à atteindre pour construire une société plus juste et démocratique.
Nous pouvons définir la fraternité comme un projet de société où chacun se sentirait responsable mais aussi interdépendant des autres, favorisant ainsi l’unité et la justice entre les citoyens. La solidarité a un sens plus concret. Elle peut être considérée comme un ensemble d’attitudes et de comportements qui permettent de venir en aide et de soutenir autrui, notamment dans les moments difficiles.
Dans un monde de plus en plus individualiste, fragilisé par de nombreuses crises économiques, diplomatiques et sanitaires, la solidarité devient un pilier essentiel de la cohésion sociale. Nous verrons comment elle peut s’exprimer au sein de la société française afin de construire une nation plus fraternelle.
Après avoir étudié dans une première partie la manière dont l’État s’empare de la solidarité et de la fraternité dans ses politiques publiques, nous analyserons l’action des associations en lien avec le principe de solidarité. Enfin, nous aborderons la question de l’engagement citoyen en faveur d’une société plus solidaire.
Cohésion sociale :
Unité d’une société, fondée sur la solidarité, l’égalité, le respect et l’intégration de tous.
Nation :
Groupe humain uni par une histoire, une culture, une langue, des valeurs communes et partageant un territoire.
La solidarité et la fraternité incarnées par l’État
La solidarité et la fraternité incarnées par l’État
À la Libération, la France cherche à reconstruire une société plus juste. Le gouvernement provisoire de la République française (GPRF) crée en 1945 la Sécurité sociale afin d’assurer à tous les citoyens une protection contre les principaux risques de la vie.
Ambroise Croizat, cofondateur de la Sécurité sociale en France
Depuis, l’État continue de jouer un rôle central dans l’organisation de la solidarité nationale.
Selon une logique d’assurance, il organise la protection sociale afin de faire face aux risques liés, par exemple, à la maladie ou à la perte d’emploi.
Par exemple, un salarié, lorsqu’il est licencié, perçoit des allocations chômage et peut bénéficier d’une formation professionnelle pour acquérir de nouvelles compétences et augmenter ses chances de retrouver un emploi.
En suivant une logique d’assistance cette fois, l’État attribue des prestations sociales afin de protéger les populations les plus fragiles.
Par exemple, la caisse d’allocations familiales (CAF) verse l'aide aux adultes handicapés (AAH) aux personnes en situation de handicap afin de leur permettre de bénéficier d’un revenu minimum pour favoriser leur inclusion au sein de la société.
Prestations sociales :
Aides financières versées par l’État pour protéger les individus contre les différents types de risques : handicap, maladie, chômage, vieillesse, précarité, pauvreté.
La logique d’assurance repose sur la cotisation préalable : chacun verse une contribution pour se protéger contre des risques (maladie, chômage, perte d’autonomie) auxquels il pourrait être confronté. Cette cotisation correspond à un impôt directement prélevé sur le salaire. Seules les personnes ayant cotisé peuvent en profiter.
©Assurance Maladie – CC BY-SA 4.0
La logique d’assistance, elle, relève de la solidarité nationale : elle aide les personnes fragiles ou en difficulté sans condition de cotisation, selon leurs besoins et leurs ressources. Il s’agit par exemple de l’aide personnelle au logement (APL) qui permet à plusieurs millions de personnes de disposer d’un logement décent pour eux et leur famille.
©Caisse nationale d’allocations familiales – Marque déposée
De plus, l’État coordonne les services publics afin de réduire les inégalités, d’assurer la cohésion sociale et de répondre aux besoins collectifs de la population sur l’ensemble du territoire.
Comme indiqué dans l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ainsi que dans le préambule de la Constitution de 1946, cette solidarité nationale est organisée et garantie grâce à l’impôt (payé par les citoyens) et aux cotisations sociales (payées par les travailleurs et les entreprises).
Ainsi, la scolarité dans un établissement public est gratuite et obligatoire jusqu’à 16 ans. Les salaires des enseignants sont entièrement financés par l’État. Au nom du principe de solidarité et de l’égalité des chances de réussite, des bourses scolaires sont également proposées aux familles à faibles revenus pour faire face aux dépenses liées à la scolarisation (transport, achat de fournitures scolaires, etc.). Les établissements scolaires disposent également de fonds sociaux afin d’aider les familles confrontées à des difficultés financières.
Lors de crises récentes, l’État a pu intervenir plus fortement encore pour exprimer la solidarité de la nation, notamment envers les personnes les plus vulnérables. Pendant la crise sanitaire du Covid-19, entre 2020 et 2022, des milliards d’euros ont été mobilisés pour soutenir les entreprises, financer le chômage partiel et accélérer l’accès à la vaccination.
Aux côtés de l’État, les collectivités territoriales (communes, départements et régions) jouent un rôle très important pour renforcer la cohésion nationale du pays. Par exemple, ce sont les départements qui versent le RSA. Ils jouent également un rôle-clé dans la protection de l'enfance en lien avec les services sociaux et judiciaires.
Fonds sociaux :
Aides financières attribuées aux familles en difficulté, pour favoriser l’égalité des chances des élèves, notamment en finançant repas, transports ou achat de fournitures.
RSA (Revenu de solidarité active) :
Aide financière qui garantit un revenu minimum aux personnes sans ressources ou à faibles revenus, afin de favoriser leur insertion sociale et professionnelle.
Services publics :
Activités d'intérêt général assurées par l’État ou les collectivités, visant à garantir l’accès aux besoins essentiels comme la santé, l’éducation, la sécurité et le transport.
L’État ainsi que les collectivités territoriales jouent un rôle central dans l’organisation de la solidarité nationale à travers les services publics et les prestations sociales, financés par l’impôt et les cotisations sociales, afin de réduire les inégalités et soutenir les plus fragiles.
Les associations, des acteurs majeurs de la solidarité
Les associations, des acteurs majeurs de la solidarité
Le secteur associatif joue également un rôle fondamental pour faire vivre le principe de solidarité au quotidien. La France compte plus d’un million d’associations dont environ 130 000 associations qui s’engagent pour aider, conseiller ou soigner. Elles agissent auprès de personnes souvent démunies, malades ou en situation de handicap.
Des structures comme Emmaüs, les Restos du Cœur ou la Croix-Rouge s’engagent dans des actions concrètes d’aide alimentaire, de logement ou de soutien psychologique.
Logo des Restos du Cœur ©Restos du Cœur – Marque déposée
Pour fonctionner, ces associations ont besoin de dons effectués par des individus ou des entreprises. Elles peuvent également bénéficier de subventions de la part de l’État et des collectivités territoriales (communes, départements, régions). Elles s'appuient aussi sur les dizaines de milliers de bénévoles qui s'engagent auprès d'elles chaque année.
Le Secours populaire français est une association créée en 1945 qui lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Par des actions concrètes, elle agit en France pour promouvoir la solidarité et l’entraide. Grâce à plus de 90 000 bénévoles, elle apporte une aide alimentaire, matérielle et éducative aux personnes en difficulté.
Logo du Secours populaire français ©Pierre Bernard, groupe Grapus – Marque déposée
Les associations et ONG contribuent grandement à faire vivre le principe de solidarité en France en venant en aide aux plus démunis, grâce au soutien financier et à la bonne volonté de nombreux citoyens. Elles permettent à la société civile de compléter les dispositifs publics.
ONG (Organisation non gouvernementale) :
Structure d'utilité publique, à but non lucratif, indépendante financièrement et politiquement.
Société civile :
Citoyens, associations et ONG agissant indépendamment de l'État pour défendre des intérêts communs et faire vivre le principe de solidarité.
L’engagement citoyen, moteur de la fraternité
L’engagement citoyen, moteur de la fraternité
La solidarité se vit d’abord et avant tout à travers des gestes simples du quotidien.
Le don du sang est un acte emblématique de solidarité : il est gratuit, volontaire et anonyme. Chaque donneur sait qu’il aide d’autres personnes à se soigner, sans jamais connaître l’identité du bénéficiaire. Toutefois, depuis plusieurs années, le ministère de la Santé souligne une baisse inquiétante du nombre de dons et a rappelé l’importance de cet acte altruiste.
Personne donnant son sang lors d'une collecte à Carpentras ©Marianne Casamance – CC BY-SA 4.0 (à gauche) / L’établissement français du sang organise la collecte de dons de sang sur le territoire français. Les camions permettent d’aller directement au contact des personnes en leur évitant de se rendre dans un centre médical ou hospitalier. ©Sebleouf – CC BY-SA 4.0 (à droite)
La solidarité s’incarne également dans les relations de voisinage, les réseaux de soutien, les mobilisations locales. Ces formes d’entraide ne passent pas par l’État ou les associations : elles relèvent de la solidarité de proximité.
Durant les confinements liés à l’épidémie de Covid-19, de nombreux citoyens ont spontanément proposé leur aide aux personnes âgées ou invalides pour faire leurs courses, aux parents pour garder les enfants ou simplement aux personnes seules, pour briser l’isolement.
La jeunesse s’engage également, particulièrement dans des actions de solidarité à l’échelle locale.
Au printemps 2025, des élèves du lycée Gutenberg de Créteil ont organisé une collecte de produits d’hygiène à destination des femmes vivant dans des situations de grande précarité. Ce projet a été mené au bénéfice de l’association ADSF (Agir pour la santé des femmes).
Enfin, la perception du principe de solidarité a été modifiée ces dernières années à la suite de l’affaire « Cédric Herrou ». En 2016, cet agriculteur du sud-est de la France a aidé 150 migrants à franchir la frontière franco-italienne. Arrêté puis poursuivi en justice pour délit de solidarité, il fut condamné en 2018 à une amende et quatre mois de prison pour être venu en aide à des personnes se rendant illégalement sur le territoire français. Son cas a suscité de vifs débats. Saisi de la question, le Conseil constitutionnel a finalement acté le 6 juillet 2018 que le principe de fraternité avait une valeur constitutionnelle. Il reconnaît donc qu'aider autrui, même en situation irrégulière, ne doit pas être puni lorsqu’il s’agit d’un acte désintéressé (pour ne pas être confondu avec l'activité des passeurs qui font entrer des personnes en situation irrégulière sur le territoire contre de l'argent).
Cédric Herrou ©ShannaX – CC BY-SA 4.0
Conseil constitutionnel :
Institution française chargée de veiller au respect de la Constitution. Il contrôle la conformité des lois, supervise les élections et garantit les droits fondamentaux des citoyens.
Acte désinteressé :
Acte accompli gratuitement et sans contrepartie, avec l'unique intention de bien agir.
Conclusion
La solidarité et la fraternité sont les piliers d’une société unie, démocratique et juste. En France, cela se traduit concrètement à travers l’action de l’État, d’associations, d’ONG et de nombreux citoyens.
Dans un monde marqué par des crises sanitaires, économiques et climatiques, ces actions nous rappellent combien la coopération et l’entraide sont essentielles pour préserver la cohésion sociale et surmonter nos divisions pour mieux vivre ensemble.