Juste la fin du monde - Partie 2

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Confrontations fraternelles et sororales

  • Dans une longue tirade (première partie scène 3) Suzanne multiplie les reproches à l’encontre de son frère.
  • Toute la scène 3 de la première partie est consacrée à ce soliloque qui est un véritable réquisitoire.
  • Sa récitation est un monologue pour elle-même et des juges invisibles.
  • La tournure « ce n’est pas bien » est une litote, mais en même temps assénée à plusieurs reprises avec le procédé d’anaphore.
  • Suzanne laisse entendre que Louis aurait honte de sa famille qu’il n’estime pas assez pour leur envoyer des textes aussi profonds que ceux qu’il écrit pour son travail.
  • Par sa différence et sa supériorité, par le fait qu’il a osé quitter le cercle familial, Louis est en quelque sorte un fils prodigue qui a pétrifié les autres, les empêchant de se rebeller à leur tour.
  • Dans la même veine, Antoine reproche à son frère de vouloir appartenir à un autre groupe social que celui de sa famille.
  • Pour autant, il refuse de jouer le jeu et de traiter Louis en supérieur.
  • Au contraire, il cherche plutôt à le rabaisser en le présentant comme un être fragile, qu’il a toujours fallu protéger : « Je cédais, je devais céder, j’ai toujours dû céder » (deuxième partie scène 3).
  • C’est aussi un rapport complexe à l’autorité qui explique le conflit entre les deux frères.
  • Le retour du frère aîné menace l’hégémonie d’Antoine qui avait endossé, en l’absence du père, le rôle du patriarche.

Le dérisoire et le capital

  • La relation complexe qu’entretient Louis avec son frère et sa sœur prépare des scènes de crises.
  • Au cours de ces scènes, le sujet de la mort prochaine de Louis sera toujours éludé.
  • Une scène d’antagonisme révélatrice entre Louis et son frère a lieu à la fin de la première partie (scène 11).
  • Alors que l’aveu pourrait enfin se faire, Antoine s’emporte et se lance dans une interminable logorrhée, réduisant Louis au silence.
  • Antoine refuse la confrontation avec son frère, il ne veut pas que celui-ci lui dévoile quoi que ce soit.
  • Il se sentirait trop dominé si Louis reprenait la parole.
  • C’est le personnage de la mère qui donne le plus d’indications involontaires sur les raisons du départ de Louis il y a des années.
  • Elle accuse ouvertement Louis de ne pas assumer ses responsabilités de fils aîné envers son frère et sa sœur.
  • Son discours condense les regrets familiaux et laisse parfois échapper une partie de la vérité sur le départ de son fils aîné.
  • Il faut voir derrière les circonvolutions du conflit, un moyen de détourner le regard des protagonistes (mais pas du spectateur) de la menace de mort qui pèse sur eux depuis le retour de Louis.
  • Ce jeu avec la mort, entre dérisoire et gravité, ne préjuge pas du ton de la pièce ou de ce qu’il est possible de faire avec les répliques que s’échangent les personnages.

Mettre en scène le conflit

  • Lagarce écrit un théâtre de l’intime, c’est-à-dire un théâtre qui parle de la vie intérieure profonde.
  • Pour autant, il s’adresse à une communauté de lecteur·rice·s ou spectateur·rice·s.
  • N’est-ce d’ailleurs pas le propre du théâtre que de faire vivre une expérience partagée à tout un groupe de personnes, en même temps ? Or, la mort est un sujet universel.
  • Sous couvert de ce thème universel, le dramaturge dresse un portrait au vitriol des relations de pouvoir qui régissent la famille.
  • L’impossibilité à se dire les choses au sein de la famille revient à pratiquer la censure et l’autocensure.
  • Cette question de la surveillance perturbe la construction de l’identité des individus, mais plus largement encore, questionne la possibilité de vivre ensemble en toute confiance.
  • Tous ces conflits sur lesquels repose le drame et qui font la dynamique des échanges entre les personnages sont de véritables défis lancés aux metteur·se·s en scène.
  • Il arrive qu’une pièce donne de nombreuses indications de jeu, de décor ou d’action mais ce n’est pas le cas de Juste la fin du monde.
  • Les didascalies et autres informations de mise en scène sont absentes de la pièce de Jean-Luc Lagarce.
  • Les metteur·se·s en scène doivent donc redoubler de finesse et exceller dans l’art de la scénographie pour rendre visible les non-dits.
  • On peut retenir à ce titre le nom de Michel Raskine qui permit à la pièce d’entrer au répertoire de la Comédie-Française à Paris en 2008.
  • Au théâtre, même la plus autobiographique des pièces devient une œuvre collective. Cette dimension politique, au sens qu’elle est partagée par tous, ne tient pas seulement au contenu de la pièce qu’aux conditions de sa représentation. Jean-Luc Lagarce tenait à ce que Juste la fin du monde soit adressée au public pour le pousser à s’interroger sur qui il est.