Les réformes religieuses

Introduction :

À la fin du Moyen Âge, l’Église catholique est dominante en Europe occidentale. Mais elle est remise en cause par plusieurs religieux. Ils estiment que certaines pratiques de l’Église sont en contradiction avec le message de simplicité de Christ. Cependant, au début, ils restent fidèles à l’autorité du Pape.

Au début du XVIe siècle, un moine allemand, Martin Luther, va affronter l’Église avec le soutien des princes allemands. Devant le refus de réformer de la part de l’Église, ce moine va proposer une nouvelle vision du christianisme, en opposition au catholicisme de Rome. Ce schisme (séparation), va entrainer l’Europe dans un conflit religieux majeur à la fin du siècle : les guerres de religion, divisant ceux qui resteront fidèles à l’Eglise catholique et ceux qui adopteront le Protestantisme (en rapport à ceux qui s’opposent au Pape et à L’Eglise).

Nous verrons dans ce cours les raisons de la contestation de l’autorité ecclésiastique à la fin du Moyen Âge, et les prémices de rébellion à son encontre au cours du XVe siècle. Nous nous intéresserons ensuite à la Réforme et à ses principaux meneurs, Luther et Calvin. Enfin, nous terminerons par les conséquences de la Réforme en Europe, aboutissant aux guerres de religion et à la Contre-Réforme catholique.

L’Église catholique, une autorité contestée à la fin du Moyen Âge

L’Église et les indulgences

À la fin du Moyen Âge, la papauté a perdu beaucoup de pouvoir et d’influence au profit des rois. L’Église est soumise au cours du XIVe siècle au pouvoir du roi de France, qui contraint le pape à s’installer à Avignon (1309-1418), afin de mieux le contrôler.
L’institution ecclésiastique est à cette époque pervertie par la corruption : de nombreux évêques sont nommés dans l’entourage des rois sans qu’ils ne soient religieux, et n’occupent leurs charges que pour en tirer des revenus. Leurs comportements sont à l’opposé de ceux prêchés par l’Église : ils vivent avec des concubines (ils vivent avec des femmes sans être mariés), dans le luxe. L’Église se sert de sa position dans la société pour s’enrichir : elle promet aux pauvres gens le pardon de leurs péchés en échange d’argent. Les religieux abusent alors du commerce des indulgences qu’ils vendent à prix d’or.

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Définition

Indulgence :

Dans la religion chrétienne, une indulgence est un pardon total ou partiel des péchés accordés par l’Église.

Les papes successifs ne dérogent pas à ces pratiques (certains ont même eu des enfants), et se servent du commerce des indulgences pour se faire construire des palais somptueux.

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Exemple

Alexandre Vi - SchoolMouv - histoire -2de Portrait du pape Alexandre VI Borgia par Cristofano dell’Altissimo

Pape Jules II - SchoolMouv - Histoire - 2de Portrait du pape Jules II peint par Raphael, 1511

C’est notamment le cas du pape Alexandre VI Borgia (1492-1503) qui se sert de sa position de pontife (Pape) pour créer un royaume pour son fils, César Borgia. On peut citer également Jules II (1503-1513), qui devient le plus grand mécène des artistes de la Renaissance, dépensant les deniers de l’Église dans l’embellissement de ses palais.

À l’époque, critiquer publiquement le pape est interdit. Il est protégé par une institution, l’Inquisition, qui restreint la liberté d’expression et les critiques à son égard. Les contestataires sont accusés d’hérésie (opinions qui vont à l’encontre de l’Église), jugés et peuvent être condamnés à mort.

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Définition

Inquisition :

Institution dépendante de l’Église catholique qui enquête et juge les hérétiques, c’est-à-dire ceux qui ont des comportements et des pratiques différentes de la norme religieuse.

Hus et Savonarole, des voix contre Rome (1408-1498)

Les critiques envers l’Église et la dénonciation des pratiques immorales des ecclésiastiques commencent dès le début du XVe siècle.

En 1408, en Bohême (région faisant aujourd’hui partie de la République Tchèque, en Europe de l’est), le théologien (spécialiste de la religion) Jan Hus dénonce la corruption du message de la Bible par les autorités religieuses et le trafic des indulgences. Charismatique, Hus rassemble derrière lui de nombreux partisans, les hussites, mais doit faire face à l’institution ecclésiastique.

Portrait de Jan Hus - SchoolMouv - histoire - 2de Portrait de Jan Hus

Piégé par l’Église qui l’invite à venir défendre ses thèses au Concile de Constance en 1414, Jan Hus est arrêté et condamné pour hérésie. Il sera brûlé sur le bucher quelques mois plus tard, déclenchant une révolte de la Bohême et des hussites, indignés par la réaction de l’Église. Les guerres hussites prennent fin en 1434, mais la population reste méfiante à l’égard de l’Église.

En Italie, la contestation de l’autorité pontificale est incarnée par Jérôme Savonarole, un moine dominicain florentin. Au terme d’une révolution à Florence en 1494, Savonarole prend la tête de la ville et établit une république théocratique.

Portrait de Jérôme Savonarole - histoire - 2de - SchoolMouv Portrait de Jérôme Savonarole par Fra Bartolomeo, vers 1498

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Définition

République théocratique :

République dirigée par des religieux et se fondant sur le livre saint pour la rédaction des lois.

Convaincu de l’imminence de la fin du monde, Savonarole dénonce le pape Alexandre VI, le désignant comme l’antéchrist.

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Définition

Antéchrist :

Ennemi du Christ qui, selon l’Apocalypse (dernier livre du Nouveau Testament), viendra prêcher une religion hostile peu avant la fin du monde.

Il estime que la corruption a gagné non seulement les religieux, mais aussi les fidèles. C’est pourquoi il ordonne le bûcher des vanités, des autodafés (destructions par le feu) publics au cours desquels les Florentins sont invités à se débarrasser de leurs objets et vêtements de luxe, ainsi que de leurs livres. La conduite excessive et intransigeante de Savonarole entraîne sa chute : il est capturé par des opposants qui le livrent au tribunal de l’Église. Après avoir été torturé, Savonarole est brûlé sur la place de Florence en 1498.

Jérôme Savonarole brûlé sur le bucher à Florence en 1498 - SchoolMouv - histoire - 2de
Jérôme Savonarole brûlé sur le bucher à Florence en 1498. Anonyme, vers 1650, Musée San Marco, Florence

Luther et les fondements de la Réforme

Luther et Calvin

Martin Luther - SchoolMouv - Histoire - 2de Martin Luther par Lucas Cranach l’Ancien, 1528

En 1517, un moine allemand, Martin Luther, affiche sur la porte de son église un document contenant 95 thèses condamnant les dérives de l’Église et appelant à des réformes profondes de l’institution. Ce document est imprimé en plusieurs exemplaires et envoyé dans les différentes paroisses d’Allemagne. Il provoque intérêt et indignation.

Le pape condamne Luther et lui demande de se rétracter (revenir sur ses déclarations). Mais celui-ci est protégé par les princes allemands qui voient dans ses thèses un moyen de s’émanciper (de se libérer) de la tutelle du pape et de l’empereur. Si ce dernier, Charles Quint, est dans un premier temps tolérant vis-à-vis des princes et de Luther, il finit par les obliger en 1529 à se soumettre sans condition à l’Église de Rome.

  • Mécontents, les partisans de Luther prennent le nom de protestants pour s’opposer à l’intransigeance de l’Empereur et du pape et s’unissent pour leur faire face.

Jean Calvin - Histoire - 2de - SchoolMouv Jean Calvin, artiste inconnu, XVIe siècle

Le mouvement protestant se développe également en France. En 1534, le théologien Jean Calvin y prêche une nouvelle approche de la religion chrétienne, en opposition avec la papauté de Rome. Bien que se rapprochant de celui de Luther, le culte proposé par Calvin est différent sur de nombreux aspects. Craignant les persécutions religieuses et les poursuites de l’Inquisition, Calvin quitte la France pour s’installer à Genève, où il convertit la population à son dogme : le calvinisme. Son installation en Suisse n’a rien de surprenant car le pays est en effet l’un des plus tolérant vis-à-vis de la réforme protestante. De plus, Zurich est depuis les années 1520 un des hauts lieux du protestantisme, avec à sa tête le réformateur Ulrich Zwingli.

Les étapes de la Réforme

Au XVIe siècle, le mouvement protestant prend le nom de Réforme. Cette dernière est en opposition avec l’Église en tant qu’institution, mais également avec les pratiques du clergé romain et son approche de la religion.

Les contestations de l’autorité pontificale ne sont pas nouvelles. Cependant, le contexte du début du XVIe siècle favorise le développement de ce mouvement de grande ampleur : les nouvelles traductions de la Bible permettent aux théologiens de se rapprocher des écrits originels du livre saint et d’en écarter les erreurs. De plus, l’imprimerie favorise la propagation des thèses des protestants.

Luther utilise cette nouvelle technique pour diffuser ses thèses. Et pour permettre la diffusion de sa propre traduction de la Bible en allemand en 1522. En effet, le livre saint n’était jusqu’alors disponible qu’en latin : son message était donc inaccessible aux non-initiés.

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À retenir

Ce retour aux Écritures et la vulgarisation de la Bible permettent de rendre les écrits saints plus accessibles.

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Définition

Vulgarisation :

Ici, traduction de la Bible dans une langue connue du grand public, pour qu’elle soit accessible au plus grand nombre.

Jusqu’alors, seuls les initiés (clergé, princes et nobles) sachant parler et lire le latin pouvaient en comprendre le vrai sens. Le prêtre avait alors un rôle fondamental dans les communautés. Il servait d’intermédiaire entre les croyants et leur livre saint, et donc Dieu. Avec les traductions de la Bible dans les langues vernaculaires (non latines pures : allemand, français, italien, etc.), les protestants souhaitent établir un lien direct entre les croyants et Dieu, sans passer par un prêtre.

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À retenir

C’est un changement très important car il implique que les croyants n’auront plus forcément besoin des prêtres pour lire et interpréter la Bible.

La fonction du prêtre est alors supprimée au sein des communautés protestantes qui se dotent de pasteurs. Ces derniers doivent guider les croyants. Les fondements du catholicisme sont donc remis en cause. Mais les communautés protestantes sont aussi divisées entre elles vis-à-vis des différentes pratiques cultuelles (manière de célébrer les croyances) et de l’interprétation des Écritures.

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Exemple

Les Calvinistes refusent les cultes des images et des saints, se livrant à l’iconoclasme. Les anabaptistes refusent le baptême des enfants.

Sac de Lyon par les Calvinistes en 1562 qui se livrent à l’iconoclasme - histoire - 2de - SchoolMouv Sac de Lyon par les Calvinistes en 1562 qui se livrent à l’iconoclasme, en brûlant les icones dans un bucher. Peintre lyonnais anonyme, vers 1565, Musée d’histoire de Lyon

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Définition

Iconoclasme :

Destruction des icônes religieuses. Elles étaient très importantes dans l’Église catholique où l’on trouvait peintures et statues à profusion).

Les guerres de religion et la Contre-Réforme

L’Europe au centre des guerres de religion

  • En Allemagne :

La Réforme entraîne dès les années 1520 des conflits politico-religieux en Allemagne entre les princes soutenant Luther et ceux qui restent fidèles à l’Église et à l’Empereur. Ces conflits débouchent sur la guerre des paysans allemands entre 1524 et 1526. Ils entraînent plus tard la rébellion des princes convertis à la Réforme. À Munster, les anabaptistes instaurent une dictature théocratique en 1534.

  • En Angleterre :

À partir de 1532, pendant que l’Allemagne est prise dans cette guerre de religion, le roi d’Angleterre adopte la Réforme pour défier le pape. Henri VIII n’obtenant pas du souverain pontife son divorce, il suit les conseils de son ministre protestant, Thomas Cromwell, qui le pousse à rompre avec Rome. Henri VIII réforme alors l’Église d’Angleterre qui sera désormais l’Église dite anglicane, dirigée par le roi en personne.

Portrait de Henry VIII par Hans Holein le Jeune - Histoire - 2de - SchoolMouv Portrait de Henry VIII par Hans Holein le Jeune, 1537-1547

  • En France :

En France, l’opposition entre catholiques et protestants n’atteint son apogée que quelques décennies plus tard. Le pouvoir politique est alors affaibli depuis la mort de Henri II en 1559. Ses fils sont encore très jeunes et le royaume est dirigé par sa veuve Catherine de Médicis. Le conflit entre les catholiques et les huguenots (protestants français) commence en 1562 et se transforme vite en guerre civile. Cette guerre durera trente ans.
Elle atteint son point culminant le 24 août 1572 : la colère de catholiques parisiens, résolument anti-huguenots, les pousse à massacrer en masse les aristocrates protestants venus assister au mariage de Marguerite de Valois (princesse royale) avec Henri de Navarre. Ce dernier, quoique prince de sang, est en effet de confession protestante. Ce sinistre évènement reste connu sous le nom de massacre de la Saint-Barthélemy.

 Le Massacre de la Saint Barthélémy - Histoire - 2de - SchoolMouv Le Massacre de la Saint Barthélémy, peint par le peintre huguenot François Dubois. Entre 1572 et 1584, Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne, Suisse

Les guerres de religion prennent fin lorsque le nouveau roi, Henri IV (anciennement Henri de Navarre), qui est aussi le chef des protestants, accepte la conversion au catholicisme pour retrouver l’unité du royaume et promulgue l’Édit de Nantes (1598), qui établit la tolérance religieuse dans le royaume.

La Contre-Réforme catholique (1532-1563)

L’Église catholique va dans un premier temps confier la répression du protestantisme à l’Inquisition : les protestants qui refusent de se convertir sont alors excommuniés (exclus de la communauté catholique) ou condamnés au bûcher.

Devant l’inefficacité de ces mesures, l’Église catholique met en place de nouvelles congrégations religieuses, comme l’ordre des Carmélites créé par Thérèse d’Avila en 1562, chargées de propager le message de Rome. Ces dernières sont aussi chargées l’évangélisation des masses selon le culte catholique.

Thérèse d’Avila, par Peter Paul Rubens, vers 1615 - histoire - 2de - SchoolMouv Thérèse d’Avila, par Peter Paul Rubens, vers 1615

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Définition

Congrégation religieuse :

Association de religieux qui vivent ensemble selon des principes établis.

Évangélisation :

Convertir une ou des personnes au culte chrétien.

L’ordre le plus célèbre qui sera instauré en réaction à la Réforme est la Compagnie de Jésus, créée par Ignace de Loyola en 1534. Les membres de cette congrégation sont appelés Jésuites. Ils orientent rapidement leurs activités vers l’évangélisation et l’éducation : à cette fin, ils ouvrent des collèges destinés à dispenser à la jeunesse les saints enseignements catholiques. Ils cherchent ainsi, en formant des catholiques dès le plus jeune âge, à freiner la montée du protestantisme.

Ignace de Loyola, auteur anonyme, XVIe siècle - SchoolMouv - histoire - 2de Ignace de Loyola, auteur anonyme, XVIe siècle

Beaucoup d’églises catholiques sont également bâties partout en Europe et dans les campagnes.

En parallèle, la Réforme initiée par Luther demande des comptes à l’Église catholique. C’est pourquoi le pape Paul III convoque le Concile de Trente le 22 mai 1542. Les réunions de ce concile auront lieu de 1545 à 1563 et aboutiront à une série de mesures regroupées sous ce qu’on appellera la Contre-Réforme (en réaction à la Réforme). L’Église réaffirme ses fondamentaux culturels et définit plus clairement les pratiques du clergé. La Contre-Réforme redonne donc un nouveau souffle à l’Église catholique et lui permet d’affermir son pouvoir parmi ses partisans. Pour autant, elle n’affaiblit pas la foi protestante dont elle ne parvient toujours pas à convertir les fidèles, émancipés depuis un demi-siècle.

Conclusion :

La Réforme initiée par Martin Luther transforme l’Europe du XVIe siècle. La France est déchirée par une guerre civile qui oppose catholiques et huguenots pendant plus de trente ans. Tandis que l’Angleterre adopte l’Église protestante : le roi bénéficie ainsi des pleins pouvoirs en s’affranchissant de l’autorité pontificale.
Contestée, l’Église catholique est contrainte de se réformer : à l’issue du concile de Trente, elle dépoussière certaines pratiques religieuses devenues obsolètes et renforce son pouvoir sur ses partisans.