Le XVIIIe siècle est le siècle des « explorateurs ».
À cette époque, la France et l’Angleterre entreprennent des voyages de « circumnavigation ».
Le Pacifique fait notamment l’objet d’un partage aux desseins commerciaux déclarés : établir des colonies et des comptoirs.
Les explorateurs agissent à la demande du pouvoir (cf. Louis XVI et La Pérouse).
Leur mission, en sus du caractère commercial, est scientifique (tracer la carte de territoires, effectuer des relevés de flore, réaliser des observations astronomiques etc.)
Les visées scientifiques dépassent les objectifs commerciaux ou politiques.
Le voyage est une occasion de rencontres :
entre cultures ;
mais aussi entre concitoyens explorateurs.
Les échanges affluent et l’idée que c’est par la confrontation des savoirs qu’on en crée de nouveaux s’ancre dans la pensée de l’époque.
Ces expéditions sont parfois suivies de récits de voyage qui témoignent des découvertes accomplies.
Ce type de récit contribue à l’enrichissement et à la vulgarisation des nouvelles connaissances.
Des illustrations sous forme de planches accompagnent les textes.
Grâce à cette association de textes et d’images, ces journaux de bord constituent de véritables puits de connaissances et se font le ferment de la rêverie du lecteur.
Plus proches de la nature, les peuplades du Pacifique diffèrent de la civilisation européenne.
Certains auteurs intègrent cet « autre » à leurs récits, trouvant là une bonne occasion de remettre en cause et de critiquer la société dans laquelle ils vivent.
Dans les Lettres persanes, Montesquieu amorce une confrontation entre un regard étranger et la France du XVIIIe siècle.
Les Lettres persanes de Montesquieu
Montesquieu publie son roman en 1721 en feignant de n’être que l’éditeur de vraies lettres échangées entre des personnages ayant une existence propre.
Il faut d’abord se pencher sur l’originalité de la forme du roman qui se partage entre :
roman épistolaire ;
et conte philosophique
Usbek et Rica, deux Persans à Paris, correspondent avec leur famille et amis restés en Perse.
Leurs lettres témoignent de leur étonnement et scepticisime à l’égard des mœurs de la capitale.
Les lettres envoyées et reçues constituent le roman.
Cette forme particulière fait des Lettres persanes un roman épistolaire.
Ce genre permet à Montesquieu :
d’aborder sans transition des sujets très divers ;
de changer fréquemment de ton et de registre.
Le tout rend l’ensemble très vivant et renouvelle sans cesse l’intérêt du lecteur.
À cette dynamique effrénée du récit, l’auteur ajoute une dimension philosophique qui incite à la réflexion.
Montesquieu aborde dans son roman les thèmes majeurs de l’esprit nouveau du XVIIIe siècle : la liberté, le bonheur, la tolérance, la nature.
Il encourage la lutte contre les superstitions, les préjugés, et l’artifice.
L’étude est aussi politique et encourage une réflexion sur la légitimité de l’absolutisme.
Le roi de France et le régime monarchique ne sont donc pas épargnés.
La satire dans la lettre XXIV des Lettres persanes
Les observateurs étrangers relèvent ce que les Français ne voient plus par habitude.
Ils notent les absurdités et les injustice de la société de la fin du règne de Louis XIV.
La satire est mordante :
le roi est un « magicien » ;
le pape est « une vieille idole qu’on encense par habitude » ;
les salons sont élitistes ;
la mode est un phénomène incompréhensible ;
la cour est soumise au bon vouloir du roi et les sujets de ce dernier manipulés.
Le texte porte les marques du genre épistolaire et la situation de communication est clairement précisée.
Si la critique est sévère, elle se justifie non seulement par le fait que le locuteur est étranger, mais aussi par son inexpérience de la vie en Europe.
La lettre se protège ainsi des lecteurs qui la trouverait irrévérencieuse.
Rica étant persan, la focalisation interne donne à lire le point de vue d’un étranger dont les références sont ici orientales et servies par des comparaisons et figures d’oppositions.
La fausse naïveté de Rica offre à Montesquieu la distanciation ironique nécessaire à une satire à la fois percutante et plaisante.
L’ironie est présente car l’auteur ne dit pas explicitement ce qu’il pense ; sa critique est ainsi détournée.
Le lecteur du début du XVIIIe siècle comprend les allusions et références ; il découvre certaines réalités bien connues de lui d’un point de vue qui les éclaire d’un jour nouveau tout en relevant d’un certain bon sens.
Le regard éloigné offre un grand nombre de procédés littéraires permettant d’asseoir une critique sévère mais plaisante d’une société.
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