Genèse et affirmation des régimes totalitaires

Introduction:

Nous allons nous intéresser dans ce cours aux régimes totalitaires qui ont bouleversé l’Europe au cours du XXe siècle. Nous essayerons de comprendre pourquoi et comment ils sont apparu après la Première Guerre mondiale, quels sont leurs modes de fonctionnement et quelles idéologies fondatrices les caractérisent.

L’aventure du totalitarisme en Europe

Des démocraties affaiblies, des régimes essoufflés

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À retenir

Les trois régimes totalitaires sont issus de la déflagration de la guerre de 1914-1918. C’est le choc de la guerre qui a engendré ces trois régimes.

La révolution russe de 1917, en pleine guerre, met en place le régime communiste. L’Italie ne s’est pas remise de sa victoire « volée » et de son traumatisme ; et, en 1922, Mussolini prend le pouvoir de manière démocratique. Même si Hitler n’arrive au pouvoir qu’en 1933, ce sont les conséquences du traité de Versailles pour l’Allemagne, puis de la crise économique de 1929, qui ont permis à Hitler de prendre le pouvoir, lui aussi de manière démocratique. La crise économique de 1929 a également eu des conséquences dramatiques en Europe.

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À retenir

C’est par rancœur des conséquences de 1914-1918, et du fait de la faiblesse des démocraties en Italie et en Allemagne que le totalitarisme a vu le jour.

La Russie n’avait quant à elle pas connu la démocratie avant de basculer dans le communisme. En Italie et en Allemagne, la démocratie est vue comme responsable de tous les maux d’après guerre. On pointe la faiblesse du parlementarisme, les difficultés économiques et sociales, et surtout la défaillance face à ce que l’on estime être un vol, un traumatisme, une blessure dégradante : le règlement du conflit.

L’Italie veut sa victoire entière et reprend par la force les territoires promis. La force et la violence remplacent les négociations. Le communisme y est attendu ou redouté. Même cas pour l’Allemagne. L’impuissance face au « diktat de Versailles » et face à la crise mène les Allemands à confier le pouvoir aux thèses violentes et simplistes d’Hitler. La Russie se tourne vers le communisme, avec pour but initial d’amener le pays vers un développement égalitaire.

  • Ces trois systèmes totalitaires veulent une société nouvelle, un homme nouveau.

L’expression du pouvoir totalitaire

  • Qu’est-ce que le totalitarisme ?

Le totalitarisme, c’est la volonté de contrôler totalement la population dans la sphère publique et dans la sphère privée. Les trois régimes que nous allons étudier voulaient faire naître un homme nouveau, mettre en place un système politique novateur. Il existe de nombreux points communs aux trois régimes totalitaires.

  • La figure du chef :
  • un personnage charismatique, le guide du peuple, que l’on vénère, que l’on adule.
  • les jeunesses hitlériennes ;
  • Benito Mussolini, le « Duce », est par exemple un personnage haut en couleur, grand démagogue, avec un grand talent d’orateur et de manipulateur de foule.
  • Un parti unique au service du chef :
  • les jeunesses hitlériennes ;
  • le parti fasciste italien, issu des « chemises noires » ;
  • le parti nazi, le NSADP, issu des « chemises brunes » ;
  • le parti communiste soviétique, le parti bolchévik.
  • Le régime totalitaire c’est aussi une police politique redoutable qui surveille le peuple, et traque et réprime les opposants :
  • les jeunesses hitlériennes ;
  • la Gestapo en Allemagne ;
  • L’OVRA en Italie ;
  • Le NKVD qui devient le KGB en URSS.
  • La jeunesse est strictement encadrée, pour faire éclore une élite au service du régime :
  • les jeunesses hitlériennes ;
  • les jeunesses fascistes ;
  • les jeunesses communistes.

Dès l’âge de 7 ou 8 ans, et jusqu’à l’âge de 18 ans, le régime éduque, façonne, formate, embrigade cette future élite. On y endoctrine sur le plan politique, on y fait beaucoup de sport : on cherche à avoir un citoyen modèle. Rentrer dans cette élite est un honneur pour les familles, et un brillant avenir est assuré pour les enfants concernés.

L’éducation de la jeunesse passe par l’école commune. Tous les écoliers, collégiens, lycéens et étudiants y sont soumis à la philosophie du régime. Les programmes scolaires, les manuels scolaires, la philosophie dominante sont distillés au quotidien aux millions de jeunes qui doivent devenir de « bons citoyens » qui serviront sans faille le chef et le régime.

  • Au sein du régime totalitaire, la répression est constante.
  • Pour l’Allemagne nazie, le premier camp de concentration est ouvert en 1933 à Dachau. Bien d’autres ont été ouverts par la suite. Le camp se remplit d’abord de communistes, puis de militants de la gauche allemande, puis enfin de tous ceux qui s’opposent à Hitler. Travaux forcés, tortures, maltraitances sont le lot quotidien.
  • En URSS, c’est le goulag, camp de travaux forcés, souvent situé en Sibérie. Des millions d’opposants sont déportés dans ces goulags, où ils meurent en masse du fait de conditions de vie et de travail très rudes.
  • En Italie, l’essentiel des déportés le sont dans les îles Lipari, où les maltraitances et la torture sont pratiquées.

La violence est un fait commun aux trois régimes, violence au quotidien, sur les individus et sur certains groupes. Il n’y a pas d’État de droit. Le citoyen n’est absolument pas protégé de l’arbitraire du régime. La culture et l’art sont toujours au service du régime. C’est une culture et un art épurés et soumis à la censure, omniprésente au quotidien.

L’individu doit s’effacer au profit du groupe, du peuple, il doit se fondre dans la masse. L’État est omniprésent et très puissant. Dans les trois régimes, l’État se confond avec le parti unique.

De nouveaux régimes aux idéologies singulières

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Attention

Ces trois régimes se différencient tout de même sur certains aspects. Les idéologies sont différentes d’un régime à l’autre.

Le nazisme

Le nazisme est basé sur la hiérarchie des « races ». La « race » aryenne est, selon les nazis, la race supérieure. Dans cette hiérarchie, les « races » de couleurs sont inférieures : les Slaves sont donc considérés comme des sous-hommes, et les Juifs sont à « éliminer ».

  • L’Allemand aryen doit dominer l’Europe afin de se constituer un espace vital pour s’épanouir et exploiter les matières premières qu’il ne possède pas.

Il peut donc mettre en esclavage les populations qu’il juge inférieures et éliminer ceux qu’il hait. Ce n’est pas qu’une théorie, car Hitler a mis en place cette politique concrète en Allemagne et dans une partie de l’Europe, surtout à l’Est, entre 1939 et 1945.

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À retenir

En 1935, les lois de Nuremberg placent les Juifs allemands en dehors de la citoyenneté et de la loi. En novembre 1938, « la Nuit de cristal », est le théâtre d’une persécution violente de la communauté juive allemande. En 1942, la Solution finale, qui vise à éliminer le peuple juif de toute l’Europe, est mise en place.

Les Slaves et les Polonais ont également été massacrés et exploités durant les années de guerre. Les nazis ont pillé, massacré et ruiné l’Europe.

  • C’est une idéologie raciste mêlée de nationalisme.

Le fascisme

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À retenir

Le fascisme italien se base sur le nationalisme et la gloire passée de l’Empire romain. Mussolini rêve de recomposer l’Empire romain autour de la Méditerranée.

Il n’y a pas ici une dimension raciste aussi forte qu’en Allemagne. Même si Mussolini, sous la pression d’Hitler, établit en 1938 une législation antisémite, elle n’a pas eu les mêmes effets qu’en Allemagne.

  • C’est une forme d’impérialisme et de nationalisme.

Le stalinisme

Le communisme soviétique se base sur une lecture du marxisme. L’idée est de fonder une société sans classes sociales. L’ennemi est le capitalisme ainsi que tous ceux qui ont l’esprit capitaliste et individuel.

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À retenir

Tout est donc collectivisé, étatisé, et le parti communiste est le seul à pouvoir donner un cap à la société toute entière. Pour les communistes, c’est la fin de l’exploitation de l’Homme par l’Homme liée au capitalisme.

Au nom de l’égalité sociale, on a toutefois éliminé des millions de personnes.

  • Il n’y a pas ici d’idéologie raciste ni impérialiste. À terme, le but est d’instaurer le communisme sur la planète entière.

Le système capitaliste en opposition au communisme

Le système économique de chaque État totalitaire est différent.

  • L’Allemagne et l’Italie sont des régimes capitalistes. Au début du régime dans les deux cas, il s’agit d'un capitalisme d’État, assez dirigiste, puis, le système se libéralise au fil des ans. Dans les deux pays, les grands industriels, les banquiers et la bourgeoisie ont soutenu largement le régime, soit par adhésion à l’idéologie, soit par peur du communisme.
  • En URSS, c’est un système communiste. Il n’y a pas de propriété privée. Tous les moyens de production, tout ce qui crée de la richesse, appartient à l’État qui doit ensuite répartir équitablement et redistribuer les richesses créées. C’est la collectivisation comme dans l’agriculture avec les Kolkhozes, coopératives ou Sovkhozes, fermes d’État. Celui-ci planifie strictement l’économie. Étatisation, collectivisation, et planification résument le système soviétique.

L’armée, chez les nazis comme chez les fascistes, est préparée pour une éventuelle guerre. Le côté guerrier et la volonté expansionniste sont toujours présents dans ces deux régimes.

L’Armée rouge est prestigieuse en URSS car elle a gagné la guerre civile en 1919-1921, et a libéré l’Europe de l’Est durant la Seconde Guerre mondiale, c’est donc un pilier du régime. Mais le régime ne véhicule pas de valeur guerrière, excepté dans le contexte particulier de la guerre froide.

Conclusion:

Ces trois régimes totalitaires ont fait régner la terreur sur leur propre population mais aussi sur d’autres pendant la Seconde Guerre mondiale et, pour l’URSS, pendant la guerre froide. Le bilan des ces systèmes totalitaires est lourd. Des millions de personnes ont vécu dans la terreur, des millions ont disparu.

Au nom de la race, au nom de la nation, au nom de l’égalité sociale, ces trois régimes ont laissé une marque indélébile dans l’histoire de l’humanité. C’est une réflexion profonde qui se dresse devant nous car, pour l’Italie et l’Allemagne, c’est de manière démocratique que ces régimes sont arrivés au pouvoir. La démocratie n’est pas une donnée définitive dans nos sociétés, elle se travaille et doit s’enrichir de réflexions profondes pour ne pas se laisser tenter par des expériences totalitaires qui paraissaient aux yeux des populations de l’époque, la « recette » aux malheurs du temps.

L’Allemagne nazie et l’Italie fasciste ont disparu en 1945. Ces deux pays sont rentrés dans l’Europe et dans une culture démocratique. L’URSS a disparu en 1991 et la Russie d’aujourd’hui éprouve encore des difficultés à mettre en place un système réellement démocratique.